que i’auois tasché de vous esleuer.

Mon FILS, en effet, c’est vn cruel fleau pour
vn ieune Prince, qu’vne Mere imperieuse, lors
qu’elle croit que cet auantage, & ce nom luy donne
lieu d’ériger en son Empire, toutes ses volõtez
en tiltre de Lois, & sur tout, lors qu’vn Fauory
s’est rendu maistre de ses sentimens, & que l’esperance
qu’il a de s’enrichir par son moyen, fait
de sa passion & de ses interests, des regles aux volontez
de cette victime immolée à tous ses desirs.

Il est vray qu’on auroit sujet de s’estonner
comment Senecque & Burrus, ces deux Romains,
reputez les plus sages de leur siecle, presterent
leur consentement au funeste dessein que faisoit
Neron, de perdre sa Mere Agrippine, qui le vouloit
perdre luy mesme, & mutinoit toute la Ville
contre luy, si ce n’est que la raison nous apprend
qu’il n’est pas iuste, qu’vne personne, pour
flatter sa passion & satisfaire quelque desir de
vangeance mal fondé, trouble le repos de tout
vn Empire, & qu’il est permis d’esteindre vn
flambeau qui ne luit que pour la ruine du Genre
humain.

C’est ce qui iustifie entierement la rigueur du
traittement qu’on m’accuse d’auoir fait à vostre
ayeulle, qui picquée au vif de la perte de
son Fauory, dont i’estouffay les mauuais desseins
auec sa vie, renouuelloit ses pratiques à tous
momens, pour causer des seditions ou des guerres