Fortin, Pierre (sieur de La Hoguette) [1650], CATECHISME ROYAL. , françaisRéférence RIM : M0_653. Cote locale : A_9_2.
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Police du Royaume a permis, que les Compagnies souueraines
fussent incorporées plûtost auec le tiers Estat, qu’auec la Noblesse ;
& comme s’est pû faire parmy nous le diuorce de deux professions,
qui seruent d’vne baze commune pour le maintien de tous les Estats
du monde. Si c’est vn effet de la vicissitude des choses, ou du dechet
de l’ancienne pureté de la Iustice, j’en remets le jugement à la conscience
de ceux qui l’exercent : mais je ne fais point de doute, qu’elle
ne reprist bien-tost son premier lustre, & qu’il ne fust bien-aisé de
des-abuser vôtre Noblesse de cette superstition d’honneur, que ces
deux Professions soient incompatibles, si la venalité des Offices
estoit ostée, & que cette gangrenne, qui a déja gagné toutes les parties
nobles, ne se fust point renduë incurable.

 

L. R. Comment incurable ? y a-t’il quelque mal en mon Royaume
qui soit de cette nature ? Vn Roy mal conseillé y peut introduire
vn mauuais vsage, vn sage Roy le peut oster ; & plus vous me rendez
la chose difficile, plus je me sens picqué d’honneur d’y trauailler.
Et je vous prie de m’en ouurir les moyens.

L. G. SIRE, C’est vn ouurage d’vn aage plus meur que le vôtre,
& qui peut-estre en sa saison ne sera point au dessous de vos forces
Ce n’est pas que les grandes reformations n’ayent toûjours en elles
quelques choses de tres dur à faire & à souffrir : Mais quand il est
question de sauuer le total, l’injustice particuliere se fait legitime
alors, & deuient vne justice publique. Et sur ce fondement V. M.
peut tout entreprendre. Il seroit à souhaitter aussi que l’administration
de la Iustice fust vn peu plus briefve, & moins sujette aux formes ;
le chemin le plus droit est toûjours le plus court, le plus seur, &
le plus aisé à tenir. La pluspart des formalitez, sont voyes obliques,
sujettes aux embusches & aux surprises, qu’on ne peut tenir sans guide,
& qui corrompẽt souuent vne source bien claire par vn mauuais
acqueduc. Enfin, SIRE, la Iustice est vne des colomnes de vôtre
Estat, vn pouuoir sans Iustice, n’est rien autre chose qu’vne force de
frenesie, & vne Iustice sans pouuoir, vne Theorie sans application.
C’est pourquoy il est tres-à-propos, que la puissance Royale soit
temperée par la Iustice, & que la Iustice aussi prenne force & autorité
de cette mesme puissance ; parce que c’est de ce secours respectif,
& de cét aide mutuel, qui est entre le Prince & la Loy, que se
fait le bon-heur d’vn Estat.

L. R. I’en demeure d’accord auec vous ; mais venons, je vous

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Fortin, Pierre (sieur de La Hoguette) [1650], CATECHISME ROYAL. , françaisRéférence RIM : M0_653. Cote locale : A_9_2.