Bourbon-Condé, Anne Geneviève de (duchesse de Longueville) [?] [1650 [?]], APOLOGIE POVR MESSIEVRS LES PRINCES, ENVOYEE PAR MADAME DE LONGVEVILLE A MESSIEVRS DV PARLEMENT DE PARIS. , françaisRéférence RIM : M0_126. Cote locale : B_6_48.
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quelque chose de plus considerable que tant de conquestes, qui estoit la
paix, le souhait des peuples & le repos de la Chrestienté. Vous vous souuenez,
MESSIEVRS, de l’issuë ridicule où se terminerent ses grandes
promesses : il fit ce qu’il a accoustumé de faire, il trompa le monde. Apres
auoir receu les honneurs des Souuerains par les lieux où il passoit ; apres
auoir laissé le Roy, & la Reyne dans vne solitude honteuse pendant que
toute la Cour estoit à sa suitte, apres auoir exigé de l’Armée les plus grands
respects que ceux qui mesprisoient sa personne rendirent à son Ministere,
apres beaucoup de promesses de Gouuernemens, de charges & d’argent
qu’il fit aux Chefs de cette Armée, pour se les acquerir tout à fait en les
trompant. Ce Singe dépoüilla enfin sa robbe de pourpre, il reünit à son
naturel, sans negotier rien de serieux, il courust aux bagatelles, il se remit
à trafiquer auec les Allemans, de toille, de gans, de baudriers ; il acheua
de se rendre contemptible à ceux qu’il pensoit obliger, & pendant qu’on
s’estonnoit de voir attaché à ces emplois le premier Ministre du plus
grand Roy du monde, cét homme superbe & sans connoissance de son
origine, comme s’il eust bien conserué la dignité de ce Ministere, contraignit
le Regiment destiné pour veiller à la conseruation de nos Roys, d’entrer
en garde deuant sa rente, & pour comble de déplaisir, les Officiers
d’vn si braue corps plein d’indignation, & de honte se trouuerent armez
deuant cette indigne boutique, où par tant de bassesses le Cardinal Mazarin
offençoit son Maistre, & deshonnoroit son Caractere. C’est là le fruict
de son expedition qu’on coloroit d’vn pretexte honneste, mais dont le
but estoit de faire, que ces trouppes se donnassent entierement à luy, de
les animer à vostre perte, & de les y engager par l’espoir du pillage & par
l’amorce de la proye. Mais admirez son audace, luy qui dans la derniere
necessité du Royaume, venoit de consommer en ce beau voyage cinquante
mil escus, que l’esperance de la paix auoit fait prester à Monsieur le Prince,
& que l’on luy doit encore, comme s’il eust fait quelque chose d’excellent,
reuient prendre sa place à Compiegne, & eut l’insolence de discourir
d’vne entreprise si ridicule, ainsi que d’vne chose qui luy auoit heureusement
succedé. Poursuiuons, il accuse Monsieur le Prince d’estre demeuré
à la Cour pour y fomenter ses caballes, nous ferons sur cét article
comme nous auons fait sur les autres, pour nous deffendre, nous expliquerons
simplement la verité, & quoy qu’il y eust beaucoup à parler nous
en dirons peu de chose.

 

Le Cardinal Mazarin au sortir de la guerre de Paris, croyant par les
injures qu’il auoit faites à toute nostre nation, qu’autant qu’il y auoit
de François, qu’autant auoit-il d’ennemis, & ne voyant nulle seureté
pour luy, qu’en la protection de Monsieur le Prince, le supplia, luy fit
ordonner par la Reyne, employa toutes choses pour le retenir, pour l’empescher
d’aller à l’armée, pour l’obliger à n’esloigner pas le Roy. Monsieur

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Bourbon-Condé, Anne Geneviève de (duchesse de Longueville) [?] [1650 [?]], APOLOGIE POVR MESSIEVRS LES PRINCES, ENVOYEE PAR MADAME DE LONGVEVILLE A MESSIEVRS DV PARLEMENT DE PARIS. , françaisRéférence RIM : M0_126. Cote locale : B_6_48.