Anonyme [1649], LE POLITIQVE CHRESTIEN. DE S. GERMAIN. A LA REYNE. , françaisRéférence RIM : M0_2811. Cote locale : C_6_59.
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forces, elle deuint furieuse, pour s’armer elle mesme contre
elle-mesme : afin d’executer en vn mois de furie, ce que ses
ennemis n’auoient pû faire par les guerres de tant d’annees.
Il falloit que le bourgeois, prist les armes contre le bourgeois,
l’amy contre l’amy, le frere contre le frere : Il falloit en vn coup
de fougue, faire des rauages qui cousteront les regrets de
plus d’vn siecle, & qui seront peut-estre irreparables.

 

Il falloit en fin, qu’apres auoir esté le suiet de la ialousie de
ses plus cruels aduersaires, elle deuint celuy de leur compassion ;
Et il falloit que ces mal-heurs luy arriuassent dans vne
saison qui luy faisoit voir les reuolutions de la Catalogne, les
changemens du Portugal, les sousleuemens de Naples, les attentats
de Constantinople, les horreurs de l’Angleterre, les
Iugemens de Dieu sur les testes couronnees, aussi bien que sur
leurs vassaux.

Il falloit que tout cela arriuast, MADAME, pour nous
aprendre de force, ce que iamais on n’auoit pû nous persuader
par raison : que la Iustice & la Pieté sont les deux Colomnes
des Republiques, qui les conseruent autant qu’elles y sont
conseruées.

L’Escriture saincte, qui est le liure de la vraye Police, que
vostre grand ayeul Charle-quint lisoit tous les iours, & que les
Ministres d’Estat deuroient tousiours auoir, & dans le cœur &
dans la main, ne dit rien plus souuent que cette verité. Iamais
le Peuple de Dieu ne manquoit d’estre accueilly de quelque
insigne mal-heur, quand il auoit commis quelque notable
impieté. Son bon-heur ne duroit pas plus que sa vertu ; la
fin de l’vn estoit celle de l’autre. Dieu l’abandonnoit incontinent
qu’il s’estoit abandonné à l’impieté ; Et sa Iustice qui leur
auoit promis vne felicité proportionnée à leur merite, estoit
tres-exacte à leur enuoyer des chastimens proportionnez à
leurs fautes.

Les Royaumes de Iuda & d’Israël, furent destruits comme
le sel ietté dans l’eau ; incontinent qu’ils destruisirent parmy
eux le seruice de Dieu. Toutes les Monarchies de l’Vniuers
ont esprouué vn sort pareil, quãd elles sont tombées en pareilles
impietez. Quand les Assyriens furent subiuguez par leurs
voluptez & leurs delices, ils le furent aussi par les Chaldeẽs &
les Medes. Incontinent que l’Empire de Babylone diminua en
vertu, il diminua aussi en puissance. Les Perses ne se ietterent

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Anonyme [1649], LE POLITIQVE CHRESTIEN. DE S. GERMAIN. A LA REYNE. , françaisRéférence RIM : M0_2811. Cote locale : C_6_59.