Anonyme [1649], LES DERNIERES PAROLES DV ROY D’ANGLETERRE, Auec son Adieu aux Prince & Princesse ses Enfans. , françaisRéférence RIM : M0_1037. Cote locale : A_5_1.
page précédent(e)

page suivant(e)

-- 4 --

en abhorre la souuenance. Pris comme vn criminel,
lié, emprisonné, destrosné & degradé
publiquement, puis miserablement esgorgé,
auec telle inhumanité, que sur l’eschaffaut on
le menaça de luy couper la langue, s’il pensoit
se iustifier deuant le Peuple. A peine leur felonnie
luy peut permettre de voir ses Enfans dans
la prison, & de proferer ces paroles d’vne constance
vrayement heroïque : Aussi il est bien
vray qu’encor qu’il soit fascheux de mourir
innocent, que c’est vne grande satisfaction de
mourir sans crime.

 

Sçache, Peuple inhumain & barbare, que
pour t’auoir traitté auec trop de douceur, ie
meurs auec trop de cruauté ; que pour t’auoir
conserué, tu n’épargne aucune sorte de violence
contre moy ; que pour t’auoir aimé, tu me haïs ;
que pour t’auoir maintenu trop long-temps en
paix, tu m’as liuré la guerre ; & que pour t’auoir
agrandy d honneurs & de richesses par mon bon
gouuernement, tu m’oste mes biens, mes honneurs
& mes enfans ; & que pour auoir esté trop
soigneux de ta liberté, dont tu as abusé, tu m’ostes
la mienne. Encor si tu ne m’eusse point surpris
par trahison & que tu m’eusse laissé respandre
mon sang à la teste d’vne armée, ou dans la
fureur de la meslée d’vne bataille, i’eusse eu cette



page précédent(e)

page suivant(e)