Anonyme [1652], LETTRE RENDVË AV ROY EN PARTICVLIER, Pour luy representer les dangers ausquels les Princes exposent leurs Estats en poussant à bout la patience de leurs Peuples. Prouué par les Exemples tirez des Histoires Anciennes & Modernes, Estrangeres & Domestiques. , français, latinRéférence RIM : M0_2254. Cote locale : B_2_34.
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abuser de la grandeur de ma puissance ; ie n’ay pas cru que
ce me fust assez de vouloir vne chose pour la rendre juste,
mais ay traitté mes sujets auec le plus de douceur qu’il m’a
esté possible. C’est ainsi que parlent les bons Roys : ie veux
dire ceux qui ne permettent pas qu’on leur souffle perpetuellement
aux oreilles, qu’ils peuuent tout, & que c’est ne
pas sçauoir ce que vaut vn Sceptre, comme fit autrefois Neron,
que de ne pas faire tout ce que l’on veut, soit que cette
volonté soit iuste, soit quelle ne le soit pas, Crudelia,
pourtant, & superba imperia acerba magis quam diuturna esse
solent ; c’est vne belle leçon que Saluste fait aux Roys. Ie
m’asseure que des Princes semblables à des Artaxerxes, des
Theopompus & des Othons ; & pour ne point sortir de
chez nous, semblables à des S. Louys, des Louys XII &
des Henris IV. ne croiront point que ce fut resister à leur
authorité, si vn Parlement leur remontroit que leur volonté
ne seroit pas bien iuste en quelque chose ? les Roys doiuent
bien s’imaginer qu’ils sont hommes, & par consequent
sujets à faillir. He ! pourquoy, Sire, ont-ils des Parlemens,
sinon pour les conseiller ce qui est à faire, & les destourner
de ce qu’ils ne doiuent pas faire. Chacun sçait que les Loix
ciuiles mesmes, veulent qu’on n’obeїssent point au Prince,
quand il commande quelque meurtre injuste, sinon trente
iours apres le commandement fait : pourquoy cela ie vous
prie ? sinon afin que cependant les preuenus ou leurs amis,
ou plustost les Magistrats puissent remontrer au Prince les
raisons d’innocence de ces preuenus, & que pendant les
trente iours le Prince puisse rasseoir sa colere & entendre
raison. Et parce que la loy faite pour cela par les Empereurs
Gratian, Valerian, & Theodose, est bien remarquable :
i’ay trouué à propos de vous l’inserer icy. Si il arriue d’oresnauant,
disent-ils, que nous commandions quelque rigoureuse
vengeance, contre nostre coustume, sur quelques
preuenus, nous ne voulons point qu’ils souffrent la peine
sur le champ, ny que nostre mandement soit si tost executé,
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Anonyme [1652], LETTRE RENDVË AV ROY EN PARTICVLIER, Pour luy representer les dangers ausquels les Princes exposent leurs Estats en poussant à bout la patience de leurs Peuples. Prouué par les Exemples tirez des Histoires Anciennes & Modernes, Estrangeres & Domestiques. , français, latinRéférence RIM : M0_2254. Cote locale : B_2_34.