Saint-Joseph (révérend père dom Pierre de = R. P. D. P. D. S. J.) [1649], CATECHISME DES PARTISANS, OV RESOLVTIONS THEOLOGIQVES touchant l’Imposition, Leuées & Employ des Finances, Dressée par Demandes & Responces, pour plus grande facilité. , françaisRéférence RIM : M0_652. Cote locale : D_1_9.
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D. Comment se doiuent faire ces impositions & ses leuées ?

R. Elles se doiuent faire selon la condition & a proportion des facultez & des
Biens de chaque particulier & comme au sol la liure en sorte que personne n’en soit
exempt. Car comme tous ont égal interest à la conseruation du Roy, & au bien de
l’Estat, aucun ne se peut dispenser de contribuer au repos de l’vn & de l’autre. Et
comme dans le corps toutes les parties n’agissent pas par égale contribution à la conseruation
du tout, mais chacune selon sa portee & sa condition, ainsi ce seroit vne
chose ridicule & honteuse de demander autant de contribution à vne pauure qu’à
vn riche, lors qu’il est question de faire des leuées pour les necessitez de l’Estat.

D. Quel iugement faites-vous donc de ceux qui ne se contentent pas de ne rien
contribuer, encor qu’ils soient fort riches, mais qui se seruent de ces occasions pour
s’enrichir, apliquant à leur profit particulier, & pour s’éleuer au delà de leur naissance
& de leur condition, vne partie de ce, qui estoit necessaire & destiné pour la
conseruation du public.

R. Ie responds que ce sont des monstres d’hommes, qui n’en ont que la figure exterieure ;
qui sont l’execration du Ciel, & doiuent estre l’auersion & l’abomination
publique plus dangereux & plus punissables que les ennemis estrangers, comme les
abscéz, qui se forment dans le corps, sont plus dangereux & à craindre, que les pustulles,
qui s’esleuent sur la peau ; qu’ils pechent mortellement & n’en peuuent estre
absous qu’apres la restitution.

D. Les Roys peuuent-ils pas faire des leuées pour aduancer la fortune & faire la
maison de ceux qu’ils iugent particulierement dignes de leur faueur & de leur
amitié ?

R. Nullement, Car supposé que l’Estat n’est pas tyrannique, & qu’ils ont leur domaine
pour en disposer à leur gré, la seule necessité leur donne la liberté de foüiller
dans la bource de leurs peuples, qui est comme vn bien estranger, & sur lequel hors
cette circonstance ils n’ont point de droict. Et si pour leur satisfaction particuliere.
comme pour le luxe des bastimens, d’habits, d’ameublemens, de bals, de comedies,
& autres diuertissemens qui regardent le plaisir des sens, ils n’ont pas cette liberté,
& ne peuuent en conscience employer à ces choses que leur domaine & non pas la
sueur & le sang des miserables, a plus forte raisonne le peuuent-ils pas faire pour l’agrandissement
des personnes particulieres, qui d’ailleurs pour l’ordinaire abusent
de ces biens, s’en seruent pour les prodiguer en luxe & se damner, & bien souuent
pour se faisant des creatures, se rendre insolens & insupportables aux peuples, &
formidables à leurs propres maistres.

D. Du moins ne pouuez-vous pas desnier qu’ils ne puissent imposer quelques
sommes, quand ce ne seroit que sur les denrées, pour l’aduancement des communautez
& l’entretien des congregations regulieres ?

R. Encore moins, s’il faut ainsi parler, non pas que le pouuoir soit moindre, ou le
mal plus grand, de faire des impositions & leuées pour ceste fin, que pour la satisfaction
insatiable de quelques fauoris : mais ie veux dire, que comme les pechez sont
plus grands, quand on se sert dans les charmes des mots de l’Euangile, plustost que
des termes prophanes : le mal est en quelque maniere plus dangereux & à craindre,
quand sous le manteau de pieté & de deuotion, il veut passer pour vn bien qui merite
la recompense du Ciel, auec la loüange des hommes : parce qu’entretenant l’esprit
dans cét aueuglement, il l’empesche de se connoistre, de s’amander & d’en faire penitence
Et mon esprit est dans vn estonnement dont il ne sçauroit sortir, de voir des
impositions publicques & permanentes, sur les choses que la nature donne & qui
sont necessaires pour la vie des hommes, pour estre employez en des superbes bastiments,

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Saint-Joseph (révérend père dom Pierre de = R. P. D. P. D. S. J.) [1649], CATECHISME DES PARTISANS, OV RESOLVTIONS THEOLOGIQVES touchant l’Imposition, Leuées & Employ des Finances, Dressée par Demandes & Responces, pour plus grande facilité. , françaisRéférence RIM : M0_652. Cote locale : D_1_9.