Bourbon-Condé, Anne Geneviève de (duchesse de Longueville) [?] [1650 [?]], APOLOGIE POVR MESSIEVRS LES PRINCES, ENVOYEE PAR MADAME DE LONGVEVILLE A MESSIEVRS DV PARLEMENT DE PARIS. , françaisRéférence RIM : M0_126. Cote locale : B_6_48.
Page précédent(e)

Page suivant(e)

-- 56 --

obtenir l’argent que le Cardinal Mazarin s’estoit engagé de faire donner.
Le premier estoit honteux à vn Prince du Sang, le second estoit difficile
par les artifices qu’on apportoit à en prolonger l’execution. Apres beaucoup
de sollicitations inutiles & eludées, ce Prince s’estant resolu à les licencier,
plustost que de souffrir que le peuple en fust plus long-temps incommodé,
voulant bien receuoir ce déplaisir afin de soulager la Champagne.
Tout d’vn coup (voyez la méchanceté) ce Ministre fit expedier
des assignations pour leur leuée : mais des assignations qui donnant des
apparences d’vn payement prompt ne produisoient point d’argent. Messieurs
Daligre, de Morangis & Tubœuf, qui sont gens d’honneur & d’integrité,
& que j’appelle icy en tesmoignage, assureront qu’ils en ont
changé presque tous les huit jours, & qu’elles se sont trouuées toutes inutiles.
Et ne refuseront pas au mesme temps d’auoüer cette verité, qu’il
ne s’est point passé de sepmaine qu’on ne leur ayt representé que la Champagne
se ruïnoit, & que faute d’vne somme modique, ou d’vne negatiue
absoluë on laissoit perdre vne Prouince. L’Esté se passa de cette sorte, sans
que par la mauuaise foy du Cardinal Mazarin-cette promesse pust estre
déchargée de ces Compagnies, & sans qu’on les pust licencier. Cependant
M. le Prince de Conty pour remedier aux desordres de ses Trouppes par
vn exemple de seuerité, remit entre les mains des Tresoriers de France
de Chaalons, l’Enseigne de sa Compagnie de Gens-d’armes accusé de quelques
concussions qui fut cassé, & qui restitua ce qu’il auoit pris. Il ayma
encore mieux exposer sa Compagnie de Cheuaux legers aux courses des
ennemis, la tirant hors de la Prouince que de l’y laisser d’auantage. Aussi
fut-elle enleuée dans le Barrois par les trouppes de Luxembourg que le
Duc Davré commandoit. Enfin il n’obmit rien pour soulager son Gouuernement,
cependant que le Cardinal Mazarin employoit tout pour le
perdre. Au milieu de la campagne il donna dans cette miserable Prouince
vn lieu d’assemblée au Regiment d’Allemans de Ruuignes qui pillerent
Fere, & qui ruïnerent le païs d’alentour. Il en donna vn aux ennemis de
Meaux pour d’autres Compagnies de Cauallerie. Il fit passer & repasser au
trauers de la Champagne les Regimens de Monsieur le Prince de Conty,
sous le pretexte de l’affaire de Liege, quoy que comme vous auez veu, il
eust engagé sa parole au Duc de Bauiere, & qu’il sceust bien qu’elle ne reüssiroit
pas. Et cependant cét homme qui a fait tous ses efforts pour desoler
cette Prouince, ose accuser de ses malheurs, vn Prince qui a tant apporté
de soin pour la garentir ; & luy qui a abusé de l’excez de cette authorité
qu’il a vsurpée, qui a employé ses tromperies & ses malices pour l’accabler,
en veust détourner le blasme sur ce Prince, qui n’a pas seulement voulu y
prendre de quartier pour acheuer ses Regimens, peut-on endurer cette injustice ?
L’autre partie de l’accusation regarde le mauuais ordre du quartier
d’hyuer, & l’argent que l’on a exigé pour les deslogemens. Mais ie seray
Page précédent(e)

Page suivant(e)


Bourbon-Condé, Anne Geneviève de (duchesse de Longueville) [?] [1650 [?]], APOLOGIE POVR MESSIEVRS LES PRINCES, ENVOYEE PAR MADAME DE LONGVEVILLE A MESSIEVRS DV PARLEMENT DE PARIS. , françaisRéférence RIM : M0_126. Cote locale : B_6_48.