Anonyme [1649], L’ESPAGNE DEMANDANT LA PAIX AVX PIEDS DE LA MAIESTÉ ROYALLE, ET DV PARLEMENT. , françaisRéférence RIM : M0_1275. Cote locale : A_3_34.
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de leurs estonnement & de leur épouuante : & cette fierté
que la nature m’a donné m’abãdonnoit à chaque moment de sorte
que par excés de crainte l’on m’a estimée orgueilleuse, quãd ie n’auois
pas la force de decouurir mes iustes desirs, l’on en a creu que
i’en auois de mauuais.

 

Ce n’a pas toutesfois esté m’a seule crainte qui m’a en ce temps la
osté la parole ; vn reste de courage au plus fort de mon mal-heur m’ẽpeschoit
de vous de mander la Paix le ne voulois pas vous implorer
dans cette grande prosperité de vos armes & dans la deroute des
miennes. Vous eussiés pensé que ie ne cherchois le calme que par
necessité & pource que l’orage m’estoit funeste. Vous eussiés nõmé
Bassesse de courage mes plus legitimes mouuemens.

Apres la mort du grand Armand, comme j’ay creu que ie n’auois
plus tant a craindre & que ie pouuois encor esperer quelque chose ;
C’est lors que ie n’ay voulu pretendre que la tranquilité. Ie vous ay
fait cognoistre Majesté illustre quels desseins i’auois lors que i’en
pouuois auoir de plus grands. Ie voyois bien encor au monde ce
vainqueur superbe assés grand & assés puissant pour maruine, ce fier
Gassion si redoutable à tout mon Empire, mais ie le voyois sans l’aprehender.
Vostre Estat estant conduit par le Cardinal Mazarin,
qui par l’enuie qu’il portoit à la gloire de cet Heros destournoit son
foudre de dessus ma teste : m’ostoit toute la peur que i’auois eu deluy.
En fin, cõme vn de mes enfãs glorieux d’auoir fait vn si bel homicide,
eust osté ce grand guerrier à la terre, ie pouuois si i’eusse osté si
meschãte que l’on s’imagine, n’auoir plus tant d’ardeur pour la Paix.

Toutesfois ie ne perdis point de cette noble flame vne seule estein
celle : ie me vis deliurée des deux plus grãds fleaux dont iamais i’aye
esté batuë sans estre iamais detachee de ce noble & ce sainct desir.

Munster le sçait, le Duc de Longueville vous l’a deub apprendre,
i’ay fait ce que i’ay peu pour finir la guerre auec luy. Mais le Cardinal
Mazarin m’a rẽdu si mal-heureuse que malgré mes souhaits & les
vœux de ce bon Prince, cette guerre bien loing d’auoir esté finie
s’est ralumée ; on m’a veuë reduitte à me deffendre malgré moy de
ce deloyal. Ce n’est pas que dans les mouuemẽs de sa Politique ambitieuse,
i’aye eu sujet de me plaindre du succez de ces noirs desseins
ils ont si peu reussi à mon desauantage que du depuis qu’il gouuerne
i’ay moins perdu que ie n’ay gaigné : mais que ie treuue ce gain vne
cruelle & vne sensible perte, puis qu’il m’a fait desesperer de iouïr

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