La Colombière, Marc de Vulson de [?] [1649], RAISONS D’ESTAT, CONTRE LE MINISTERE ESTRANGER. , françaisRéférence RIM : M1_192. Cote locale : C_9_4.
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Comte d’Espagne, & qu’il luy auoit donné le secret de ses affaires
auec la charge de son Maistre de Chambre.

 

Enfin, pour abreger tous nos exemples en vn seul, rappellez en
vostre memoire la fin tragique du Mareschal d’Ancre, & l’Arrest
de la Cour de Parlement contre les Estrangers, pour les exclure
du Ministere : & prestez l’oreille aux murmures publics & particuliers
de tous les gens de bien, qui s’esleuent si hautement contre le
Cardinal Mazarin, dont on ne peut plus supporter la façon d’agir,
entierement contraire à celle de nostre nation. Ie ne touche point à
sa vie, & ne m’amuse point à exaggerer les reproches que quelques
vns font contre la pureté ou l’impureté de ses mœurs : Ie diray seulement
qu’il s’est gouuerné auec nous en sorte, que s’il continuoit
plus long-temps, la rage mesme ne trouueroit pas dequoy mordre.
Outre que la dignité qui le met à couuert contre toute sorte d’atteintes,
m’empesche d’en exaggerer dauantage.

Fin du
Mareschal
d’Ancre,
& l’Arrest
du Parlemẽt
de ce
tẽps-là.
Façon
d’agir du
C. M.

Mais s’il faut parler des choses qui ont esté visibles, ie vous prie
d’examiner sans passion chaque Courtisan en particulier. Et au cas
que tous ne crient & ne protestent qu’il a espuisé par ses longueurs
la bourse de tous ceux qui luy faisoiẽnt la cour, & la patiẽ ce des plus
sages, dites que ie suis vn meschant. Ils vous aduoüeront (& ie n’en
excepte pas ses plus intimes amis) que la lenteur auec la quelle il faisoit
du bien, rendoit ses ennemis ceux qui le receuoiẽt, parce qu’ils
le payoient au double auant que de le receuoir : & que la difficulté
qu’il y auoit de le voir & de luy parler, a ruiné dans les cœurs
de toute la Noblesse l’affection qu’on auoit au commencement
pour luy. Parce que les François croyent qu’on les oblige deux fois,
quand on leur donne promptement & de bonne grace, ce qu’ils
croyent leur estre deu, estans accoustumez à la façon de viure des
Ducs de Luynes & de Richelieu, qui enuoyoient chercher les
honnestes gens chez eux pour leur faire du bien, & qui preuenoient
les desirs & les necessitez de ceux qui le meritoient. En vn mot les
promesses generales qu’il faisoit à tout le monde, & l’inexecution
dont tout le monde se plaignoit, sont les raisons qui l’ont dépourueu
d’amis & de creatures. Hé d’où vient tout cela, sinon des
mœurs de son pays, ausquelles voulant tousiours se tenir ferme, il
se conduisoit par des voyes entierement opposées aux nostres ?

Ie vous ay iustifié par les Loix & par les Exemples, comme les
Estrangers ont esté bannis du maniement des affaires publiques.

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La Colombière, Marc de Vulson de [?] [1649], RAISONS D’ESTAT, CONTRE LE MINISTERE ESTRANGER. , françaisRéférence RIM : M1_192. Cote locale : C_9_4.