Anonyme [1649], LES LEÇONS DES TENEBRES DES PARISIENS, OV LES PROPHETIES de Ieremie sont nayuement expliquées suiuant ce qui arriue à present. , françaisRéférence RIM : M0_1808. Cote locale : C_3_1.
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SECONDE LEÇON.

1. Et toute la beauté de la fille de Sion l’a abandonnée : Ses Princes
comme des Belliers n’ont point trouué de pasture, & se sont esquiuez
sans force, de deuant les yeux des ennemis qui les poursuiuoient.

Paris est deuenu tout autre qu’il n’estoit auparauant ces remuëmens,
& a si bien changé de visage, qu’on ne le sçauroit
plus reconnoistre. Il a receu de l’eschec à Charenton & ailleurs
par la surprise de ses ennemis.

2. Ierusalem s’est ressouuenue des iours qu’elle eut de l’affliction, &
de l’absence de tout ce qu’elle auoit desiré, & qu’elle auoit possedé de
tout temps, lors que son peuple tomboit dans les mains de ses ennemis, &
qu’il ne venoit personne pour la secourir. Ses ennemis l’ont enuisagée,
& se sont mocquez de ses festes.

Ce fut alors que ces pertes nous firent desiller les yeux pour
mieux reconnoistre le mal qui nous talonnoit, & nous ressouuenir
de la paix que nous possedions : nostre memoire, dis je, fut
alors ouuerte, quand nous apperceusmes que nous estions
tombez dans les mains du Prince, & que personne ne se hastoit
de nous donner du secours. A cette heure-là nos ennemis
n’oublierent point leurs brocards, & se mirent à se gausser des
prieres que nous faisions tous les iours dedans nos Eglises.

3. Ierusalem a mis peché sur peché, c’est pourquoy elle n’est point
demeurée dans vn mesme estat. Tous ceux qui luy portoient de l’honneur
sont arriuez là-dessus, dautant qu’ils ont apperçeu son ignominie.
Mais elle fondant toute en pleurs, s’est tournée de l’autre costé.

N’est-il pas vray que Paris estoit si remply de toutes sortes de
crimes, que la paillardise & la volerie sur tous les autres pechez
y auoient la vogue, & qu’elle ne sçauoit en quelle posture se
mettre, changeant tous les iours de mode, soit aux habits ou
aux façons de parler : ce qui la faisoit mespriser de toutes les
autres Citez, non seulement de France, mais de tous les endroits
de la terre. Mais lors qu’elle s’est veuë affligée, elle s’est
enfin reconnuë, & se tournant de l’autre costé, c’est à dire
changeant de vie & de mœurs, elle s’est enfin repentie.

4. Elle a de l’ordure aux pieds, & ne s’est point ressouuenuë de sa
fin derniere. Elle à esté rudement demise, ne trouuant aucun moyen
pour se consoler. Seigneur considerez mon affliction, parce que mon
ennemy est desia tout droit.

Nous auions auparauant les pieds sales, car nous courions
à bride abbattuë à toutes sortes de crimes, ne nous ressouuenans
pourquoy nous sommes au monde. Nous auons esté rejettez

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Anonyme [1649], LES LEÇONS DES TENEBRES DES PARISIENS, OV LES PROPHETIES de Ieremie sont nayuement expliquées suiuant ce qui arriue à present. , françaisRéférence RIM : M0_1808. Cote locale : C_3_1.