Bourbon-Condé, Anne Geneviève de (duchesse de Longueville) [?] [1650 [?]], APOLOGIE POVR MESSIEVRS LES PRINCES, ENVOYEE PAR MADAME DE LONGVEVILLE A MESSIEVRS DV PARLEMENT DE PARIS. , françaisRéférence RIM : M0_126. Cote locale : B_6_48.
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qui est la premiere prerogatiue que nous ayons, elle ne nous vient
que de Dieu, duquel seul nous nous reconnoissons les Ouurages. Ainsi
c’est purement du Ciel que nous tenons l’honneur d’estre sortis de la tige
de nos Monarques ; & Louys de Bourbon nostre Bisayeul n’estoit point redeuable
à Anthoine Roy de Nauarre, bisayeul de sa Majesté, de ce qu’il
estoit son frere. Le Cardinal Mazarin tesmoigne en suitte beaucoup de
regret de n’auoir pû conseruer dans la conduite de l’Estat Monsieur mon
frere, capable à ce qu’il auouë d’y rendre de grands seruices pendant les
temps les plus difficiles. Surquoy ie vous supplie de n’oublier pas que
nous auons icy vne confession solemnelle, pour opposer aux iniures qui
le dépeignent par tout son Libelle, comme vn homme impetueux, plein
de fougue & peu capable d’affaires. Il conclud enfin sa Preface par la fascherie,
qu’il dit qu’il ressent de ce que le Prince n’a pas voulu se contenter
de viure le plus riche sujet de la Chrestienté ; mais l’exageration qu’il
en fait est aussi fausse, que la douleur qu’il en tesmoigne, non seulement
quant aux desseins de Monsieur mon frere tousiours reglez, tousiours
legitimes : Mais quant à ses establissemens, qui sans regarder ceux des
païs Estrangers, où il s’en void de beaucoup plus considerables, sont esgallez
en France, s’ils ne sont pas surpassez par les Charges & par les biens
de plusieurs particuliers. Ce sont là les moyens que le Cardinal Mazarin
employe pour tascher de gagner creance, & de preparer les esprits
contre la justification des Princes ; mais si ie ne me trompe, c’est auec
peu de sens & de succez. Cependant il sçait bien qu’il n’a rien d’effectif à
leur imputer, au lieu devenir en suite d’vn exorde si artificieux à découurir
les menées qu’ils ont pratiquées pour aller à la Souueraineté, de mettre
au iour leur rebellion & leur felonnie, & de les monstrer aux yeux de
l’Europe, comme des gens qui ont conspiré contre l’Estat, au lieu de ces
grands crimes que l’on attendoit & qui deuoient attirer sur eux l’aduersion
vniuerselle, il leur oppose vn denombrement ennuyeux des moindres
bienfaits qu’ils tiennent du Roy, & qui ne font rien à la cause, si ce
n’est qu’ayans tous esté demandez auec respect & obtenus auec justice, ils
seruent à prouuer le merite & les seruices de ceux qui les ont receus.

 

C’est pourtant sur cette exageration qu’il fonde leur peu de reconnoissance,
& qu’il veut faire des ingrats de ceux dont il ne peut faire des
coupables. Mais de quel blasme ne sommes-nous pas dignes, nous qui
souffrons que l’Education de nostre Monarque demeure entre les mains
d’vn homme, qui au lieu d’aider cette bonté de nature qui le porte aux
grandes Vertus, tasche de la corrompre, en luy imprimant des sentimens
sordides & bas, & loin de la nourrir à la liberalité & de l’instruire à
ne se ressouuenir que des seruices qu’on luy rend (qui est sans doute le
plus beau sentiment des Roys) n’a point de honte de publier sous son
Nom, les reproches des dons qu’il a faits ; mais de quelle sorte ? jusque

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Bourbon-Condé, Anne Geneviève de (duchesse de Longueville) [?] [1650 [?]], APOLOGIE POVR MESSIEVRS LES PRINCES, ENVOYEE PAR MADAME DE LONGVEVILLE A MESSIEVRS DV PARLEMENT DE PARIS. , françaisRéférence RIM : M0_126. Cote locale : B_6_48.