RESPONSE A LA DECLARATION DV ROY,
imprimée contre Monsieur de Chasteau-neuf, & Madame
la Duchesse de Cheureuse.
ON a fait courir ces iours passez vn fragment d’vne Declaration
de la derniere volonté du feu Roy d’heureuse memoire,
contre Mr de Chasteau-neuf & Madame la Duchesse de Cheureuse,
que l’on publie en forme de libelle diffamatoire, dont la lecture m’a
surpris. Car encores que nous ne voyons autre chose presentement,
que des escrits injurieux contre toutes les personnes d’honneur, parce
que la haine & la colere dépourueuë de toute raison, n’ont gueres
d’autres armes offensiues que la calomnie, il ne me sembloit pas
possible, qu’en vn temps où le bien public est le pretexte general,
il veust des gens assez imprudens pour déterrer les calomnies d’vn
siecle condamné, & vniuersellement detesté. Ie veux dire du siecle
du Cardinal de Richelieu, dont il semble qu’on veuille faire reuiure
les persecutions & la tyrannie.
Monsieur de Chasteau neuf est bien glorieux que la malice &
l’enuie n’ayent peu rien inuenter pour le noircir, & qu’elles soient
obligez pour satisfaire à leur rage, d’aller souïller dans les monumens
de la hayne de son ennemy, & que l’on veuille le diffamer,
pour parler ainsi, par la gloire de son martyr.
Ce grand personnage est si fort au dessus de ses calomniateurs,
par son courage inflexible, & par la hauteur de sa vertu, qu’il regarde
de leurs medisances comme des discours de Theatre. Mais il y a des
gens de bien qui ne peuuent souffrir cette indignité.
Ce malheureux Cardinal, fondateur de la tyrannie en ce Royaume,
deuenu maistre des affaires & de l’esprit du feu Roy, autant par
Pire de Dieu, pour nos pechez sur nous, que par les heureux succez
de nos armes, ayant persuadé à ce Prince mourant & abbatu de douleur,
que le retour de M. de Chasteau-neuf, & de Madame de Cheureuse
estoit pernicieuse à l’Estat, il ne luy fut pas difficille d’obtenir
du Roy, preocupé de longue main de mauuaises impressions, le
consentement qu’il donna pour cette Declaration ; dictée & inspirée
par ce Cardinal. Et bien qu’elle portast le nom de la derniere volonté
d’vn Roy, & que sa Majesté eust mandé Messieurs du Parlement
pour l’authoriser, & qu’en suite elle eust esté verifiée auant sa
mort, il n’eut pas plutost les yeux fermez, que le mesme Parlement,
qui sçauoit la suggestion toute publique, & les autres artifices pratiquées
pour extorquer cet acte, le destruisit par la Declaration de la
Regence, & par vn pur & libre mouuement de la Iustice, bien que
Anonyme [1651],
RESPONSE A LA DECLARATION DV ROY, Imprimée contre Monsieur de Chasteau-neuf & Madame la Duchesse de Cheureuse. , français
Référence RIM : M0_3359. Cote locale : B_14_28.