Louis (XIV), De Guénégaud [signé] [1649], LETTRE DV ROY AVX GOVVERNEVRS DES PROVINCES: Sur ce qui s’est passé avec les Députez venus de Paris le 25 Février 1649. Et les responses faites ausdits Députez. , françaisRéférence RIM : M0_2141. Cote locale : A_1_18.
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faire paroistre sa modération, en rendant grand nomble de places importantes
& des Estats entiers ; les Espagnols auroyent esté aussi contraints de donner les
mains à vn accommodement, si la conduite de quelques factieux ne leur eust
fait concevoir de si fortes espérances de ces divisions & de remuëmens dans le
Royaume, qu’ils ont crû en devoir attendre l’evénement, pour en profiter.

 

Car pour ce qui est de l’offre qu’on a fait faire par le Moine, comme de la
part de l’Archiduc, de rendre ladite Compagnie arbitre de cette grande affaire :
Quand la proposition seroit aussi sincére que toute apparence, & raison veut
qu’elle ne le soit pas ; ce n’est pas vn honneur que les Espagnols luy rendent,
c’est vne injure & vn affront qu’ils font à tout ledit Corps.

La France a souvent offert aux Espagnols de se soumettre en tous les points
indécis & qui sont demeurez en différant, à l’arbitrage & à la décision ou des
Provinces vnies avec M. le Prince d’Orange, Ou dudit sieur Prince, appellãt avec
luy quelqu’vn des Ministres des Estats, ou de la Reine de Suede, ou des Princes
& Estats de l’Empire, conjointement ou separément, ainsi qu’ils aimeroyent le
mieux : ce qu’ils ont tousjours constamment refusé, & ils s’adressent aujourd’hui
à ladite Compagnie pour luy déferer ce jugement ; c'est-à-dire la disposition des
plus grands interests que leur Couronne ait à démesler avec celle cy.

Ne luy seroit-ce pas vne tache qu’estant toute composée de François, le Roy
d’Espagne l’a jugeast plus portée en sa faveur & s’en promist vn meilleur traitement ;
que de la Reine mesme qui est sa sœur, ou que de tant de Princes & Potentats
estrangers avec qui il est en paix, & mesme en liaison.

Les Espagnols ont fait voir par leur conduite en tout temps, qu’ils ne souhaittent
rien tant que la diminution de la puissance, de la grandeur & de l’authorité
du Roy, & cependant ils ont recours à ladite Compagnie par preférence à tous
autres, & déclarent qu’ils la choisissent pour arbitre de tous les différans. Peuvent-ils
offenser plus sensiblement de bons François & des Officiers, que de les
croire capables d’estre sous vn prétexte specieux des instrumens propres à l’abaissement
de leur Roy, & à l’affoiblissement de cette Monarchie, qui est tousjours
la principale visée qu’ils ont en toutes leurs actions.

Ceux qui ont formé l’instruction du Moine, ont bien mal raisonné de ne s’estre
pas aperceus qu’ils luy ont fait destruite d’vn costé, ce qu’ils luy faisoyent
establir de l’autre. Les Espagnols souhaitent, dit-il, la paix avec passion, &
pour preuve de cela, ils sont disposez d’en passer par le jugement de ladite Compagnie.
Mais si cette passion estoit veritable & sincére, refuseroient-ils tant de
places & de Provinces entieres qu’ils disent que le Roy leur a offert, pour s’adresser
à d’autres, dont tout ce qu’ils pourroyent attendre de plus favorable &
de plus avantageux, ne sçauroit estre que la promesse de la mesme chose, sans
espérance d’aucune exécution, puisqu’elle ne peut jamais dépendre que des ordres
du Roy.

Y auroit-il quelqu’vn assez simple pour se persüader qu’ils veüillent épargner

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Louis (XIV), De Guénégaud [signé] [1649], LETTRE DV ROY AVX GOVVERNEVRS DES PROVINCES: Sur ce qui s’est passé avec les Députez venus de Paris le 25 Février 1649. Et les responses faites ausdits Députez. , françaisRéférence RIM : M0_2141. Cote locale : A_1_18.