Montmorancy, C. de [signé] [1650], LETTRE DE MADAME la Princesse Doüairiere de Condé, presentée à la Reine Regente. Contentant tous les moyens dont le Cardinal Mazarin s’est seruy pour empescher la Paix, pour ruiner le Parlement & le Peuple de Paris; pour tâcher de perdre Monsieur le Duc de Beaufort, Monsieur le Coadjuteur, Monsieur de Brousselles, & Monsieur le President Charton; par l’assassinat supposé contre la personne de Monsieur le Prince; & pour emprisonner Messieurs les Princes de Condé & de Conty, & Monsieur le Duc de Longueuille. , françaisRéférence RIM : M0_1954. Cote locale : B_4_22.
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Mazarin le peut estre du vostre, & suiure vn si bel
exemple ; à la verité elle fut assez promptement deliurée
de cette prison par Monsieur d’Espernon, aussi bien que
de son ennemy, par vne mort inopinée : Mais elle retomba
bien-tost après dans vne plus cruelle persecution, &
dans vne si grande frayeur d’estre encore arrestée prisonniere,
par la malice du Cardinal de Richelieu, qui auoit
esté son premier Ministre, comme le Cardinal Mazarin est
aujourd’huy le vostre, qu’elle fut forcée de se bannir elle-mesme
hors du Royaume, où tout le monde sçait qu’elle
est morte de miseres.

 

Qui vous peut asseurer, MADAME, qu’il ne vous en
arriuera pas autant, & que vous ne receurez point quelque
jour vn pareil traittement, si le Cardinal Mazarin
s’emparant, comme il y trauaille dés à present, de la puissance
du Roy, deuenu Majeur, il se met en l’esprit que
vous n’estes plus vtile à son ambition, & à la grande fortune
qu’il esperoit, que vous estes contraire à son autorité,
& que vostre presence luy reproche tous vos bien-faits ; &
que sçauez-vous si ce cruel Ministre, pour imiter parfaitement
le Cardinal de Richelieu, dont il ne sera pourtant
jamais qu’vne copie tres-imparfaite, il ne vous chassera
pas hors de France ; & si pour surpasser encore la malice &
la cruauté de son predecesseur, il ne vous mettra pas pour
le reste de vos jours en quelque prison, loin des yeux de
vostre fils, & de tous les gens de bien qui pourroient vous
secourir.

Encore que tous les hommes, & principalement les
Rois & les plus grands de la terre, n’attendent jamais la
mauuaise fortune qu’ils s’imaginent toûjours estre éloignée
d’eux, d’autant plus qu’ils sont éleuez ; & que dans la
prosperité où vous estes, MADAME, vous n’apprehendiez
point l’aduersité, & n’escoutiez pas fauorablement
les discours que l’on vous peut faire, pour vous obliger à
la craindre & à l’euiter, ie prendray pourtant la hardiesse
de vous dire, conuaincuë que j’en suis, par l’experience

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Montmorancy, C. de [signé] [1650], LETTRE DE MADAME la Princesse Doüairiere de Condé, presentée à la Reine Regente. Contentant tous les moyens dont le Cardinal Mazarin s’est seruy pour empescher la Paix, pour ruiner le Parlement & le Peuple de Paris; pour tâcher de perdre Monsieur le Duc de Beaufort, Monsieur le Coadjuteur, Monsieur de Brousselles, & Monsieur le President Charton; par l’assassinat supposé contre la personne de Monsieur le Prince; & pour emprisonner Messieurs les Princes de Condé & de Conty, & Monsieur le Duc de Longueuille. , françaisRéférence RIM : M0_1954. Cote locale : B_4_22.