Anonyme [1649], PROCEZ VERBAL, DE LA CONFERENCE faite à Ruel, Par Messieurs les Deputez du Parlement, Chambre des Comptes, & Cour des Aydes, ensemble ceux de la Ville. Contenant toutes les Propositions qui ont esté faictes, tant par les Princes & Deputez de la Reine, que par les Deputez desdites Compagnies, & de tout ce qui s’est passé entr’eux pendant ladite Conference. , françaisRéférence RIM : M0_2892. Cote locale : A_1_65.
PROCEZ VERBAL,
De la Conference faite à Ruel, Par Messieurs les Deputez
du Parlement, Chambre des Comptes, &
Cour des Aydes, ensemble ceux de la Ville.
Contenant toutes les propositions qui ont estez faites, tant par les
Princes & Deputez de la Reine, que par les Deputez
desdites Compagnies, & de tout ce qui s’est passé
entr’eux pendant ladite Conference.
Du Ieudy quatriéme Mars 1649.
LES Deputez pour la Conference de la Paix des
Compagnies Souueraines, & ceux de la Ville s’estans
tous trouuez sur les neuf heures du matin au
logis de Monsieur le premier President au nombre
de vingt-deux ; sçauoir, treize du Corps du Parlement,
trois de la Chambre des Comptes, trois de la
Cour des Aydes, & trois de la Ville, en sont sortis entre neuf & dix
pour aller à Ruel, au lieu destiné pour ladite Conference, lesquels
ont passé par la Porte S. Honoré, où ils furent arrestez au moins
deux heures en sortant par les Bourgeois qui estoient de Garde ce
iour-là, lesquels visiterent tous les chariots & bagages desdits Deputez,
dont ceux qui estoient passez les premiers accompagnez de
la Compagnie des Gardes de Monsieur le Prince de Conty auec
leur Cornette, attendirent les autres qui estoient derriere iusqu’au
dernier hors la Ville, entre ladite Porte & celle de la Conference,
où le sieur Saintot Maistre des Ceremonies vint les trouuer auec la
Compagnie des Gardes de Monsieur le Mareschal de Grammont,
qui estoient au bout du Cours-la-Reyne, pour les escorter iusqu’à
Ruel, aussi-tost les Gardes du sieur Prince de Conty, s’en retournerent
à Paris, & furent conduits ainsi auec autre escorte qui les vint
ioindre au Bois de Boulogne, audit lieu de Ruel, où ils arriuerent
sur les trois heures, & en entrant hors la Porte ledit sieur Saintot
leur dit & nomma à chacun les logis qui leur auoit esté marqué par
les Fouriers du Roy, où ils furent tous, & peu apres ledit sieur Saintot
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alla trouuer Monsieur le premier President qui estoit logé au logis
de Monsieur Croizet, Garde roolle de la grande Chancellerie,
qui luy dit en presence de cinq de Messieurs, qui estoient pour lors
auec luy, que Monsieur le Duc d’Orleans attendoit les Deputez
pour commencer la Conference qui se feroit auec luy, Monsieur le
Prince, Monsieur le Cardinal, Monsieur le Chancelier, & les autres
du Conseil ; Que Monsieur le Prince seroit à la gauche, & le Parlement
& les autres Compagnies en suite. Monsieur le premier President
dit qu’il voyoit d’abord deux difficultez en cette proposition,
l’vne pour la personne du Cardinal, & l’autre pour la seance : qu’il alloit
assembler Messieurs les Deputez de toutes les Compagnies pour
en deliberer, lesquels s’assemblerent chez mondit sieur le premier
President, qui prit seance à main droite au dessous de luy ; Messieurs
les Presidens de Mesmes, le Coigneux, & de Nesmond, & en suite
d’eux estoient Monsieur Nicolay, premier President de la Chambre
des Comptes, & Monsieur Amelot, premier President de la Cour
des Aydes : & à costé gauche estoit Monsieur Briçonnet, Maistre des
Requestes, Monsieur Mesnardeau, Monsieur le President Viole,
Monsieur de Longueil, Monsieur Bitault & de la Nauue ; & au dessous
de mondit sieur Amelot premier President de la Cour des Aydes,
Monsieur le Febvre, Monsieur le Coc, Monsieur Paluau ; & en
suite estoient les autres Deputez de la Chambre des Comptes, Cour
des Aydes, & de l’Hostel de Ville. Monsieur le premier President
a commencé à demander l’aduis par Monsieur Briçonnet, & à tous
les autres Deputez cy-dessus, & a finy par Messieurs les Presidens
Amelot, Nicolay, & Presidens du Parlement. Ce
qu’ayant esté fait ainsi, il a esté resolu qu’on diroit audit
sieur Saintot que la Compagnie ne pouuoit entrer en Conference
auec ledit Cardinal. Sur ce, ledit sieur Saintot estant reuenu,
dit que la Reyne desiroit qu’il y fut ; & que l’ayant choisi pour Deputé,
le Parlement ne deuoit le trouuer mauuais, puisque l’on n’empeschoit
pas que tous ces Deputez ne fussent à la Conference, & que
ce n’estoit point aux Sujets à donner la Loy à son Souuerain, &
qu’on eust à declarer si l’on n’entendoit pas qu’il y fut, auquel cas
Monsieur le Duc d’Orleans s’en retourneroit à sainct Germain. Les
Deputez preuoyans que cette responce alloit à la rupture de la Conference,
prierent ledit sieur Saintot d’aller dire à Monsieur le Duc
d’Orleans qu’il trouua bon que l’Assemblée luy rendit ses deuoirs, &
que deux d’icelle l’informeroient des raisons pour lesquelles la Conference
ne pouuoit estre faite auec ledit Cardinal. Monsieur le Duc
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d’Orleans mandit qu’il n’estoit point venu pour receuoir des complimens ;
qu’il estoit venu pour donner la paix à la France, & que cela
pouuoit estre fait en demie heure ; qu’il falloit que le Cardinal fut
à la Conference, les Deputez luy manderent qu’ils ne pouuoient le
consentir, & qu’ils le prioient de trouuer bon que deux de Messieurs
luy fissent entendre les motifs de l’Assemblée : Monsieur le Tellier
fut enuoyé de sa part pour apprendre ces motifs, & les demander à
Monsieur le premier President, qui luy dit que l’Assemblée ne le
pouuoit admettre à la Conference, pource qu’il auoit esté declaré
Perturbateur du repos public ; que c’estoit l’ennemy commun, & que
c’estoit contre luy que se faisoit la Conference, ledit sieur le Tellier
dit que si l’Assemblée entendoit que ledit Cardinal ne fut point admis
à la Conference ; Qu’il auoit charge de mondit Sieur le Duc
d’Orleans de dire qu’ils en retourneroit à S. Germain, & que lesdits
Deputez pouuoient s’en retourner à Paris, & repeta cela par trois
fois, & se retira, disant que Monsieur alloit monter en carosse. Les
Deputez resous aussi de s’en retourner à Paris le lendemain, & demanderent
escorte pour cela, & chacun se retira chez soy.
Le lendemain Vendredy estans leuez, ils donnerent ordre de
charger leur bagage, & allerent à la Messe, au retour de laquelle ils
s’assemblerent tous chez Monsieur le premier President, où fut propose
que Monsieur ne s’en estant point allé, il y auoit apparence de
croire que l’esperance de renoüer la Conference n’estoit pas perduë,
& sur cela chacun mit des propositions en auant, sur lesquelles cõme
on commençoit à deliberer, vint le sieur de Termes à la porte de la
chambre, qui demanda à parler à Monsieur le President de Mesmes,
qui luy dit que son Altesse Royale desiroit parler à Monsieur le premier
President, & à luy en suite : dequoy fut mis en deliberation s’ils y
deuoient aller, & fut arresté par l’Assemblée qu’ils iroient pour entendre
ce que sadite A. R. auoit à leur dire.
L’appresdisnée l’Assemblée estant continuée chez Monsieur
le premier President, il leur dit que pour obuier à la difficulté
que l’on faisoit d’admettre le Cardinal, l’on proposoit de donner
deux Deputez de la part de la Reyne, & deux de la part
de l’Assemblée, qui dans vne chambre particuliere du logis de
son A. R. qui est le Chasteau, confereroient sur les propositions qui
estoient à faire de part & d’autre, & rapporteroient aussi aux Deputez
de part & d’autre ce qui auroit esté proposé pour en deliberer, &
en porter la responce aux mesmes Deputez, qui seroient les vns dans
vne chambre dudit Chasteau, & les autres dans vne autre. Comme
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cette proposition s’alloit mettre en deliberation, est suruenu la Lettre
de l’vn de Messieurs du Parlement, laquelle a vn peu surpris l’Assemblée,
apprenant que l’on n’auoit point eu de bled à Paris. La proposition
deliberée, a esté arreste que l’on se transporteroit chez son
A. R. pour luy rendre les respects ; Que l’on nommeroit des Deputez
pour conferer auec les siens, & que nostre assemblée seroit au logis
de Monsieur le premier President ; Que les Deputez d’icelle
iroient au Chasteau le iour suiuant & autres de la Conference, & rapporteroient
à l’Assemblée au logis dudit sieur premier President, &
qu’ils confereroient, & que pour la premiere fois que l’on alloit
chez son A. R. l’on n’entreroit en conference, & que l’on ne parleroit
que d’auoir les bleds promis pour le Mercredy, Ieudy, Vendredy
& Samedy. Aussi tost la resolution prise, nous nous sommes
transportez au Chasteau, où Monsieur le premier President a fait vn
petit discours tout debout à Monsieur le Duc d’Orleans, Monsieur
le Prince, Monsieur le Chancelier, Monsieur de la Milleraye, Monsieur
le Tellier, Monsieur de la Riuiere, Monsieur de Brienne, & le
Cardinal vn peu esloigné proche de la cheminée, qui sont les Deputez
de la Conference. Le compliment fait, nous auons laissé son A.
R. dans sa chambre, & sommes passez par vne où les Deputez de
part & d’autre se deuoient assembler, & de là à vne autre où nous
deuions estre. Là estans assis, on a nommé pour Deputez pour la
Conference, pour le premier iour Monsieur le President le Coigneux,
& Monsieur le President Viole. Sur ce que le sieur Saintot
est venu nous dire que Monsieur le Chancelier & Monsieur le Tellier
estoient nommez par son A. R. aussi tost lesdits sieurs Presidens
le Coigneux & Viole ont eu charge de se plaindre de l’inexecution
de la promesse pour les bleds ; & comme ils parloient, Monsieur de
Champlastreux est entré porteur de Lettres du sieur Laisné, Intendant
à Corbeil, lesquelles luy auoient esté baillées par Monsieur le
Prince, par lesquelles on pretendoit iustifier de la diligence faite
pour lesdits bleds ; mais cette Lettre ne nous iustifioit rien de la liuraison.
Apres plusieurs allées & venuës, nous auons obtenu quatre
cens muids de bled pour lesdits quatre iours, moitié de Lagny, moitié
de Corbeil, & à cette fin tous passeports ont esté expediez, & mis
entre les mains d’vn des Escheuins pour y veiller, & en donner aduis
de ce jourd’huy ; mais les cent muids de Mercredy ne nous ont
esté accordez qu’à la charge qu’à l’heure mesme nous receurions
leurs propositions, & baillerions les nostres pour en deliberer. Pourtant
au lendemain nostre proposition a esté l’ouuerture des passages
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pour toutes sortes de viures. La leur a esté, que le Parlement iroit à
S. Germain faire sa fonction pendant vn temps, apres lequel le Roy
le congediroit. Qu’il ne se feroit d’Assemblées de Chambre de trois
ans, que pour Mercurialles & receptions ; Qu’il n’assisteroit à l’Assemblée
des Chambres que ceux qui auroient vingt ans de seruice,
& que l’Assemblée ne seroit faite que par la resolution de la grande
Chambre. Les Deputez ont commis pour dresser nos propositions
Messieurs les Presidens le Coigneux, Viole, de Longueüil Conseiller,
Paris Maistre des Comptes, Bragelonne Conseiller en la Cour
des Aydes, & Fournier Escheuin.
Le Samedy, à dix heures du matin, Monsieur le premier President
n’a point esté à la Conference à cause de sa maladie ; cela fut
cause que nous allasmes au Chasteau, & entrasmes en la Chambre
de nostre Assemblée, par vn escalier qui est à l’entrée de la porte,
sans estre veus que de peu de personnes, & montasmes droit en nostre
Chambre. Les Deputez ayant pris place, Monsieur le President
de Mesmes dit que Monsieur le premier President luy auoit enuoyé
vne lettre qui venoit de la part de Monsieur le President de Bellieure,
& auoit esté apportée Vendredy au soir par le sieur de la Roussiere,
premier Gentilhomme de la Chambre de Monsieur le Prince
de Conty, & ayant monstré la lettre elle fut par luy leuë ; & elle
estoit en ces termes.
MONSIEVR,
Il est midy, il n’y a point de bled arriué à Paris par la riuiere, &
nous n’auons receu du sieur Laisné non plus que du sieur Lescot Escheuins,
que des procez verbaux, qui nous apprennent qu’il n’y a point de magazins
à Corbeil, Melun, ny Montereau, tels que l’on s’estoit imaginé, &
que difficilement on pourra tirer par cette riuiere les trois ou quatre cens
muids de bled que nous deurions desia auoir receus ; & comme cét Article
est non seulement le premier, mais le fondement de la Conference, sans
l’establissement duquel, & l’execution de bonne foy, l’on ne peut entrer
en la discution d’aucune chose. La Cour m’a chargé de vous escrire le mauuais
estat auquel est cette affaire, afin qu’en estant aduerty, & par vous,
Monsieur, Messieurs les autres Deputez, il y soit pourueu. Nous esperions
ce matin receuoir des ordres generaux pour laisser arriuer en cette Ville,
non seulement les bleds, mais aussi les autres grains, chairs, bois, fourages,
& autres choses necessaires pour subsister pendant le cours de la Conference,
sans qu’il fut besoin d’en receuoir en particulier chaque iour, &
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que les ordres portassent celuy de laisser arriuer pour les trois iours passez,
non seulement les trois cens muids de bled, mais toute la quantité que
vous aurez arbitré se deuoir consommer chaque iour, ensemble des autres
denrées dont nous attendons la liberté des passages, tant par l’vne que par
l’autre des riuieres, & par la terre, s’il se pouuoit pour la facilité de les
faire assembler. Nous esperons que vous nous ferez auoir vn passeport general
pour ceux que nous chargerons de ce soin, mesme pour vn de Messieurs
les Conseillers, si la Cour iugeoit necessaire de luy commettre. Il
vous plaira de pouruoir à la liberté du commerce d’icy à Ruel pendant la
Conference, & de me croire,
MONSIEVR,
A Paris ce 5. Mars 1649.
Vostre tres-humble & tres-obeyssant
seruiteur.
DE BELLIEVRE.
Aussi tost la Compagnie, sans déliberer, demeura d’accord que
les Deputez du iour precedent yroient parler aux autres Deputez,
pour se plaindre de l’inexecution des promesses du bled, & fut dit par
eux que l’ordre auoit esté donné, & que l’on le pouuoit executer, &
qu’ils estoient prests d’abondant de donner nouueaux ordres &
nouueaux passeports, ce qui a esté donné en charge aux Escheuins
pour y tenir la main. Ce fait on a leu les propositions qui auoient esté
dressées par Messieurs lesdits Deputez, cy-dessus nommez, qui
estoient en ces termes.
Leurs Majestez sont tres humblement suppliées d’accorder dés
à present l’ouuerture des passages pour toutes sortes de viures &
denrées, comme aussi la liberté du commerce, l’vn & l’autre estant
absolument necessaire pour la conseruation de la capitale ville du
Royaume.
Leurs Majestez sont aussi tres-humblement suppliées, pour paruenir
à la Paix generalle, de vouloir deputer personnages de probité
& suffisance, entre lesquelles il leur plaira choisir aucuns Officiers
de son Parlement.
Comme aussi le retour du Roy dans Paris, est ce qui peut calmer
le plus les esprits, & restablir la tranquillité publique : Leurs Majestez
sont tres-humblement suppliées d’honnorer Paris de leurs presences
aussi-tost que la Conference sera terminée.
Et ayant esté déliberé si elles estoient trouuées bonnes, il a passé
tout d’vne voix qu’ouy, & aussi tost ont esté portées aux Deputez de
l’autre costé, & puis on a fait lecture des propositions données de la
part de son A. R. qui estoient en ces termes.
Le Roy ayant transferé la seance du Parlement de Paris à Montargis,
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pour les raisons qu’il a cy-deuant assez declarées, & depuis
trouué bon que lesdits Officiers se rendissent dans trois iours à S.
Germain pres sa personne, pour y tenir son lict & son Parlement ; sa
Majesté veut que ladite translation soit executée, & pour cét effet
donner toutes sortes d’asseurances pour les personnes, charges &
biens desdits Officiers, lesquels demeureront & feront la fonction
de leurs charges prés la personne de sa Majesté, iusques à ce que par
icelle en ait esté autrement ordonné.
Qu’il ne sera fait aucunes assemblées des Chambres dudit Parlement
pendant trois années sans la permission expresse de sa Majesté,
si ce n’est pour les Mercurialles & receptions des Officiers de la
Compagnie, sans qu’esdites Assemblées il puisse estre traité d’autres
affaires : Et lesdites trois années passées, nul desdits Officiers du Parlement
ne pourra se trouuer esdites Assemblées qu’apres vingt années
de seruice, & que les Chambres ne pourront estre assemblées
pour quelque cause que ce soit, qu’elle n’ait esté iugée legitime & necessaire
par la grand’Chambre, à laquelle seule appartient d’en iuger.
Sur lesquelles ayant déliberé, il a passé tout d’vne voix que l’on
n’y pouuoit entendre, & cette responce a esté ainsi portée aux Deputez
de son A. R. Auant que de se retirer il a esté dit que le sieur de
la Roussiere, aussi-tost son artiuée auoit eu des Gardes, qu’il n’auoit
peu déposer la creance qu’il auoit vers le Parlement, & qu’il l’auoit
fait loger chez Monsieur le Tellier, il a esté trouué à propos de demander
qu’il eust liberté de venir exposer sa creance, de faire plainte
de ce qu’il auoit esté arresté. Ledit sieur le Tellier a dit que ledit
sieur de la Roussiere estant homme de condition, pouuoit estre venu
pour negocier autre chose que le faict de simples lettres, & que
c’estoit la façon d’en vser ainsi aux personnes de condition ; que
neantmoins si l’on desiroit l’entẽdre, que l’on le feroit venir. Et cela
ayant esté resolu, ledit sieur de Saintot l’est allé querir, & eslãt entré
& baillé seance derriere Monsieur le President le Coigneux, il a dit
qu’il n’auoit autre chose à dire à la Compagnie, que ce qu’il auoit
dit à Monsieur le premier President, que c’estoit pour le faict des
bleds : ce fait on s’est retiré. L’apresdisnée la Compagnie s’est
derechef transportée au Chasteau en la mesme chambre, où
estans assis pour attendre la response de S. A. R. Sadite Altesse
Royale, Monsieur le Prince, & Monsieur le Tellier sont entrez à
l’impourveu dans la chambre, & S. A. s’aprochant au milieu de
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la table estant debout couuert, & les autres demeurez debout &
testenuë, A dit qu’il auoit rendu response sur nos demandes, &
qu’il auoit accordé ce qui luy auoit esté demandé, & que nous ne
luy auions point fait de response sur les siennes, & que c’estoit
des longueurs affectées ; & qu’il nous venoit dire pour derniere
resolution, Que le Roy se departoit de la translation du Parlement
à S. Germain, & se contentoit que le Parlement y allãt en
corps, pour y estre tenu par le Roy son lict de Iustice, & auctoriser
la Declaration qui seroit faite, en cas que nous voulussions
conclure la paix, laquelle Declaration seroit concertée auec
nous, & ne contiendroit que ce dont nous tomberions d’accord :
Que le Roy promettoit les trois ans de defenses d’assemblées
à deux ans, & les vingt années de seruice d’assister
aux assemblées des Chambres à dix années, & qu’il y auoit
vn Reiglement pour la Tournelle de deux ans de seruice qui
pouuoit donner exemple à celuy-là : Que nous eussions à luy
en rendre response dans le lendemain huict heures, autrement
qu’il s’en iroit à S. Germain, & que nos passe-ports seroient
prests pour retourner à Paris ; qu’il protestoit que nous serions
responsables de tous les mal-heurs qui arriueroient à la France,
si nous ne satisfaisions à ce qu’il desiroit de nous. Monsieur le
Prince a fait la mesme protestation contre nous. Monsieur le P.
de Mesmes a respondu fort genereusement, & en substance a dit,
Que la Compagnie auoit sujet de remercier Sadite Altesse de la
bonté qu’elle auoit tesmoignée, la supplioient de la continuer,
& de ne pas croire qu’elle eust apporté des longueurs qui ne procedoient
point de la part des Deputez, mais plustost de l’inexecution
des promesses que l’on leur auoit données, n’y ayant eû
aucuns viures amenez à Paris jusques à ce iour. Monsieur le Duc
d’Orleans & Monsieur le Prince ont interrompu, & ont dit,
qu’ils n’estoient point Marchands de bleds, & que c’estoit assez
d’auoir expedié des passe-ports pour cét effect. Monsieur le P.
de Mesmes a reparty, que pour la premiere proposition touchant
la translation du Parlement, il n’y en auoit point d’exemple ; que
s’il n’estoit question que de submissions, le Parlement n’auoit
jamais manqué d’en rendre, & qu’il seroit tousjours prest de les
faire comme de bons & fidels Sujets & Officiers. Pour la surseãce
des assemblées, que cette proposition sembloit contraire à l’establissement
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du Parlement, que qui disoit Parlement, disoit Conference
& Assemblée : que lors de la Ligue, Messieurs des Enquestes
auoient beaucoup contribué à l’affermissement de la loy
Salique par l’Arrest qu’ils auoient donné, qui auoit asseuré la
Couronne du defunct Roy Henry le Grand son pere, qui en auoit
tesmoigné depuis toutes sortes de gratitude à la Compagnie.
Ce discours continüant plus auant, Monsieur le Duc d’Orleans
a derechef interrompu, & a dit que la Compagnie auoit entendu
ce qu’il auoit dit, & l’a encore repeté, & Monsieur le Prince
a dit que ce qui auoit esté fait en ce temps-là, auoit esté fait courageusement,
& que l’on en auoit sceu gré à ceux qui l’auoient
fait, mais que le temps estoit changé, & que les affaires du Roy
requeroient que ce que Monsieur le Duc d’Orleans desiroit fust
executé ; Et sur celà se sont retirez. La Compagnie n’ayant pas
bien pris les termes de la proposition faite par S. A. R. & trouuant
quelque difficulté à l’intelligence des propositions, a envoyé
par deux fois les Deputez pour prendre les propositions par
escrit : mais cela leur ayant esté refusé, ils les ont rapporté intelligiblement
aux termes cy-dessus ; ce fait, on a leu les apostils
qui auoient esté mis sur nos propositions, dont la teneur ensuit.
I. ARTICLE.
SA Majesté l’accorde tres-volontiers, pour estre executé dés
le moment que le Parlement aura rendu au Roy l’obeïssance
qu’il luy doit, & n’oubliera rien pour faire le commerce, & toutes
sortes d’abondances soient restablies dans la Capitale du Royaume
au plus haut poinct qu’elle aye jamais esté.
II.
Sa Majesté l’accorde aussi tres-volontiers, & ne sera rien en
cela qu’elle n’aye pratiqué par le passé, ayant employe à la negociation
de la paix de Munster Messieurs Davaux & Seruien, qui
sont personnes de suffisance esprouuée : Que si les Espagnols se
disposent à vouloir traitter de la paix à Munster ou sur la frontiere,
à quoy la fin des desordres presens contribueroit beaucoup
qui dépend de l’obeïssance du Parlement, Sa Majesté y enuoyera
au plustost ses Deputez, & fera l’honneur à la Compagnie de
choisir quelqu’vn dans son Corps.
III.
Sa Majesté l’accorde encore tres-volontiers, & a plus d’impatience
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que qui que ce soit de retourner à Paris, ce qu’elle fera
dés que les choses seront en l’estat qu’elles doiuent estre, ayant
non seulement entiere disposition à pardonner la faute des Habitans
de ladite Ville, mais mesme à leur confirmer leurs priuileges,
& les faire jouïr comme les autres Peuples du Royaume,
de toutes les graces qu’elle leur a departies, & nommément de
celles qui sont portées par la Declaration du mois d’Octobre
dernier.
Aussi-tost la Compagnie a proposé ce qu’il y auoit à faire sur
les propositions de S. A. R. & d’vn commun vœu a iugé qu’il
falloit en remettre la declaration au lendemain, en presence de
Monsieur le premier President, & les Deputez ont esté enuoyez
à Monsieur le Duc d’Orleans pour le prier de le trouuer bon ; lequel
a fait response, que nous auions désja deliberé sans Mõsieur
le premier President, & que nous le pouuions faire encore, attendu
que l’affaire pressoit : aussi-tost la Compagnie s’est transportée
chez mondit Sieur le p. P. qui venoit d’estre saigné. Monsieur
le President de Mesmes a eu ordre de l’aller trouuer, pour luy
demander s’il auoit agreable que la deliberation d’vne affaire si
importante se fist en sa presence, & a rapporté à la Compagnie,
que si l’on vouloit remettre la deliberation au lendemain sept
heures, Mondit Sieur le p. P. y assisteroit. Sur cela, question s’est
meüe si l’on la delibereroit à l’heure presente, ou si on la remetteroit
au lendemain à sept heures précises, pour en rendre response
à S. A. R. sur les neuf heures, & les Deputez priez d’aller
chez Monsieur le Tellier, pour en informer sadite A. R. & le supplier
de le trouuer bon, ce qu’elle a tesmoigné auoir agreable. Ie
ne vous auois pas mandé la forme de la Conference, qui est telle,
que le sieur Saintot est hors de la Chambre où nous nous assemblons,
dans vn passage, lequel attend les Deputez, lesquels
estans entrez dans ledit passage, ledit sieur Saintot va aduertir
Monsieur le Chancelier & Monsieur le Tellier qui sont dans la
Chambre de S. A. R. lesquels viennent dans la Chambre de la
Conference des Deputez, s’assoient du costé du feu à vne table,
& nos Deputez de l’autre costé, & là ils font les propositions de
part & d’autre.
Le Dimanche 7. Mars 1649. du matin, Messieurs les Deputez
estans assemblez chez Monsieur le premier President, Monsieur
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le President de Mesmes a fait lecture d’vne Lettre enuoiée ausdits
Deputez par Messieurs Barenne, & Andrée,
Conseillers deputez du Parlement d’Aix au Parlement de Paris,
auec les articles contenant leurs pretentions, dont la teneur
ensuit.
MESSIEVRS,
Ayant receu l’auis de l’arresté de vostre Compagnie du dernier du passé
pour la Conference de Ruel, Nous ayant fait l’honneur d’y comprendre les
interests de la nostre, suiuant ce qui nous a esté prescripe, Nous vous adressons
les articles & les pretentions de nostre Corps, conformes aux instructions
& pouuoirs à nous enuoyez, necessaire pour restablir le repos auec
le service au Roy en nostre Prouince : Et comme il vous a plû agréer l’vnion
de vostre Corps auec le nostre, Nous esperons, Messieurs, de vostre zele
& bonnes volontez que vous prendrez le soin de nous procurer de la bonté
du Roy & de la Reyne Regente le contenu ausdits articles, & le passe-port
pour aller en faire instance à l’égal des autres Compagnies. Et d’autant
qu’on pourroit aduancer que nostre Compagnie a voulu traitter, Nous vous
assurons, Messieurs, auoir aduis certain qu’elle a surcis à toutes propositions,
iusqu’à ce qu’elle eust receu de nos Lettres, & apris si nous auions obtenu
l’Arrest d’vnion, tous nos pacquets & les vostres ayant esté arrestez, Elle
est maintenant informée, & vous assurez qu’elle ne se separera iamais du
dessein de suiure vos ordres & vostre exemple, ils nous sont trop auantageux,
pour faire paroistre nostre passion & fidelité au seruice du Roy :
La nostre, Messieurs, en particulier, c’est de vous supplier d’agréer nos
obeïssances, & de croire que nostre gloire plus parfaite, c’est d’estre,
MESSIEVRS,
A Paris ce 6.
Mars 1649.
Vostres-humbles & tres-obeyssans
Seruiteurs,
BARENNE, ANDRÉE, Deputez
du Parlement de Prouence.
Apres la lecture de ladite Lettre, Monsieur le President de
Mesmes a fait recit de ce qui s’estoit passé le iourd’hier en l’assemblée,
en laquelle Monsieur le premier President n’auoit
point assisté à cause de son indisposition, & a esté deliberé en suite
sur les propositions faites par Monsieur le Duc d’Orleans, &
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arresté à l’égard du premier article, que le siege de Paris estant
leué, Messieurs du Parlement se transporteront en Corps à Saint
Germain pour remercier le Roy & la Reyne Regente en France,
de la paix qu’il aura plû à leurs Majestez donner à la Ville de
Paris, & pourra faire tenir son lict de Iustice pour y publier la
Declaration, qui sera concertée auec lesdits Deputez pour le
restablissement de la tranquilité du Royaume, sans y faire aucune
autre fonction, & qu’in continant apres mesdits Sieurs du Parlement
s’en retourneront à Paris continüer les fonctions ordinaires
de leurs charges. A l’égard du 2. article, que les Ordonnances
& Declarations verifiées au Parlement, concernant le faict de la
Iustice, Police & Finance, particulierement celles des mois de
May, Iuillet & Octobre dernier, seront executées, & que n’y
estant innoué, le Parlement ne s’assemblera que pour la reception
des Officiers, & tenir les Mercurialles pendant le reste de
la presente année 1649. Pour le troisiéme article, que le Roy &
la Reyne Regente seront tres-humblement suppliez de n’y point
insister.
Ledit iour Dimanche 7. Mars 1649. de releuée, Messieurs les
Deputez estans assemblez chez Monsieur le premier President,
le sieur de Saintot Me des Ceremonies, a frappé à la porte de la
chambre, & demandé à parler à aucuns desdits Deputez, a esté fait
entrer, & a esté chargé de la part de l’Assemblée, d’aller chez
Mr le Tellier Secretaire d’Estat, faire plainte de ce qu’on auoit
retenu le Courier de ladite assemblée à S. Clou depuis 7. heures
du soir iusqu’à sept heures du matin ; Et a ledit sieur Saintot presenté
vn pacquet cachetté, & ledit pacquet ouuert, s’est trouué
des Articles dont a esté fait lecture, lesquelles ont esté mises entre
les mains des Deputez cy-deuant nommez, pour dresser les
articles de l’assemblée, afin d’en dresser d’autres qui seruiroient
de responses. A esté en suitte deliberé sur la lettre escrite par
Monsieur le President de Bellievre, & sur la response faite à la
premiere proposition de Messieurs les Deputez, & arresté que
l’on insisteroit à ce qu’on laissât quelques passages libres pendant
la negociation de la paix, suiuant la parole donnée, pour
faire entrer dans la Ville de Paris, non seulement plus grande
quantité de bleds, mais foin, auoine, chairs, salines, & autres
choses necessaires pour la subsistance des Habitans d’icelle, &
-- 15 --
ont esté deputez Messieurs de Nesmond & Mesnardeau Conseillers,
& Monsieur le Tellier, & leur faire entendre le susdit arresté.
Le Lundy 8. Mars 1649. du matin, les Deputez estans assemblez
chez Monsieur le premier President, Monsieur le President
de Nesmond a rapporté que suiuant l’arresté du iour d’hier, il a
esté auec Monsieur Mesnardeau trouuer Monsieur le Chancelier,
pour le prier suiuant la parole donnée on laissast quelques passages
libres de la Ville de Paris, pour y faire entrer toutes sortes
de viures & denrées necessaires pour la subsistance des Habitans
d’icelle, & que Monsieur le Chancelier luy auoit promis de le
faire entendre à Monsieur le Duc d’Orleans ce iourd’huy : peu
de temps apres les Sieurs Fournier & Helyot Escheuins, deputez
pour la Conference, ont fait voir vne lettre qui leur auoit esté
enuoyée de Paris, dont a esté fait lecture, portant en substance,
Que ce qui auoit causé le manque de bled à Paris, estoit la disette
de batteaux qu’il estoit necessaire de faire remonter de Paris à
Corbeil, pour raison dequoy il falloit obtenir les passe-ports ; Et
ont esté lesdits Escheuins chargez de la Compagnie, d’aller
chez Monsieur le Tellier pour en obtenir, & vn ordre general
pour faciliter les conuois de bleds accordez pendant le temps de
ladite Conference, ce qu’ils ont fait, & ont enuoyé lesdits passeports
& ordre general à Paris. Ont esté en suitte leuz les articles
aportées le iour d’hier par le sieur de Saintot, desquels la teneur
ensuit.
PREMIEREMENT.
QVE les Officiers de la Cour de Parlement & des autres Compagnies,
mesme les Maistres des Requestes, qui seront nommez
par sa Majesté iusqu’au nombre de vingt-cinq, se retireront en
tel lieu qu’il plaira à sa Majesté leur prescrire, sans qu’ils puissent
r’entrer en la Ville de Paris ny autres lieux, que ceux qui leur
seront ordonnez, ny faire aucune fonction de leurs charges,
iusques à ce qu’il en soit autrement ordonné par sa Majesté.
2. QVE tous les Arrests qui ont esté rendus par ladite Cour depuis
le cinquiéme Ianvier dernier, tant pour affaires generales
que particulieres, ensemble celuy du Iuiller 1648. concernant
les impositions verifiées en la Chambre des Comptes &
Cour des Aydes, seront cassez & reuoquez, & les minutes &
-- 16 --
grosses tirées des Registres de ladite Cour, pour estre remis é
mains de sa Majesté.
3. QVE les gens de guerre qui ont esté leuez tant dans la Ville
de Paris qu’au dehors, & qui sont encore sur pied, seront cassez
& licentiez, en vertu des pouuoirs donnez tant par ledit Parlement
que par la Ville de Paris.
4. LE Preuost des Marchands & Escheuins, assistez de bon
nombre de notables Bourgeois, demanderont pardon au Roy
pour les Habitans de la Ville de Paris, lesquels poseront presentement
les armes, sans qu’ils les puissent reprendre qu’auec l’orpre
& commandement exprés de sa Majesté, à laquelle iureront
de nouueau de demeurer dans son obeïssance, & de ne se departir
jamais de la fidelité qu’ils luy doiuent, à peine d’estre traittez
comme rebelles.
5. LA Cour de Parlement renoncera à toutes ligues, associations
& traittez qu’elle pourroit auoir faits contre le seruice du
Roy, tant dedans le Royaume qu’auec les ennemis de cette Couronne,
& sera la lettre de creance, ensemble la creance de l’enuoyé
de la part de l’Archiduc Leopold, tirée des Registres de ladite
Cour de Parlement, & mises és mains de sa Majesté.
6. TOVS les deniers, meubles, vaisselle d’argent, & papiers pris
& enleuez aux particuliers, ou qui auront esté vendus, leur seront
rendus & restituez, s’ils font en nature, sinon la juste valeur
d’iceux, dont lesdits particuliers seront creuz par serment, tant
pour la qualité que quantité. Et quand aux deniers des Tailles,
Fermes & Gabelles, Aydes, Cinq. grosses Fermes, Conuoy de
Bordeaux qui ont esté pris & enleuez, ils seront rendus à sa Majesté,
& ne pourront lesdits Fermiers des Gabelles, Aydes,
Cinq grosses Fermes & Payeurs des Rentes, des Tailles, estre
poursuiuis ny contraints pour le payement des Rentes estant sur
lesdites Fermes & Tailles, pendant le temps dont il sera convenu.
7. LA Bastille, ensemble l’Arsenal auec tous les Canons, boulets,
grenades, poudres & autres munitions de guerre, seront
remis entre les mains de sa Majesté.
8. Que les modifications apportées tant par la Chambre des
Comptes, Cour des Aydes, sur la Declaration du mois d’Octobre,
& que l’article huictiéme concernant les Comptans soit
-- 17 --
executé, & y adioustant & aucunement interpretant iceluy, les
interests & remises seront passez aux comptes du Tresorier de
l’Espargne en vertu des Arrests du Conseil, qui les auront reiglez
& accordez, & des quittances des parties prenantes, sans aucune
difficulté.
Apres la lecture desdits articles, a esté deliberé en quelle forme
il y seroit respondu, & a passé que ce seroit par article : ont
esté derechef les articles leuz, & arresté que sur le premier on respondroit
que la Compagnie ne peut consentir l’article, comme
contraire aux Declarations du Roy, Ordonnances du Royaume,
& paroles données, & souuent reïterées.
Sur le deuxiéme,Qu’on ne peut toucher à l’Arrest du mois de
Iuillet, comme precedant la Declaration du mois d’Octobre
dernier, non plus qu’à ceux qui ont esté donnez iusqu’au sixiéme
Ianuier, n’estant point le sujet de la Conference. A l’esgard des
Arrests donnez depuis ledit iour sixiéme Ianuier, Qu’apres qu’il
aura pleû au Roy & à la Reyne Regente declarer leurs intentions
touchant les Declarations & Lettres de cachet, & autres actes
donnez depuis ledit iour, il sera fait response à l’article.
Sur le troisiéme, Que l’accommodement fait & notoire & le siege
leué, l’article sera accordé, si mieux n’ayme le Roy employer
les Troupes pour son seruice.
Sur le quatriéme, Que l’article sera conceuë en ces termes : Le
Preuost des Marchands & Escheuins accompagnez de bon nombre
de notables Bourgeois, rendront au Roy leur obeïssance &
leurs submissions, auec protestation d’vne fidelité inuiolable :
poseront les Habitans de Paris les armes, l’accommodement fait
& le siege leué, ne les ayant prises que pour la necessité de leurs
deffenses.
Sur le cinquiéme,Que cette article contient deux choses : le
premier qui est inutil, le Parlement n’ayant fait aucuns traittez,
ligues ny associations dedans ny dehors le Royaume : Au second,
le Roy & la Reyne seront tres-humblement suppliés, que l’arresté
demeure dans les registres en l’estat qu’il est, estant tres-respectueux,
& la proposition ayãt esté portée toute entiere à leurs
Majestez sans en deliberer, pour y receuoir sur iceluy leurs volõtez :
mais leursdites Majestez sont tres-humblement suppliées de
trouuer bon qu’il soit respondu audit enuoyé par le Parlement ;
-- 18 --
Que la proposition ayant esté presentée à leurs Majestez, elles
ont donné ordre au Parlement de luy faire entendre que si le Roy
d’Espagne veut enuoyer des Deputez en lieu qu’il sera conuenu
pour traitter de la paix, Leurs Majestez y en enuoyeront de leur
part, dans le nombre desquels elles choisiront aucuns des
Officiers du Parlement.
Sur le sixiéme,Que les papiers & les meubles estans en nature
& non vendus seront rendus, & pour le surplus de l’article ne
peut estre accordé, au contraire, qu’aucuns en general ny en particulier
ne pouront estre recherchez pour raison des choses contenus
en l’article, sauf à sa Majesté faire telle grace qu’il luy plaira,
à ceux qui se trouueront interessez aux choses contenuës en
iceluy.
Sur le septiéme,Que l’accommodement fait & le siege leué, il
sera executé.
Sur le huictiéme,l’Article ne tombe point en la deliberation de
la Conference, & n’y peut estre pourueu que par les voyes de
droict en la forme ordinaire.
Sur le neufiéme article,Qu’il ne peut estre accordé aux termes
qu’il est couché, & sera sa Majesté suppliée de laisser le jugement
des interests couché en ligne de compte à la Chambre des Comptes,
à laquelle la connoissance en appartient.
A la lecture du deuxiémé article, Monsieur le President Amelot,
Premier President de la Cour des Aydes, A dit que dans le
dessein qu’auoit sa Compagnie de demeurer dans l’vnien auec le
Parlement, il prioit Messieurs du Parlement de leur laisser la
cognoissance de ce qui estoit de leur Iurisdiction, & qu’ils trouvassent
bon que s’il suruenoit quelque contestation pour raison
de ladite Iurisdiction, le Procureur General de ladite Cour des
Aydes conferast auec celuy du Parlement ; & s’ils ne s’accordoient,
que les Presidens & Conseillers de la Cour des Aydes
confereroiẽt auec ledit Parlement. Monsieur le premier President
a respondu, que le dessein du Parlement n’auoit jamais esté d’entreprendre
sur la Iurisdiction de la Cour des Aydes, & que l’ordre
accoustumé, en cas de contestation entre les Compagnies, deuoit
estre gardé, qui estoit, que le Procureur General de la Cour
des Aydes descendoit au Parquet du Parlement : & en cas que le
different ne fust terminé, vn President & deux Conseillers de
-- 19 --
ladite Cour venoient au Parlement en conferer.
Le Lundy 8. Mars 1649. de releuée, Messieurs les Deputez
assemblez chez Monsieur le premier President, Messieurs les
President le Coigneux, & Viole President aux Enquestes, deputez
pour porter la response aux troisiéme premieres propositions
faites par Monsieur le Duc d’Orleans, ont rapporté
qu’ayant esté trouuer le jourd’hier ledit sieur Duc d’Orleans, il
leur auoit tesmoigné n’estre pas satisfait de la response faite sur
l’vne des propositions touchant la cessation de l’assemblée des
Chambres, ne voulant pas que dans le dispositif de la Declaration
qui deuoit estre concertée & publiée au lict de Iustice que
le Roy desiroit tenir à S. Germain, où il deuoit estre fait mention
de ladite cessation pendant le reste de la presente année, il fut
fait aucune mention de l’execution des Declarations des mois
de May, Iuillet & Octobre dernier, ains seulement dans le narré :
Que le Roy & la Reyne & ledit Sieur Duc d’Orleans donnoient
bien paroles que lesdites Declarations seroient executées, &
qu’en cas de contrauention, le Roy en estant aduerty il y seroit
remedié ; mais qu’ils ne vouloient point absolûment que la condition
de ne point innouer aux Declarations fut mise ny deuant
ny apres ladite cessation d’assemblée accordée pour le reste de
l’année, qu’eux Deputez auoient proposé diuers expediens
pour ne pas rompre sur vne proposition qui ne touchoit que le
Parlement : Que lesdits expediens par eux proposez estoient que
l’on ne parlast point dans ladite Declaration de ladite cessation,
mais que l’on se contenta d’en faire vn article secret, & de se fier
à la promesse verballe ou par escrit de tous les Deputez du Parlement
pour la Conference ; que lesdites Declarations estantes
entretenües & n’y estant innoué, il ne seroit point fait d’assemblée
pendant le reste de l’année, que pour la reception des Officiers
ou Mercurialles : ont estés lesdits expediens examinés, ensemble
vn autre proposé par l’vn des Deputez du Parlement pour
ladite Cõference, qui estoit de mettre dans le dispositif de ladite
Declaration, qu’il ne seroit fait aucune assemblée de Chambre
pendãt le reste de l’ãnée, si ce n’estoit pour ladite reception d’Officieres
& Mercurialles, & qu’aussi il ne seroit innoué ausdites Declarations.
Mais comme ces expediens, au dire de Messieurs les
Presidens le Coigneux & Viole deputez, n’estoient pas pour satisfaire
-- 20 --
audit Sieur Duc d’Orleans, la Compagnie ayant deliberé
ce qui estoit à faire en ce rencontre ; A arresté que ces mesmes
Deputez retourneroient vers Monsieur le Chancellier & Monsieur
le Tellier, deputez dudit Sieur Duc d’Orleans, & insisteroient
par tous moyens, à ce que l’on se contentât de la response
qu’ils auoient portée, ou que l’on prist vn de ces expediens : ont
esté en suitte leües les articles dressez par les Deputez commis
à cet effect.
Apres la lecture est entré le sieur de Saintot dans l’assemblée,
qui a dit que Monsieur le Duc d’Orleans attendoit response auec
impatience, Monsieur le premier President a dit que l’on luy
porteroit promptement : lesdits Deputez estans partis de l’assemblée
pour executer leur commission, a esté fait lecture d’vne
lettre escrite par le Preuost des Marchans de Paris, aux Escheuins
deputez pour la Conference, & en suitte d’vne autre escrite
par Monsieur le President de Bellievre à Mr le premier President.
Apres la lecture desdites Lettres, a esté prié Monsieur de la
Nauue Conseiller en la Cour, de porter celle de Monsieur le
President de Bellievre à Messieurs les Presidens le Coigneux &
Viole, pour la faire voir à Monsieur le Duc d’Orleans, & la
Compagnie s’est leuée.
Peu de temps apres, Monsieur le premier President a mandé
tous les Deputez, qui se sont rendus chez luy enuiron les dix
heures du soir, & là r’assemblez à la reserue de Monsieur le President
Nicolay, qui estoit indisposé, Monsieur le P. le Coigneux a
raporté qu’il auoit auec Mr Viole esté trouuer Mr le Chancellier
& M. le Tellier, qui auoit insisté & representé tous les expediens
proposez pour accommoder le different qui s’estoit meu pour la
proposition de la cessation des assemblées, & leur auoit dit que
pourveu que dans la Declaration où l’on deuoit faire mention de
ladite cessation, il y eust des termes significatifs des veritables
motifs que l’assemblée auoit eus pour se relâcher à ladite cessation,
qui estoient l’execution desdites Declarations des mois
de May, Iuillet & Octobre dernier, les termes leur estoient indifferens :
Mais que Monsieur le Chancellier leur ayant demãdé
si c’estoit leur derniere resolution, & ayant esté trouuer Monsieur
le Duc d’Orleans, il leur auoit dit que l’intention dudit Sieur
Duc d’Orleans estoit de ne rien changer, & qu’il ne vouloit pas
-- 21 --
que dans le dispositif de ladite Declaration il fut fait mention
de l’execution desdites Declarations, donnant parole qu’elles
seroient executées, mais seulement dans le narré ; & que si les
Deputez ne le vouloient ainsi, il leur feroit expedier leurs passeports
pour demain. Mondit sieur le President le Coigneux a en
outre rapporté qu’il auoit prié Monsieur le Chancellier de faire
voir la lettre de Monsieur le P. de Bellievre à Monsieur le Duc
d’Orleans, & que mondit sieur le Chancellier luy auoit dit l’auoir
portée audit Sieur Duc d’Orleans, & qu’il ne l’a voulu voir :
Sur quoy, attendu qu’il estoit tard, que l’affaire estoit d’importance,
& que Monsieur le President Nicolay estoit indisposé,
a esté remis à en deliberer à demain sept heures du matin, & a
esté rendu la lettre dudit sieur P. de Bellievre à Monsieur le premier
President, qui s’est chargé de luy faire response.
Le Mardy 9. Mars 1649. du matin, Messieurs les Deputez assemblez
chez Monsieur le premier President, & ayant deliberé
sur la response faite par Monsieur le Chancelier le iour-d’hier à
Messieurs les Presidens le Coigneux & Viole ; A esté arresté que
lesdits Sieurs P. le Coigneux & Viole iront vers Monsieur le
Duc d’Orleans luy dire que pour le bien de la paix, le respect que
l’on porte au Roy, à la Reyne, à luy, à Monsieur le Prince, la
Compagnie accorde l’article comme il desiroit, se promettant
qu’elle aura satisfaction sur les articles qu’elle donnera, & sur
les responses faites aux articles proposez de sa part, & qu’il sera
fait registre de la parole donnée, que les Declarations des mois
de May, Iuillet & Octobre dernier seront executées, & que la
Compagnie ne s’est relâchée à accorder la cessation d’assemblée
qu’en consequence de ladite parole, & pour le desir de la paix &
tranquillité du Royaume.
Au[3 lettres ill.] que deliberer, Messieurs les Deputez ont enuoyé querir
le sieur de Saintot Maistre des Ceremonies, & l’ont prié d’aller
dire à Monsieur le Duc d’Orleans qu’ils alloient deliberer, & luy
feroient aussi-tost response : & la deliberation estant commencée,
est retourné peu de temps apres ledit sieur de Saintot, & a dit
qu’il auoit fait à Monsieur le Duc d’Orleans les ciuilitez de la
Compagnie, qu’il l’auoit trouué s’habilant : Qu’en suitte il alloit
à la Messe, & faisoit estat d’aller disner à S. Germain, afin que
s’ils auoient à luy faire response, que ce fust, dans cet entre-tẽps ;
-- 22 --
& ladite deliberation ayant duré plus que l’on n’esperoit, est
reuenu ledit sieur Saintot sur le midy dire qu’il s’en alloit incontinant
partir, & aussi-tost sont partis lesdits Sieurs Presidens le
Coigneux & Viole, pour porter audit Sieur Duc d’Orleans la
resolution de ladite Compagnie.
Le Mardy 9. Mars 1649. de releuée, Messieurs les Deputez assemblez
chez Monsieur le premier President ; Monsieur le President
le Coigneux a rapporté que suiuant l’arresté du matin, il auoit esté
auec Monsieur Viole trouuer Monsieur le Duc d’Orleans au Chasteau
de Ruel, où estoit auec luy Monsieur le Prince ; & luy auoit fait
entendre que la Compagnie accordoit l’Article de la cessation
d’assemblée comme il desiroit, pour le respect qu’elle portoit au
Roy, à la Reyne, à sa Personne, & à Monsieur le Prince, & pour le
desir qu’elle auoit de la Paix, & se ptomettoit qu’il donneroit à ladite
Compagnie satisfaction sur ses demandes. Et sur les responses faites
aux articles proposez de sa part, apres qu’elle auoit consenty vn
article d’importance, & qui donnoit en quelque façon atteinte à la
liberté & l’auctorité du Parlement ; que Monsieur le Duc d’Orleans
luy auoit respondu qu’en matiere de Conference, si l’on ne tomboit
d’accord de tous les articles, les autres accordez ne seroient de rien ;
que Monsieur le Prince auoit dit la mesme chose : Qu’ayant repris
la parole, il leur auoit dit qu’il y auoit des articles contre toute raison
& apparence, que les Compagnies ne les consentiroient iamais :
par exemple le premier, Monsieur le Prince l’interrompit, & dit
qu’il ne disoit pas cela comme Deputé, & que si cela estoit on sçauroit
bien que luy respondre, & continuant, mondit sieur le President
le Coigneux dit qu’il auoit respondu auec liberté, adressant la parole
audit sieur Duc d’Orleans : que quand il seroit encore d’vne condition
plus releuée qu’il n’estoit, il deuoit croire que ce n’estoit pas le
moyen d’auoir les cœurs & les affections des hommes, en [2 lettres ill.] leur
tesmoignant que des effets de haine & de colere, & s’estoiẽt retirez.
A esté leu en suitte vne lettre du Preuost des Marchands, dattée de
ce iour, escrite aux Escheuins Deputez.
Le Mercredy 10. Mars 1649. du matin, Messieurs les Deputez
estant assemblez chez Monsieur le premier President, Monsieur le
President de Nesmond a rapporté que suiuãt l’arresté du iour d’hier,
il auoit esté auec Monsieur Mesnardeau au Chasteau de Ruel, pour
parler à Monsieur le Duc d’Orleans : & ayant apris qu’il se promenoit
-- 23 --
dans le Iardin proche la Cascadde, luy furent trouuer, & luy
dirent qu’il auoit esté accordé que dés le iour que la Conference seroit
arrestée, on laisseroit arriuer dans Paris cent muids de bled par
iour : Neantmoins qu’au lieu de sept cens muids qui deuoient estre
à present portez à Paris, il n’en estoit pas entré cent soixante muids,
n’ont manqué de bled ny de batteaux, mais par les deffences que
l’on faisoit de les laisser passer, au preiudice des paroles données.
Que cela estoit bien esloigné des esperances qu’auoit conçeu la
Compagnie ; que dés les premiers iours de la Conference il y avoit
des passages ouuerts, pour auoir non seulement plus grande quantité
de bled, mais aussi des foings, auoines, chairs, salines, & autres choses
necessaires pour ladite Ville de Paris. Monsieur le Prince les interrompit,
& dit que l’on auoit desia laissé passer plus de deux cens cinquante
muids de bled : Ils repartirent qu’ils auoient asseurance du
contraire, & qu’il estoit estrange que l’on eust enuoyé vne reuocation
sur vne difficulté qui s’estoit meuë à la Conference, puis que
l’on auoit donné parole aux Gens du Roy, qu’en cas que la Conference
fust rompuë, on ne laisseroit pas de déliurer les cent muids
de bled par iour iusques au iour de la rupture. Monsieur le Duc
d’Orleans & Monsieur le Prince dirent hautement qu’il n’estoit pas
vray que l’on eust donné aux Gens du Roy cette parole ; qu’ils n’auoient
point eu d’autres ordres que ceux portez par les lettres escrites
à Monsieur le premier President, qui portoient que l’on fourniroit
le bled selon ce qui se passeroit à la Conference. Lesdits sieurs
Deputez repliquerent que ladite Conference n’auoit esté accordée
dans le Parlement que sur la parole rapportée par lesdits Gens du
Roy ; que l’inexecution de cette parole donnoit sujet à la plainte du
Parlement, & au dessein qu’ils auoient de reuocquer le pouuoir des
Deputez ; que si l’on ne leur tenoit parole ils estoient obligez de ne
passer plus auant : sur cela Monsieur le Prince leur auoit parlé fort
hautement, & s’estoient retirez. Monsieur le President le Coigneux
a pris la parole en suite, & dit qu’il auoit esté ce matin voir Monsieur
le Duc d’Orleans, & auoit esté introduit dans sa chambre, estant deuant
le feu, ne faisant que se leuer, & luy auoit dit qu’il le venoit voir,
non comme Deputé, mais comme son ancien domestique ; que Monsieur
le Duc d’Orleans luy auoit demandé s’il ne vouloit pas finir
affaire, & terminer la Conference ce iour là, & qu’il luy auoit respondu
qu’il estoit impossible ; qu’il n’y auoit guere d’apparence que
-- 24 --
l’on voulust terminer la Conference pour la Paix, puisque l’on n’auoit
pas tenu la parole que l’on auoit promise ; que Monsieur le Duc
d’Orleans luy auoit dit qu’il falloit terminer dés le iour, & au plustard
dés le lendemain, de crainte qu’il ne se fist des actes d’hostilité
de part & d’autre, qui mettroient les affaires hors des termes d’accommodation,
qu’il estoit facile ; qu’il auoit dit plusieurs discours à
Monsieur le Duc d’Orleans, ausquels il auoit pris plaisir, voyant la
liberté auec laquelle il deffendoit les interests du Parlement : &
qu’en fin il luy auoit dit qu’il pourroit peut estre faire souffrir beaucoup
de maux à la Compagnie, mais qu’il ne la forceroit iamais à
consentir vne Paix honteuse & déraisonnable. Apres ce discours
ont esté leuës deux lettres de Monsieur le President de Bellievre,
du 9. Mars, adressante à Monsieur le premier President, & vne de
Monsieur le Prince de Conty, & l’arresté dudit Parlement, du 9.
Mars, l’extraict d’vne lettre escrite par Cotart, Bourgeois de Paris.
Comme on alloit deliberer sur lesdites Lettres & arresté, le sieur
Saintot a frappé à la porte de la chambre de l’Assemblée ; & estant
entré, a dit que Monsieur le Duc d’Orleans prioit la Compagnie de
venir au Chasteau dans la chambre où on auoit commencé la Conference ;
que le lieu seroit commode pour les choses qu’il auoit à leur
dire. Monsieur le premier President a respondu de l’aduis de la
Compagnie, qu’elle alloit monter en carosse pour aller au Chasteau,
& que l’on apprestast les carosses ; & auant que de partir, a esté leu
vne lettre dattée de ce iour, escrite par les Preuost des Marchands
aux Escheuins Deputez.
Apres la lecture de laquelle, a esté arresté que l’on se plaindroit
bien hautement de l’inexecution des promesses du bled,
qu’à faute d’y satisfaire on ne passeroit point plus auant à ladite
Conference, & aussi tost Messieurs les Deputez sont allez au
Chasteau, & estans montez en la chambre de la Conference,
Monsieur le Mareschal de Grammont y estant suruenu, qui a rendu
de grandes ciuilitez à la Compagnie, a témoigné auoir pris soin tant
qu’il auoit pû de conseruer ce qui appartenoit à Messieurs du Parlement ;
qu’il estoit fort desireux que la Paix se fist ; que Monsieur le
Duc d’Orleans & Monsieur le Prince la desiroient pareillement ;
qu’il estoit fort aisé de la conclure, & qu’il y contribuëroit de tout ce
qui estoit en son pouuoir : Messieurs les Deputez luy ont fait plainte
de l’inexecution des promesses du bled, & des reuocations des ordres
-- 25 --
donnez ; luy ont fait voir l’arresté du Parlement, portant surseance
de la Conference, & l’ont prié de faire entendre à Monsieur
le Duc d’Orleans le iuste sujet de leur plainte ; ce qu’il a promis, &
s’est retiré. Peu de temps apres le sieur Saintot est entré dans ladite
chambre où estoit la Compagnie assise, qui a dit que Monsieur le
Chancelier prioit Messieurs les Presidens le Coigneux & Viole de
venir parler à luy dans vne autre chambre, ce qu’ils ont fait, & estans
r’entrez, & incontinent apres ont dit que Monsieur le Chancelier
leur auoit dit que Monsieur le Duc d’Orleans s’impatientoit d’estre
si long-temps sans agir, & desiroit terminer la Conference, qui luy
auoit fait entendre que le manquement de promesse de fournir le
bled leur empeschoit de pouuoir passer outre à ladite Conference.
Sur cela Monsieur le Chancelier auroit demandé l’esclaircissemẽt
de leurs intentions, & qu’ils auoient dit que Messieurs les Deputez
ne pouuoient agir qu’ils n’eussent nouuelles certaines de l’arriuée du
bled à Paris, & aussi-tost lesdits sieurs Presidens le Coigneux &
Viole ont esté mandez par Monsieur le Duc d’Orleans, & estans retournez,
ont dit que Monsieur le Duc d’Orleans auoit dit qu’il vouloit
que la Compagnie fut informée des raisons qui auoient donné
lieu à la reuocation des ordres pour les bleds, qui estoient, qu’ils n’auoient
esté promis que suiuant que la Conference iroit bien : Recours
à ces lettres, & de Monsieur le Prince ; qu’il falloit venir au
fonds, & donner les Articles : que la Compagnie ne deuoit point
apprehender de mauuaises responses, dans le dessein qu’elle auoit de
la Paix : Qu’ils auoient respondu que le bled leur deuoit estre fourny
iusques au iour de la rupture, & que Monsieur le Duc d’Orleans leur
auoit repeté qu’il falloit venir au fonds, que l’on auoit expedié des
passe ports pour faire entrer dans Paris la quantité de bled promise.
Peu de temps apres ont esté apportez par le sieur Saintot deux ordres
du Roy, adressez aux sieurs de Nuailles & d’Amboise commandant
à Lagny & Corbeil, & cinq passeports en blanc, auec vne lettre
de Monsieur le Tellier à Monsieur le Mareschal de Grammont
pour la liberté des Couriers des Deputez, qui ont esté leus & mis entre
les mains des Escheuins Deputez, pour faire les dépesches à Paris.
A esté en suite deliberé ce qui estoit à faire sur les lettres de
Monsieur le President de Bellievre, & sur l’arresté du Parlement, &
tout d’vne voix a passé qu’il seroit surcis à toute. Conference iusqu’à
nouuel ordre du Parlement, & que Messieurs les Presidens le Coigneux
-- 26 --
& Viole iroient vers Monsieur le Chancelier & Monsieur le
Tellier : leur faire entendre & leur dire que Monsieur le premier
President & Monsieur le President de Mesmes, prendroient l’heure
de Monsieur le Duc d’Orleans, pour le voir apres disner, & a esté
prié Monsieur le premier President de faire response aux lettres de
Monsieur le President de Bellievre, & mander ce qui auoit esté
arresté, ce qu’il a promis faire, & se sont retirez tous lesdits Deputez
en leurs maisons.
Le Mercredy 10. Mars 1649 de releuée, Messieurs les Deputez
assemblez chez Monsieur le P. President, Monsieur le President le
Coigneux a dit qu’il estoit allé auec Monsieur Viole, suiuant l’arreste
du matin, trouuer Monsieur le Chancellier & Monsieur le Tellier,
& luy auoit fait entendre le susdit arresté, & fait cognoistre que
Monsieur le premier President & Monsieur le President de Mesmes,
par la visite qu’ils deuoient faire à Monsieur le Duc d’Orleans, auanceroient
peut-estre plus les affaires que l’on n’auoit fait iusques à
present, si l’on desiroit les terminer : mais que lesdits sieurs le Chancellier
& le Tellier, estans entrez dans la chambre de Monsieur le
Duc d’Orleans, pour luy faire entendre ce qui s’estoit passé, estoient
retournez vers eux peu de temps apres auec des visages rudes, &
leur auoient dit que Monsieur le Duc d’Orleans s’estoit offencé de
ce qu’ils s’estoient retirez sans luy donner aduis ; qu’il s’en alloit à S.
Germain, & alloit reuocquer les passeports & ordres dõnez pour le
bled ; qu’il auoit reparty ausdits sieurs Chancellier & le Tellier, que
la Compagnie n’auoit iamais manqué de rendre les respects deub à
Monsieur le Duc d’Orleans & les rendroit tousiours, mais que cét
arreste du matin auoit esté fait pour le respect qui estoit deub au Parlement,
qui auoit prié la Cõpagnie de sursoir à toutes Conferences,
iusques à ce que l’on eust receu à Paris tout le bled promis. A quoy
lesdits sieurs le Chancellier & le Tellier se seroient esleuez, disans
que Monsieur le Duc d’Orleans vouloit sçauoir si les Deputez auoiẽt
plein pouuoir ou non & qu’il sçauoit bien que les Generaux de Paris
faisoient brigues dans le Parlement, pour la reuocation du pouuoir
desdits Deputez, & qu’il alloit reuocquer les ordres données pour la
fourniture entiere du bled promis : qu’il falloit conclure, & qu’il demandoit
des articles, & que si dans vne heure on ne luy donnoit satisfaction,
il s’en alloit à S. Germain. Comme on déliberoit sur cette
response, Monsieur le Mareschal de Gramont a demandé à parler
-- 27 --
à la Compagnie, & estant entre dans la Chambre, a dit qu’il demandoit
pardon, s’il auoit interrompu leur déliberation ; mais que
s’en retournant à S. Cloud, il n’auoit voulu manquer de prendre
congéde ladite Compagnie : Messieurs les Deputez l’ont remercié
de les ciuilitez ; & luy ayant fait entendre la response de Monsieur,
se sont plaints d’vn procedé, qui faisoit voir qu’au lieu de faire vne
Conference auec eux, on leur vouloit dõnet la loy, & que dés qu’ils
resistoiẽt on les menaçoit de leur faire expedier des passeports pour
s’en retourner, ou de reuoquer les ordres dõnez pour les bleds promis :
Ont demandé en suite audit sieur Mareschal, si Monsieur auoit
reuocqué lesdits ordres : & ledit sieur Mareschal ayant respondu
qu’il ne le croyoit pas, est entré ledit sieur de Saintot, qui a dit qu’il
n’y auoit point de reuocation. En suite dequoy ledit sieur Mareschal
a exageré les maux qui suiuroient de la rupture de la Paix tant desirée
de tous les bons François, & proteste sur sa vie & sur son honneur,
que Monsieur le Duc d’Orleans auoit desir de la faire, & que
s’ils auoiẽt donné leurs articles, vne heure apres elle seroit terminée.
Messieurs les Deputez l’ont prié d’y contribuer ce qu’il pourroit, ce
qu’il a promis, & s’est retiré : Et d’vn commun aduis a esté resolu de
charger ledit sieur de Saintot, d’aller dire à Monsieur le Duc d’Orleans,
que l’on alloit trauailler aux articles, & que dans auiourd’huy
on les porteroit. Ont esté en suitte leus quelques articles, qui ont
esté mis au net, & mis entre les mains de Monsieur le premier President
& Monsieur le President de Mesmes, qui les ont portez à Monsieur
le Duc d’Orleans, & dont la teneur ensuit.
I.
Que Monsieur le Prince de Conty, & autres Princes, Ducs, Pairs,
Officiers de la Couronne, Seigneurs, Gentil hommes, Villes &
Communautez, & toutes personnes de quelque qualité qu’elles
soient, qui auront pris les armes, pour la deffence & assistance de la
Ville de Paris, seront conseruez en leurs biens, droicts, offices, benefices,
dignitez, honneurs, priuileges, prerogatiues, charges &
gouuernemens, & en tel & semblable estat qu’ils estoient auant ladite
assistance, sans qu’ils en puissent estre recherchez ny inquietez,
pour quelque cause & maniere que ce soit.
II.
Que rous les Arrests donnez tant au Parlement de Paris, qu’autres
Sentences & Iugemens rendus depuis le sixiéme Ianvier dernier,
seront executez selon leur forme & teneur.
-- 28 --
III.
Que suiuant l’Arrest de 1617. & l’article de l’Edict de Loudun,
la Reyne sera tres humblement suppliée d’enuoyer vne Declaration
au Parlement, portant que nul Estranger ne sera admis dans le
ministere ny dans le maniement des affaires de l’Estat, si ce n’est
pour des considerations importantes au seruice du Roy, ou du merite
particulier, & des seruices qu’il auroit rendus à la Couronne.
IV.
Seront leurs Maiestez tres-humblement suppliées d’ordonner
que toutes Lettres & Declarations pour la suppression des Semestres
des Parlemens de Rouen & d’Aix seront expediez : Comme
aussi pour le restablissement & révnion à la Cour des Aydes de Paris,
des Eslections qui en ont esté depuis deux ans distraites, & attribuées
à la Cour des Aydes de Guydenne.
V.
Les lettres des 6. & 7. Ianvier dernier, escrites aux Preuost des
Marchands & Escheuins de la Ville de Paris, apres la sortie du Roy ;
toutes Declarations & Arrests du Conseil, tant contre le Parlement,
Monsieur le Prince de Conty, Ducs, Pairs, Officiers de la
Couronne, Seigneurs, Gentilshommes, & autres personnes, de
quelque qualité & condition qu’ils soient, seront reuocquez.
VI.
Seront les Declarations des mois de May, Iuillet & Octobre
dernier, inuiolablement gardées & obseruées, & les contrauentions
à l’execution d’icelles reuocquées & reparées : & ne seront
faites aucunes impositions & leuées de deniers, ny créations d’Offices,
pendant la cessation de l’assemblée des Chambres du Parlement,
que par Edicts bien & deuement veriffiez, auec la liberté des
suffrages.
VII.
Leurs Majestez sont tres-humblement suppliées de descharger
l’Eslection de Paris, de toute Taille, Taillon, Subsistance & Estappes,
pendant trois ans : ensemble des restes qui en peuuent estre
deubs des années 1647. & 1648.
VIII.
Que les trouppes & gens de Guerre, incontinant apres l’accommodement
seroient renuoyées sur les Frontieres, à la reserue de
celles qui ont accoustumé d’estre proche & pour la garde de leurs
Majestez.
-- 29 --
IX.
Sera accordé descharge generale pour deniers receus, tant publics
que particuliers, & meubles vendus, comme il sera plus particulierement
exprimé dans les lettres tant à Paris & Roüen, que
ailleurs.
Du Ieudy vnziéme Mars, huict heures du matin, Messieurs les
Deputez estans assemblez au logis de Monsieur le premier President,
il dit à la Compagnie qu’il auoit receu deux lettres, l’vne de
Monsieur le Prince de Conty, & l’autre de Monsieur le President
de Bellievre, qui luy faisoient sçauoir l’estat de la Ville, & le pain
qui estoit arriué & porté aux marchez, lesquelles lettres furent
leuës par Monsieur le President de Nesmond, auec vne autre que
luy escriuoit le sieur de la Moignon Maistre des Requestes, qui l’informoit
du bruit qui estoit arriué le iour precedent au Marché des
Halles, où il y eut vn homme de tué par sa faute, d’vn pistolet qu’il
auoit en sa poche, & à l’instant arriua ledit sieur Saintot de la part
de Monsieur le Duc d’Orleans, qui dit à la Compagnie qu’elle eust
à se trouuer au Chasteau, attendu que son A. R. desiroit terminer
promptement la Conference, & leur donna vn ordre pour faire
monter vn batteau de bled à Paris de quatre vingts muids, qui
estoit à S. Cloud, destiné pour les munitionnaires dudit lieu. A mesme
temps, Monsieur le premier President dit au sieur Fournier Escheuin,
l’vn desdits Deputez, qu’il enuoyast au plus viste ledit ordre
à Paris, ce qu’il promit faire ; & dans cét interuale de temps arriua
encore vn second ordre à mondit sieur le premier President de
la part de Monsieur le Duc d’Orleans, pour l’aller trouuer au Chasteau,
lequel y fut auec Monsieur le President de Mesmes, pour negocier
auec son A. R. l’accommodement de trois Articles, faisant
partie des neuf qui auoient esté presentez par les Deputez, dont la
response des Princes blessoit extrémement le Parlement, la Ville
& Messieurs les Generaux : A l’égard du Parlement, ils desireroient
que vingt-cinq dés Officiers du Corps se retireroient en vn lieu qui
leur seroit nommé par sa Majesté pour y demeurer iusqu’à temps
qu’elle les rappelleroit, Que le Preuost des Marchands & Escheuins
de la Ville de Paris, accompagnez de grand nombre de notables
Bourgeois iroient demander pardon au Roy pour auoit pris les armes
dans les mouuemens derniers arriuez, mesme aussi Messieurs
les Generaux. Monsieur le premier President voyant qu’apres plusieurs
-- 30 --
Conferences prises, & contestations que lesdits trois Articles
luy estoient refutez, il auroit demandé trois ou quatre fois le passepoit
de tous Messieurs les Deputez pour s’en reuonir. Monsieur le
President de Mesmes representa à Monsieur le Duc d’Orleans & à
Monsieur le Prince les mal-heurs que pourroit causer la guerre si la
Paix ne se faisoit : Enfin ils accorderent lesdits trois Articles, & les
modererent, ainsi que Monsieur le premier President les auoit souhaitez
En suite les autres Deputez se trouuerent audit Chasteau en
la salle où ils auoient coustume de s’assembler, où il leur fut fait recit
de l’accommodement desdits Articles, & pendant la Conference
des Deputez desdites Compagnies. Monsieur le Duc d’Orleans
arriua dans ladite salle où ils estoient auec Monsieur le Prince, Monsieur
d’Auaux, & Monsieur le Tellier, tous auec vn visage fort ouuert,
& tesmoignerent à la Compagnie qu’ils desiroient extrémement
la Paix, & Monsieur le Prince leur fit cognoistre dans cette
action qu’il auoit quitté son humeur seuere, dont il auoit fait paroistre
pendant tout le temps de la Conference : & apres diuers entretiens,
ils se seroient retirez, & à l’instant ledit sieur Saintot vint prier
de la part de son A. R. Monsieur le premier President, & Monsieur
le President de Mesmes, de l’aller trouuer dans la chambre ou il
estoit, ce qu’ils firent à mesme temps, & leur bailla les Articles qu’il
auoit reglez. Lesquels ayans esté rapportez par eux à la Compagnie
elle les trouua raisonnable, à l’exception d’aucuns qui furent mis en
deliberation ; sçauoir, vn pour le fait des comptans, vn autre concernant
Messieurs les Generaux.
L’Article des comptans a esté reglée pour l’année presente, & la
suiuante seulement, à raison du denier douze, dont les interests seroient
employez en ligne de compte : & pour celuy de Messieurs les
Generaux, il a esté atresté que dans quatre iours ils le ratifieroient,
& Monsieur de Longueuille dans dix iours : & d’autant qu’il estoit
vne heure, la Compagnie s’est retirée, & a continué l’assemblée
apres disné.
Du Ieudy vnziéme Mars de releuée, tous Messieurs les Deputez
s’estans trouuez au Chasteau suiuant leur remise, où estans assemblez
en leur chambre ordinaire, le sieur Saintot vint prier Monsieur
le premier President, & Monsieur le President de Mesmes d’aller
trouuer son A. R. ce qu’ils firent, & porterent les Articles sur lesquels
il y auoit eu quelque difficulté le matin pour les faire entendre
à sadite A. R. mesme ceux qui regardoient le Parlement de
-- 31 --
Roüen & d’Aix ; & à l’égard de celuy d’Aix, leur auroit esté baillé
pieces iustificatiues par sadite A. R. comme ils estoient d’accord
auec sa Majesté, lesquels ils ont apporté, & monstré aux Deputez
desdites Compagnies, qui ont apres plusieurs contestations de part
& d’autre, arresté & mis au net les Articles cy-apres, lesquels ont
esté leurs par Mr le President de Nesmond, & en suite signez par Mr le
Duc d’Orleans, Mr le Prince, Mr le Cardinal Mazarin, Monsieur le
Chancelier, Monsieur le Mareschal de la Milleraye, Monsieur d’Auaux,
Monsieur le Comte de Brienne, Monsieur l’Abbé de la Riuiere,
& Monsieur le Tellier, tous Deputez de la part du Roy & de
la Reyne Regente sa Mere. Et sur la contestation de Monsieur
Amelot, premier President de la Cour des Aydes, de signer ainsi
qu’il auoit eu seance pendãt toutes les assemblées, & qui neluy auoit
esté contestée par Monsieur Briçonnet, ny aucun de Messieurs les
Conseillers du Parlement, non plus qu’à Monsieur le President Nicolay,
qui auoient esté tous deux traitez comme Messieurs les Presidens
du Parlement par Monsieur le premier President : a esté
resolu que chacune des Compagnies signeroit par corps, ainsi que
vous verrez par les Articles de ladite Paix, dont la teneur ensuit.
LE Roy voulant faire connoistre à sa Cour de Parlement &
aux Habitans de sa bonne ville de Paris, combien sa Maiesté
a agreable les submissions respectiues qui luy ont esté rendus de
leur part, auec asseurance de leur fidelité & obeyssance. Apres
auoir consideré les propositions qui luy ont esté faites, a volontiers
par l’aduis de la Reyne Regente sa mere, accordé les Articles qui
ensuiuent.
Le traitté de l’accommodement estant signé, tous actes d’hostilité
cesseront, & tous passages tant par eaux que par terre seront libres,
& le commerce estably. Le Parlement se rendra suiuant l’ordre
qui luy sera donné par sa Maiesté à S. Germain en Laye, où sera
tenu vn lict de Iustice par sa Maiesté, auquel la Declaration contenant
les articles accordées sera publiée seulement. Apres quoy le
Parlement retournera à Paris faire ces fonctions ordinaire.
Ne sera fait assemblées de Chambre pendant l’année 1649. pour
quelque cause, pretexte & occasion que ce soit, si ce n’est pour la
reception des Officiers & pour les Mercurialles, & ausdites assemblées
ne sera traitté que de la reception desdits Officiers & des Mercurialles.
-- 32 --
Dans le narré de la declaration qui sera publiée, il sera nommé
que la volonté de sa Maiesté, est que les Declarations des mois de
May, Iuillet, & Octobre 1648. veriffiées au Parlement seront executées,
hors ce qui concerne les prests, ainsi qu’il sera expliqué cy-apres.
Que tous Arrests qui ont esté rendus par le Parlement de Paris
depuis le 6. Ianuier iusqu’a present, demeureront nuls cõme non aduenus,
excepté ceux qui ont esté rẽdus, tant auec le Procureur General
qu’autres des particuliers, principallemẽt tant en matiere ciuille
& criminelle, adiudications par decret & receptions d’Officiers.
Les lettres de Cachet de sa Maiesté qui ont esté expediées sur les
mouuemens derniers arriués en la ville de Paris, comme aussi les
declarations qui ont esté publiées en son Conseil, Arrest du Conseil
sur le mesme suiet depuis le 6. Ianuier dernier, demeureront nuls
& comme non aduenus.
Que les gens de guerre qui ont estez leuez, tant en la ville de Paris
que dehors, en vertu des pouuoirs donnez tant par le Parlement
que par la ville de Paris, seront licentiées apres l’accommodement
fait & signé. Sa Maiesté fera retirer les trouppes des
enuirons de Paris, & les enuoyera au lieu de la garnison qu’elle leur
ordonnera, ainsi qu’il a esté praticqué les années precedentes.
Les Habitans de la ville de Paris poseront les armes, apres l’accommodement
fait & signé, sans qu’ils les puissent reprendre que
par l’ordre & commandement exprés de sa Maiesté.
Que le Deputé de l’Archiduc Leopold, qui est à present à Paris,
sera renuoyé sans responce le plustost que faire se pourra apres la signature
du present traitté.
Que tous les papiers & meubles qui ont estez enleuez appartenant
des particuliers leurs seront rendus.
La Bastille, ensemble l’Arsenac auec tous les Canons, toute la
poudre & autres munitions de guerre, seront remis entre les mains
de sa Maiesté apres l’accommodement fait.
Que le Roy pourra emprunter les deniers que sa Maiesté iugera
necessaire pour les despences de l’Estat, en payant l’interest, à
raison du denier douze durant la presente année, & la suiuante seulement.
Que Monsieur le Prince de Conty & autres Princes, Ducs, Pairs
& Officiers de la Couronne, Seigneurs & Gentil-hommes, Villes
-- 33 --
& Cour, & toutes autres personnes de quelque qualité & condition
qu’ils soient, qui auront pris les armes durant les mouuemens arriuez
depuis le 6. Ianuier dernier iusqu’à present, seront conseruez
en leurs biens, droicts, offices, dignitez, honneurs, priuileges, prerogatiues,
charges, gouuernement, en tel & semblable estat qu’ils
estoient auant lad. prise des armes, sans qu’il en puissent estre recherchez
ni inquietez pour quelque cause & occasion que ce soit, en declarant
par les susdits dénommez, sçauoir, par Monsieur le Duc de
Longueville dans dix iours, & par les autres dans quatre jours, à
compter de celuy que les passages tant pour les viures que pour les
commerces seront ouuerts, qu’ils veulent bien estre compris au
present Traitté : & à faute par eux de faire ladite declaration dans ledit
temps, & iceluy passé, le Corps de la Ville de Paris, & autres
Habitans de quelque qualité & condition qu’ils soient, ne prendront
plus aucune part à leurs interests, & ne les ayderont ny assisteront
en chose quelconque, soubs quelque pretexte que cesoit
Le Roy desirant tesmoigner son affection aux Habitans de sa
bonne Ville de Paris, a resolu d’y retourner faire son sejour au
plustost que les affaires de l’Estat luy pourront permettre.
Sera accordé descharge generale pour deniers pris, enleuez ou
receus, tant publics que particuliers, meubles vendus tant à Paris
qu’ailleurs : comme aussi pour les Commissions données pour la
leuée des gens de guerre, mesmes pour enleuement d’armes, poudres
& autres munitions de guerre, de bouche, enleuez tant en
l’Arsenal de Paris, qu’autres lieux.
Les Eslections de Xainctes, de Cognac, & de Sainct Iean d’Angely,
distraites de la Cour des Aydes de Paris, & attribuez à la
Cour des Aydes de Guyenne, feront reünies à ladite Cour des Aydes
de Paris, comme elles estoient auparauant l’Edict de
Au cas que le Parlement de Roüen accepte le present Traitté
dans dix iours, à compter du iour de la signature d’iceluy, Sa Majesté
pourvoira à la suppression du nouueau Semestre, ou reünion
de tous les Officiers dudit Semestre, ou de partie d’iceux au Corps
dudit Parlement.
Le Traitté fait auec le Parlement de Prouence sera executé selon
sa forme & teneur, & Lettres de sa Majesté expediées pour la reuocation
& suppression du Semestre dudit Parlemẽt d’Aix & Chambres
des Enquestes, suiuant les Articles accordées entre les Deputez
-- 34 --
de sa Majesté & Cour du Parlemẽt & Pays de Prouence, du 21.
Février dernier, dont coppie a esté donnée aux Deputez du Parlement
de Paris.
Quand à la descharge des Tailles proposées pour l’Eslection de
Paris, le Roy se fera informer de l’estat auquel se trouuera ladite
Eslection, lors que les Troupes en seront retirées, & pourvoira au
soulagement des Contribuables de ladite Eslection, comme sa
Maiesté iugera necessaire.
Que lors que sa Maiesté enuoyera des Deputez pour traitter de
la paix auec l’Espagne, elle choisira volontiers quelqu’vn des Officiers
du Parlement de Paris, pour assister audit traitté, auec le mesme
pouuoir qui sera donné aux autres.
Au moyen du present Traitté, tous les prisonniers qui ont esté
faits de part & d’autre, seront mis en liberté du iour de la liberté
d’iceluy. FAIT & arresté à Ruel ce vnziéme Mars 1649.
Signé, GASTON. LOVIS DE BOVRBON.
Le Cardinal Mazarin.
Seguier.
La Milleraye.
Demesmes.
Delomenie.
De la Riuiere.
Le Tellier.
Messieurs du Parlement.
Molé
Demesmes.
Le Coigneux.
Nesmond.
Briçonnet.
Mesnardeau.
Delongueil.
Viole.
Lefebvre.
Bitault.
Delanauue.
Lecocq Corbeville.
Paluau.
Messieurs de la Chambre
des Comptes.
A. Nicolay.
Paris.
Lescuyer.
Messieurs de la Cour des Aydes.
Amelot.
Bragelonne.
Quatr’omme.
Messieurs de la Ville.
Fournier.
Helyot.
Berthelemy.
-- 35 --
Apres la signature desdits Articles, Monsieur le Duc d’Orleans
& Monsieur le Prince ont presenté Monsieur le Cardinal à tous les
Deputez desdites Compagnies, ausquels il leur a dit qu’il vouloit
viure & mourir leur seruiteur, tant en general qu’en particulier, auec
protestations de les seruir en toutes les occasions qui se presenteroient,
mesme les a conduits iusqu’à l’entrée de la derniere salle,
auec Monsieur le Chancelier, qui les ont remercié tous chacun à
part en passant, & se sont retirez ainsi.
Le lendemain Vendredy douziéme Mars 1649. lesdits Deputez
partirent dudit Ruel sur le midy, & se rencontrerent tous auec leurs
carosses & chariots deuant la porte dudit Chasteau, où ils se deuoient
attendre les vns & les autres ; & furent conduits & escortez
par deux ou trois Compagnies de Suisses en haye, tambour battant
iusqu’au lieu de S. Cloud, qui marchoient ainsi auec lesdits carosses,
& les Gardes de Monsieur le Mareschal de Grammont deuant & au
bout du pont dudit lieu de S. Cloud, du costé du Bois de Boulogne,
au lieu desdits Suisses, quatre Compagnies de caualerie en trois
escadrons les vint joindre dans ledit bois, où estoit ledit sieur
Mareschal de Grammont à cheual, auec plusieurs Seigneurs, Gentils-hommes
& Officiers, qui les conduisirent iusques hors ledit
Bois, & lesdits Gardes iusques à la porte de la Conference, au bout
du Cours-la-Reyne.
FIN.
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