Anonyme [1649], L’ENTRETIEN SECRET DE MESSIEVRS DE LA COVR DE S. GERMAIN, AVEC MESSIEVRS DE LA COVR DE PARLEMENT DE PARIS. , français, latinRéférence RIM : M0_1244. Cote locale : A_3_28.
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Nabuchodonosors, des Antioches, des Attila, des Tamberlans,
& autres semblables prodiges pour punir ses Peuples. Il a permis
que vostre vigilance ordinaire se reposast, & que vostre sagesse
se donnast quelque trefue, pour permettre à cet homme
d’affliger & vexer tous les autres.

 

Et il a permis que nous ayons esprouué la verité de ses espouuentables
paroles : Immutat cor Principum Populi terræ, &
dicipit eos vt frustra incedant per inuium : Palpabunt quasi in tenehris
& non in luce, & errare cos faciet quasi ebrios. Quand Dieu
veut punir les Republiques, il change le cœur des Princes qu’il
tient en ses mains : Et pour les tromper, il leur fait quitter les
bonnes resolutions qu’ils auoient pris dans leur Conseil : Et il
les engage en des desseins dont la sortie est aussi difficile, que
l’entrée a esté perilleuse. Il frappe leur conduitte d’vn si estrange
aueuglement, qu’on les prendroit pour des hommes, qui marcheroient
dans les tenebres : Et il rend leurs actions si extraordinaires
& si extrauagantes, qu’on les pourroit attribuer à la
passion & à l’yuresse plustost qu’à la raison.

Vous le voyez & l’espreuuez maintenant, Messieurs ; mais
nous pleurons & gemissons de ce que vous auez reconnu si
tard, ce qu’il estoit necessaire de reconnoistre dés le premier
moment que ce Ministre a voulu s’introduire dans le maniement
de nos affaires. Nous souspirons de ce que vostre iuste zele
a tant tardé de venir au secours de la France ; lors que le mal
ne peut quasi plus souffrir que des remedes violens, qui sont de
seconds maux, peut-estre pires que les premiers.

Auoüons, Messieurs, que nous auons tous failly, pour auoir
voulu estre trop sages, trop ciuils, & trop moderez, pour ne pas
dire trop interessez ou trop lasches. Il est vray, l’honneur & le
respect que vous portez au Roy, & à l’authorité Royale, vous
retenoit : Mais eussiez-vous peché contre ce deuoir inuiolable,
quand vous eussiez empesche l’iniuste vsurpation de son authorité
en la personne d’vn Estranger ? Nous auons aussi peché auec
vous de l’auoir adoré & idolatré : mais ç’a esté à vostre exemple ;
& nous sommes excusables, parce qu’il faut suiure le train de la
Cour, & que nous n’auions pas le pouuoir, comme vous, de regler
son authorité.

Puisque nous auons tous failly, il est bien iuste que nous
soyons tous chastiez, & chastiez de la main de Dieu. Car asseuremens

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Anonyme [1649], L’ENTRETIEN SECRET DE MESSIEVRS DE LA COVR DE S. GERMAIN, AVEC MESSIEVRS DE LA COVR DE PARLEMENT DE PARIS. , français, latinRéférence RIM : M0_1244. Cote locale : A_3_28.