Anonyme [1649], APOLOGIE DES NORMANS AV ROY POVR LA IVSTIFICATION DE LEVRS ARMES. , françaisRéférence RIM : M0_113. Cote locale : A_2_20.
Page précédent(e)

Page suivant(e)

-- 6 --

bien qu’elle ait desia produit des effects plus funestes, que ne fit iamais
l’Ambassade de Dom Bernardin de Mendoze, auec la puissance
de tous les Partisans d’Espagne, alors que dans Paris ils s’apprestoient
pour mettre vostre Couronne sur la teste de leur Maistre.

 

Enfin, Sire, nous sermons les yeux à la haute politique, pour les
faire ouurir à nos malheurs : & nous contentans de faire voir sa perfidie
par nos propres desastres, ie m’asseure apres cela, qu’il n’y a personne
si grossier qui ne iuge que le Cardinal Mazarin n’a trauaillé
iusques icy qu’à perdre le Roy & le Royaume.

L’Historien de l’ancienne Rome dit, que l’auarice & la luxure
sont les deux pestes qui ont exterminé les grands Empires du monde.
Si le Cardinal Mazarin se sert de la derniere pour nous perdre
nous ne pouuons en rien examiner ; encore vn peu de respect pour
le caractere qu’il porte, ou qu’il feint de porter, nous ferme la bouche,
& l’impureté des Italiens (nous en exceptons les bons) n’a pas
encore tellement infecté la France, qu’il ne nous reste assez de pudeur
pour supprimer des crimes, dont la reprehension ne seroit pas
plus vtile, que l’exemple en pourroit estre infame & dangereux.

S’il s’est seruy de l’auarice ; ô doute criminel ! mais plus sanglant
souuenir ! qui nous fait verser des larmes de sang : C’est sur ce piuot
qu’ont roulé tous nos desastres : pardonnez, Sire, si nous alterons l’innocence
qu’on deuroit voir en vostre regne dessous vn Roy si innocent,
par le recit des cruautez que l’on voit dans le ministere, sous
des Ministres si cruels.

Depuis cinq ans on ne connoist de dans la France que l’horreur &
la desolation dont l’auarice de Mazarin est la cause : c’est elle qui a
produit la corruption des mœurs dans tout vostre Royaume ; l’impieté
triomphante iusques sur les Autels : les applaudissemens aux
sacrileges, aux cimonies, aux blasphemes, aux vols mesmes publics :
la fourbe & l’infidelité entre les Courtisans : l’hypocrisie dedans la
Cour, où la deuotion à la mode est detenir vn chapelet en vne main,
& vn poignard dans l’autre ; la consternation de tous les gens de
bien ; les souspirs & les sanglots des veufues ; les cris & les gemissemens
des orphelins ; mais plustost de tous ces grands Estats, qui ne
sont plus qu’vn hospital de miserables. Qui croira que l’auarice d’vn
Estranger nous ait fait tant de maux ?

C’est elle, Sire, qui est l’ouuriere des tortures qui demembrent

Page précédent(e)

Page suivant(e)


Anonyme [1649], APOLOGIE DES NORMANS AV ROY POVR LA IVSTIFICATION DE LEVRS ARMES. , françaisRéférence RIM : M0_113. Cote locale : A_2_20.