Renaudot, Théophraste [?] [1649], LA DEPLORABLE MORT DE CHARLES I, ROY DE LA GRAND’BRETAGNE. , françaisRéférence RIM : M0_1005. Cote locale : A_1_23.
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là fut conduit avec la mesme escorte, à laquelle se joignirent de
ses anciens Officiers, entre deux hayes de mousquetaires, jusques
sur vn eschafaut tout tendu de noir, dressé entre les portes de
Vvittehal & celle de Vvestminster, gardé en toutes ses avenuës
par plusieurs compagnies de cavalerie & d’infanterie, &
environné d’vne multitude extraordinaire de spectateurs.

 

Ce Prince infortuné, mais à qui le malheur ne put faire donner
aucune marque de lascheté, estant sur l’eschafault & ayant
fixement regardé la hache & le billot sur lequel on luy devoit
donner le coup, demanda si l’on ne le pouvoit élever d’avantage,
à quoy l’exécuteur ayant respondu que non, il s’adressa au Colonel
Thomlinson pour ce luy dist il qu’à peine il pourroit estre entendu
de la multitude ; Il continüa qu’il se fust empesché de parler
n’eust esté que par son silence il eust semblé aussi bien aquiescer
à la coulpe qu’à la peine qu’on luy imposoit. I’atteste dit-il
Dieu, que je n’ay jamais voulu empiéter sur les priviléges de mes
Estats généraux, lesquels ont commancé par m’oster la milice
qu’ils sçavoyent m’appartenir.

Il apert par la date de leurs commissions, que c’est eux qui ont
commancé la guerre, & non pas moy : adjousta qu’il estoit innocent
de toutes les autres choses dont on l’accusait, mais qu’il se reconnoissoit
coupable d’avoir souffert qu’vne sentence injuste fust
exécutée contre vn innocent : voulant parler, comme plusieurs
estiment, du jugement de mort rendu contre le Viceroy d’Irlande,
lequel ne se pouvoit exécuter sans son consentement qu’il y
presta, pensant calmer par là les orages dont ses Estats estoyent
menacez : qu’il pardonnoit neantmoins à vn chacun, & entr’autres
à ceux qui estoyent cause de sa mort : pour la repentance desquels
il prioit Dieu, comme faisoit S. Estienne : Qu’ils ne prospéreroyent
jamais, si au lieu de faire tout par la force, ils ne rentroyent
au chemin de justice, qui est de rendre à Dieu ce qui est à
Dieu, au Roy ce qui estau Roy : c’est-à dire son sceptre à ses successeurs,
ne se contant plus au nombre des vivans, & au peuple
ce qui est au peuple : pour avoir procuré la paix & la liberté, duquel
il estoit aujourd’hui en l’estat auquel on le voyoit : ce qui
le pouvoit faire apeller le Martyr du peuple.

Sur quoi le Docteur IacKson lui ayant demandé s’il n’avoit riẽ
à dire de sa religion pour la satisfaction du public, il le remercia
de cet avis & l’apellant Monseigneur, en tesmoignage d’humilité :
je meurs, lui dit-il, en la Religion Ang[2 lettres ill.]cane, telle que je l’ay
trouvée establie par mon Pére. Puis se tournant vers le Colonel
H. Kel, l’vn de ceux qui le gardoyent : je vous prie, luy dist-il, d’avoir

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Renaudot, Théophraste [?] [1649], LA DEPLORABLE MORT DE CHARLES I, ROY DE LA GRAND’BRETAGNE. , françaisRéférence RIM : M0_1005. Cote locale : A_1_23.