Anonyme [1649], LES DOVCEVRS DE LA PAIX, ET LES HORREVRS DE LA GVERRE. , françaisRéférence RIM : M0_1173. Cote locale : A_3_22.
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que des faiseurs de mousquets, de picques & d’épées : aussi
n’est ce pas luy qui fait naistre au monde ces admirables artisans,
que la nature semble ne produire que pour enrichir
& pour decorer l’vniuers. Ils sont les enfans de la paix ces
illustres artistes, la guerre n’a besoin que de quelques pernicieux
ingenieurs. Les sciences non plus n’ont guere d’vnion
auec les armes, & quoy que les Poëtes nous en representent
la deesse armée ; ce n’est pas pour nous dire qu’elles
florissent les vnes parmy les autres ; mais seulement pour figurer
que c’est par le sçauoir & par la prudence que se gouuerne
la valeur. Il ne faut donc pas s’imaginer qu’encore
que les fougues de Mars se seruent de l’esprit & du sçauoir
de Minerue, il la face ny subsister, ny naistre aucunement.
Iuppiter est son illustre pere, & l’autheur de la paix est aussi
celuy du sçauoir.

 

Il n’y a donc rien d’excellent & de beau, ny de souhaitable,
iusques aux autels mesmes, qui ne soit libre dans la
paix, qui ne florisse, & qui ne rentre dans la pureté de ses
vsages, & dans la gloire de son estre. Ie dis iusques aux autels,
pour ce qu’ils fument auec plus de presse dans le calme
que dans l’orage, dans l’vn si les vœux se conçoiuent, dedans
l’autre ils s’accomplissent & s’executent. Qu’on ne
dise point que le temps de douleur est celuy de Dieu, & que
les delices amollissent le zele ; il me semble que l’ame est
bien ferme, qui parmy les frayeurs des allarmes s’éleue vers
le Ciel sans desordre. Le sentiment du mal oste beaucoup de
celuy de la deuotion, & rarement void-on vn cœur épouuanté
s’humilier auec asseurance en la presence de Dieu.
La paix nous déliure de tous ces troubles, & comme il n’y a
point de passion qui gehenne l’esprit comme la crainte,
elle nous en degage, & nous fait iouyr de cette liberté si necessaire
à ceux qui veulent s’entretenir auec Dieu, & fait
que sans estre diuertis par ce fascheux empeschement, ils
s’approchent iusqu’au pied du trône de sa Majesté.

Qu’y a t’il donc au monde d’égal à la paix, qui nous comble
de tant de biens tous ensemble. Crions, poussons nos
graces vers le Ciel qui nous l’a dõnée, lors que nous croyons
aller choir dans les plus bas abysmes de la guerre.

FIN.

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Anonyme [1649], LES DOVCEVRS DE LA PAIX, ET LES HORREVRS DE LA GVERRE. , françaisRéférence RIM : M0_1173. Cote locale : A_3_22.