M. L. [signé] [1649], RESPONCE, ET REFVTATION du Discours intitulé. LETTRE D’AVIS A MESSIEVRS DV PARLEMENT DE PARIS, PAR VN PROVINCIAL. , françaisRéférence RIM : M0_3443. Cote locale : A_8_79.
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Nations qui donnoient droit de vie & de mort sur
leurs enfans, estoient mal fondées; parce que le pere ne
donne point la vie à son fils, & qu’estant vn acte de l’Ame
raisonnable, elle ne vient pas de l’homme, ny de la matiere,
mais elle est infuse de Dieu : Aussi la Loy diuine n’a
iamais donné cette puissance au pere, mais elle a remis
le chastiment du fils desobeïssant au Magistrat, comme
des autres criminels. Si doncques le pere mesme n’a pas
de Droit sur la vie de son fils qu’il amis au monde, quel
est celuy que peut auoir vn Seigneur sur son suiet ? Vous
me dittes qu’il regne dans vn pays de conquestes ; que
tous ses peuples sont ses esclaues ; qu’il y est entré par les
armes, & que par les armes il s’y est maintenu : que ses victoires
luy ont mis la vie & la mort de ses suiets entre les
mains ; qu’il pouuoit les tuer par le Droit de la guerre, &
que c’est par consequent auec beaucoup de Iustice, qu’en
les espargnant il s’en fait des esclaues par Droit de Seigneur.
Mauuaise conclusion, Monsieur, qui fait naistre
la iustice de la violence. Toutes ces raisons ont de l’air ou
pour le mieux dire du vent ; mais elles n’ont point de verité.
Il faut voir si le Tyran auoit quelque Droit sur les
pays qu’il a vsurpez, & s’ils estoient siens pour s’en rendre
le possesseur. Si c’estoit le bien d’autruy, quelle est la
conqueste qu’vne fureur ? Y a t’il quelque Loy qui l’exempte
de celle de Dieu ? si tout ce que nous pouuons
vsurper par force estoit à nous, les plus foibles n’auroient
iamais rien : les richesses de la terre appartiendroient toutes
aux Tyrans. On ne verroit point de paix au monde ;
tout le monde combattroit pour conquerir. Les meschans
dissiperoient leurs biens en criminelles despenses,
sous esperance d’en trouuer bien-tost d’autres à rauir ; le
trauail si recommandé de Dieu, seroit aneanty ; pouuant
auoir assez par force ; le gain honneste seroit à mespris,
& l’oysiueté & la guerre regneroient par tout. Les
choses ne vont pas de la sorte, le bien d’autruy n’est point
à nous pour l’auoir rauy. Quand nous éloignons les bornes
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M. L. [signé] [1649], RESPONCE, ET REFVTATION du Discours intitulé. LETTRE D’AVIS A MESSIEVRS DV PARLEMENT DE PARIS, PAR VN PROVINCIAL. , françaisRéférence RIM : M0_3443. Cote locale : A_8_79.