Le Solitaire [signé] = Arnauld d'Andilly, Robert [?] [1649], ADVIS D’ESTAT A LA REYNE, Sur le gouuernement de sa Regence. , françaisRéférence RIM : M0_498. Cote locale : A_2_16.
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trouué les restes en cette derniere occasion. Et ne doutez point,
MADAME, que cet esprit vaste & ambitieux n’ait eu les pensées de
Charles Martel, ayant tant de facilité & de moyens pour l’execution
d’vn tel dessein. Vous pouuez croire asseurement, MADAME,
que le Cardinal de Richelieu a eu cette pensée, ne luy restant que le
titre de la Royauté à vsurper, en ayant desia tout l’effect, & ayant
aneanty & abbatu tous les Princes qui demeuroient denuez de
moyens pour luy resister. Il auroit pratiqué alors le conseil qu’il
auoit voulu donner à Monsieur l’Electeur de Saxe en l’année 1630.
qui fut reietté par ce Prince sagement & genereusement. V. M. ie
m’asseure, n’aura pas desagreable d’entendre quelle estoit cette proposition.
Le Cardinal de Richelieu enuoya le Marquis de Feuquieres,
allié du Pere Ioseph, vers ce Prince, pour negotier auec luy, &
dans l’instruction qui luy donna l’vn des principaux poincts estoit,
de persuader à Monsieur l’Electeur, qu’il ne comparust point à la
Diete de Ratisbonne, & qu’il empeschast par ce moyen l’Election
du Roy des Romains ; qu’il deuoit pretendre à se faire Roy de Germanie,
abolissant le tiltre & la qualité d’Empereur, & ruinant la
maison d’Austriche ; & que pour luy rendre facile l’execution d’vn
si haut dessein, le Roy, dont il cognoissoit les forces, l’aideroit
puissamment à le rendre maistre absolu de l’Allemagne, & à cette
fin l’assisteroit pour ruiner tous les Princes, & les anciens establissemens
de l’Empire. L’Electeur receut cette proposition chimerique
auec des ressentimens d’indignation, & il dit au Marquis de Feuquieres
qu’il ne croiroit iamais que le Roy en fust l’autheur, veu
qu’elle estoit si detestable, & que certainement elle ne pouuoit venir
que de ce meschant & scelerat Cardinal de Richelieu. Qu’il estoit
si esloigné de penser à aucune innouation des anciens establissemens
qui sont dans l’Empire, qu’il auoit tousiours detesté Iules Cæsar, qui
auoit renuersé l’Estat de la Republ que Romaine, & tyrannisé sa
patrie. Qu’il vouloit employer tous ses soins pour la manutention
de l’Estat Politique estably depuis tant d’années, & qui duroit iusques
alors. Qu’il sçauoit bien que telles innouations ne pouuoient
se faire sans la totale ruine de tous les membres de l’Empire, dont
il estoit l’vn des principaux, & qu’il se contentoit d’estre ce que Dieu
l’auoit fait naistre. Il adiousta, transporté de colere & d’indignation,
que sans estre Roy de Germanie il s’estimoit autant que le Roy de
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Le Solitaire [signé] = Arnauld d'Andilly, Robert [?] [1649], ADVIS D’ESTAT A LA REYNE, Sur le gouuernement de sa Regence. , françaisRéférence RIM : M0_498. Cote locale : A_2_16.