Louis (XIV), De Guénégaud [signé] [1650], LETTRE DV ROY, SVR LA DETENTION DES PRINCES DE CONDÉ ET DE CONTY, & Duc de Longueville. Enuoyée au Parlement le 20. Ianuier 1650. , françaisRéférence RIM : M0_2197. Cote locale : D_2_35.
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de son ambition. La nature de diuerses pretentions
qu’il a mis en auant de fois à autre, & dont on a tasché de s’exempter
auec douceur & prudence, pourra faire iuger quelles estoient
les pensées & les emportemens de cet esprit. Tantost il a insisté
fortement à se faire donner vne armée pour aller conquerir la
Franche-Comté, à condition qu’il la possederoit apres souuerainement :
tantost que nous luy donnassions Graueline, Donkerque
& toutes les conquestes que nos armes ont faites en Flandres
du costé de la mer en plusieurs années, pour les posseder aussi en
Souueraineté. Au milieu de la campagne derniere, pendant que
nostre armée estoit auancée dans la Flandre, & qu’on ne pouuoit
l’affoiblir sans luy faire courir risque de receuoir quelque grand
eschec : il pretendit qu’abandonnant toute autre visée d’incommoder
les Ennemis, & au hazard mesme d’exposer nos Frontieres
& nos Places à leurs insultes & à leurs attaques, on détachast
de nostredite armée vn grand corps de caualerie pour aller du
costé du Liege, appuyer le dessein qu’il auoit de porter le Prince
de Conty son frere, à la Coadjutorerie de cét Euesché-là, afin de
rendre par ce moyen plus considerables les places qu’il a sur la Meuse
& le Gouuernement de Champagne : Outre vn plus grand establissement
qu’il projettoit de prendre de ce costé-là, comme nous
dirons cy-apres. Tout cela fait voir clairement par beaucoup de
circonstances remarquables, à quel point il estoit possedé du desir
de la Souueraineté. Pensée d’autant plus dangereuse en vn esprit
tout de feu comme est le sien, que nous sommes d’ailleurs bien
informez qu’il a eu souuent dans la bouche, parlant à ses Confidents,
la pernicieuse maxime, qu’on peut tout faire pour regner.
Bien que dans vne Monarchie establie sur des fondemens aussi solides
qu’est la nostre, & principalement sur l’amour, & sur la fidelité
inesbranlable que tous les François ont naturellement pour les
droits & pour la personne de leurs Roys, vne pensée si criminelle
que celle-là, ait presque tousiours esté suiuie du chastiment ou de
la ruine de ceux qui l’ont euë : ce seroit manquer à ce que nous
deuons tant à nous mesmes, qu’à nos fidels Subjets de n’aller pas au
deuant de tout ce qui pourroit rendre faciles auec le temps, les
moyens d’executer vn si injuste projet. Car quand mesme les propos
qu’il en a tenus n’auroient pas esté vne marque de ce qu’il
auoit dans l’ame, il est certain qu’à examiner de prés toute sa
conduite depuis nostre aduenement à la Couronne, personne ne
sçauroit desauoüer qu’il n’ait en vne intention toute formée de
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Louis (XIV), De Guénégaud [signé] [1650], LETTRE DV ROY, SVR LA DETENTION DES PRINCES DE CONDÉ ET DE CONTY, & Duc de Longueville. Enuoyée au Parlement le 20. Ianuier 1650. , françaisRéférence RIM : M0_2197. Cote locale : D_2_35.