Anonyme [1652], L’ALLIANCE DES ARMES ET DES LETTRES DE MONSEIGNEVR LE PRINCE. Auec son Panegyrique, presenté à son Altesse Royale. , françaisRéférence RIM : M0_60. Cote locale : B_7_18.
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nous : Que tout le monde soit remply d’hommes armez :
Que la mer soit couuerte de vaisseaux : Qu’on nous oppose
des bestes farouches & inconnuës pourueu que tu sois auec
nous, nous serons tousiours inuincibles. C’est pourquoy vn
Grand Orateur, apres la mort du mesme Alexandre, compara
son armée au Cyclope lors qu’Vlysse l’eut aueuglé.

 

La mort d’Epaminondas qui fut tué à la bataille de Mantinée,
affoiblit tellement les forces des Thebains, qu’il sembloit
plustost qu’ils fussent tous morts auec luy. Et Plutarque
se mocque auec raison de ce Grand Capitaine, qui auoit
méprisé les auis des Sacrificateurs : Comme le Prestre le prioit
d’éuiter la mort que les entrailles des victimes luy presageoient :
Il luy respondit que le salut de Sparte n’estoit pas
compris en la vie d’vn seul homme, Response indigne d’vn si
grand Capitaine, qui à la verité quand il combattoit, qu’il
nauigeoit ou qu’il estoit simple soldat, pouuoit estre mis au
nombre d’vn seul homme, mais lors qu’il auoit la conduitte
de l’armée, il sembloit comprendre & cõtenir tous les autres.

Ie me represente icy semblable discours, Monseigneur,
dont vos Chefs vous battent les oreilles quand il se represente
occasion d’exercer vostre courage & vostre conduite
Vous auez tousiours la prompte repartie de ce sage Capitaine,
qui estant prest de donner vne bataille naualle pres d’Andrie,
& qu’on luy rapportoit que les vaisseaux ennemis estoiẽt
en plus grand nombre qu’ils n’estoient pas : Et moy (dit-il)
pour combien me contez-vous ? Aussi sçauoit il bien que la
reputation d’vn Heros tel que vous, est redoutée de l’ennemy :
que la multitude ne l’estonne point, & qu’il ne voit jamais
le visage de la peur que sur les espaules de ses ennemis.

Ce n’est pas l’office d’vn bon Capitaine de se precipiter
tous les jours aux perils, & aux hazards de la guerre, comment
pourroit-il porter les yeux par tout, & enuoyer du secours
à ceux qui en ont besoin s’il fait l’office du soldat, & s’il
est tousiours exposé à la mort de laquelle dépend la victoire
de son ennemy. C’est aussi la raison pour la quelle il doit commettre
la charge des occasions de peu de consequence à ses

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