M. L. [signé] [1649], RESPONCE, ET REFVTATION du Discours intitulé, LETTRE D’AVIS A MESSIEVRS DV PARLEMENT DE PARIS. PAR VN PROVINCIAL. , françaisRéférence RIM : M0_3443. Cote locale : C_3_32.
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il semble que ie n’en excepte point ceux qui sont
proprement & originairement tyranniques : Toutes fois
ce n’est pas mon sentiment que nous deuions obeïssance
à toute sorte de violens Souuerains. Ceux qui ayans
esté legitimement establis, degenerent dans leur regne,
ne laissent pas d’estre tousiours puissans, augustes, venerables,
encore qu’ils cessent d’estre iustes : Ils ont occupé
vn lieu duquel on ne tombe que par violence, comme
on n’arrache les choses naturelles de leur lieu que par
contrainte, & quiconque les precipite du thrône où ils
sont montez, fait comme vn autre Phaëton qui outrage
toute la Nature, en faisant tomber le Soleil. Aussi ne merite
t’il pas moins que luy les coups de foudre que Iupiter,
que le Dieu vengeur lance sur les testes criminelles.
Mais celuy qui de particulier se veut faire Souuerain, qui
desole le païs de ses voisins, qui sans succession, sans élection,
ny sans aucun autre establissement legitime veut
se rendre le Maistre de ceux qui sont ses égaux, veut
vsurper leurs biens & leur franchise, veut prendre empire
sur leurs vies, comme il fait ce qu’il n’a Droit de faire
en nulle sorte, ie n’entends pas qu’on luy doiue aucune
obeïssance. Ie croy qu’il est du deuoir des persecutez
de se deffendre, & mesme de punir vn tel persecuteur :
Aussi est-ce ce qu’ont fait plusieurs peuples sur lesquels
s’est voulu éleuer la tyrannie : Deux Brutes l’ont
genereusement executé deux fois à Rome : Hercules l’a
fait par toute la terre. Timoleon, Dion, Aaratus ont chastié
tous ces vsurpateurs dans la Grece ; & si l’on en auoit
autant fait aux Turcs dans les commencemens de leur
tyrannie, ils ne seroient pas auiourd’huy à ce poinct de
puissance redoutable qui fait fremir de terreur toute
l’Europe. Quelques-vns sur ce suiet demanderoient si vn
tyran ne peut pas deuenir legitime Prince, & si l’on n’est
pas obligé de luy obeïr, quand il est deuenu tel ou par la
douceur de son regne, ou par quelque autre moyen qui
l’authorise. La chose est indubitable & sans controuerse :
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M. L. [signé] [1649], RESPONCE, ET REFVTATION du Discours intitulé, LETTRE D’AVIS A MESSIEVRS DV PARLEMENT DE PARIS. PAR VN PROVINCIAL. , françaisRéférence RIM : M0_3443. Cote locale : C_3_32.