Nous ne pouuons, SIRE, perdre les bonnes esperances
que Nous auons conceuës de vôtre Regne ; Elles sont fondées
sur vôtre Royale Naissance, & sur tant de vertus qui
reluysent des-ja en vôtre personne : Mais il s’efforce de les
détruire en venant corrompre la felicité des premiers jours.
de vôtre Majorité, comme ces orages qui se forment au
matin, & qui sont en cela plus facheux, & plus mal-faisans,
qu’ils gâtent les premiers & les plus purs rayons de la
lumiere, & font craindre pour la serenité de tout le jour.
N’a il pas assez long temps desolé les fortunes particulieres
de vos Sujets, & fait chanceler celle de vôtre Estat, il semble
qu’il ne puisse souffirir de le voir encore debout.

Nous supplions tres-humblement, SIRE V. M. de se
souuenir qu’apres que les troubles qu’il nous a causez luy
eurent donné l’épouuante, & qu’il eut quitté le Royaume,
il vous plût accorder aux vœux de tous vos Sujets, vne Declaration
qui luy defend l’entrée dans les terres de vôtre
obeissance. Cét éloignement auoit r’asseuré nos craintes,
mais son retour les renouuelle aujourd’uy ; & c’est à nous
par le deuoir de nos charges à vous demãder auec soumission
& respect, l’execution d’vne parole si solemnelle.
Les paroles des Roys, comme elles font le destin des hommes,
doiuent estre inebrãlables, & leur Loy est verité comme
parle l’Ecriture : Nous aurez vous fait vne promesse si
fragile, nous aurez-vous accordé vn si grand bien pour si
peu de temps. Les biens faicts que les peres font à leuas enfans
seroient sans fruict, s’ils ne receuoient leur perfection
d’vne constante amitié : Ceux de Dieu sont reglez & durent
toûjours, & vôtre Majesté sçait assez que les Roys sont les
Peres des Peuples, & portent parmy les hommes l’Image de
la Bonté & de la Puissance de Dieu.