Anonyme [1649], LE THEOLOGIEN D’ESTAT, A LA REYNE. POVR FAIRE DESBOVCHER PARIS. , français, latinRéférence RIM : M0_3770. Cote locale : C_10_29.
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sont eschapées, ne seroit-il pas bien seant à vostre dignité, à
vostre sexe, & aux bienfaits que vous auez receus de Dieu, de les effacer
plustost par misericorde, que les punir par iustice ? MADAME, le Dieu
que vous adorez & que vous deuez representer sur le Thrône, est misericordieux
iusques aux enfers : Et vous voulez chastier sur la terre des
pechez, ou de surprise ou de saillie, qui sont (comme il est croyable) pardonnez
dans le Ciel. Ne craignez point que la clemence rende vostre
Sceptre plus foible. Mais craignez plustost que la rigueur ne le rompe.

 

A Dieu ne plaise que la passion d’vn cœur irrité, vous fasse exposer le
patrimoine de Charlemagne & de S. Louys, hazarder l’œuure de douze
siecles, & de soixante & quatre Roys, au mespris des Peuples, qui en verroient
les foiblesses, & au pillage des estrangers, qui en enuient la dépoüille.
A Dieu ne plaise que vous leuiez les sacrées barrieres qui maintiennent
les Estats, faisant tenir presque pour perdu, tout ce qu’on a
monstré se pouuoir perdre.

Prenez pitié de vous mesme, MADAME, si vous n’auez point compassion
de nous ; prenez pitié du Roy vostre fils ce Dieu donné, à qui
vous deuez plustost laisser l’amour des Peuples en partage, que la vengeance
des iniures d’vn Estranger. Ce n’est point vn petit nombre de factieux
qui causent ces remuemens, comme on pense faire croire à Vostre
Majesté. Les Princes & les Grands ont leué l’estendart, les Parlemens
sont declarez pour le bien public ; les Prouinces sousleuées, & les Villes
armées, les Peuples irritez contre le Gouuernement. Ce n’est point la
main d’vn homme qui fait ces grandes operations, c’est celle de Dieu, qui
vient pour punir nos pechez. Tout vostre Royaume est en feu, & vous
feignez de distiller vne goutte de rosée pour l’esteindre.

Sortez, MADAME, de ces confusions d’esprit. R’allumez ces flâmes
eclipsées de vostre charité, que nous auons tant de fois admirée en
V. M. Faites remonter les vertus sur le Thrône auec vous, & reprenez vn
cœur de Mere enuers vos Peuples affligez. Il y a long-temps que Dieu
vous poursuit, & tend à vostre obeyssance les mesmes bras qu’il a estendu
sur la Croix. Ne le mesprisez point, MADAME, & vous souuenez tous
les iours de ce iour redoutable, qui vous fera paroistre deuãt son Thrône,
despoüillée de tous les ornemens de cette fresle gloire qui vous enuironne :
où n’ayant plus que le bien & le mal que vous aurez fait à vos costez ;
faites ce que vous voudriez auoir fait pour lors, & iugez vos Peuples,
comme vous desirez estre iugée de Dieu. Faites vostre merite de l’occasion
presente, pour en faire nos felicitez, & Dieu en fera vostre gloire.

FIN.

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Anonyme [1649], LE THEOLOGIEN D’ESTAT, A LA REYNE. POVR FAIRE DESBOVCHER PARIS. , français, latinRéférence RIM : M0_3770. Cote locale : C_10_29.