Anonyme [1649], LE CINQVIESME BABILLARD DV TEMPS EN VERS BVRLESQVES. , françaisRéférence RIM : M0_556. Cote locale : C_2_15_5.
Section précédent(e)

LE CINQVIESME
BABILLARD
DV
TEMPS
EN VERS
BVRLESQVES.

A PARIS,
Chez NICOLAS DE LA VIGNE,
prés Sainct Hilaire.

M. DC. XLIX.

AVEC PERMISSION.

-- 2 --

-- 3 --

LE CINQVIESME
BABILLARD
DV
TEMPS
EN VERS
BVRLESQVES.

 


COVRAGE, il nous faut cajoller,
Et mieux que iamais babiller,
Et icy chanter & dire,
Que quasi hors de martyre
Nous croyons estre asseurement,
Voyant vn si bon changement,
Malgré le mal-heureux langage
De ceux qui ont dict que les passages
Estoient bouchez des ennemis,
Ceux la ne nous estoient amis
Qui venoient dire ces nouuelles,

-- 4 --


Qui n’estoient ny bonnes ny belles :
Mais sçauez vous bien qui c’estoit
Qui ces comptes nous raportoit,
Ce sont de ces Monopoleurs,
De ces Larrons, de ces Volleurs,
Qui desireroient que la Ville,
Hommes, garçons, femmes & fille
Fussent peris de dans vn feu.
Voyla leur priere & leur vœu :
Mais mal gré eux & leurs audace,
Le bon Dieu nous fera la grace
De vaincre ceux qui veulent mal
A Paris, & le Cardinal
Pour certain a beau faire & dire,
Il faut qu’il meure en martyre,
Ainsi le dict Nostradamus,
Et le Grand Polyphemus
Dans trois on quatre Centuries,
Et ie croy bien que les furies
Son ame bourelent desia
Bien plus que ne fait Margaja.
Il faut reprendre mon discours,
Ce n’est pas pour parler d’amours,
C’est pour vous faire icy entendre
Que les Boulangers sans attendre
Sont fournis de bleds & fromens
Pour vous faire de bons pains blancs,
Que l’on vendra à bon marché,
De cecy aucun n’est fasché,
Il y a beaucoup de mes amis
Qui sont las de manger pain bis :
Mais à present doresnauant
Il en pourront manger de blanc,
L’on en voit dessus la Boutique,
I’estime fort ceste praticque,
Foy de veritable François,

-- 5 --


Ie voudrois qu’à tout iamais
Il fust ainsi doresnauant,
Pour soulager les pauures gens.
A propos les petits enfans
Se resioüiront maintenant
Les Paticiers font des gateaux,
Des grands, des petits & des beaux :
Comme ils auoient accoustumé,
Cela est bien a estimer :
Car il y abien quinze iours
Que les gasteaux n’ont plus de cours,
Cecy sont des discours d’enfans,
Disons des propos plus eloquans,
Parlons du Prince de Conty,
Qui de valeur est assorty,
De beauté & de bonne grace
Autant que Prince sans falace.
Tous les iours il va aux trauaux
Auec les autres Generaux,
Où il met tous ses gens en ordre,
Ne permettant aucun desordre,
Fait trauailler fort promptement,
Aux lignes & aux retranchements,
Pour empescher aux ennemis
De faire ce qu’ils ont promis,
A ce Diable de Cardinal
Qui est pire qu’vn cheual,
Puis qu’il ne veut pas reconnoistre
Ceux qui ont causé qu’il est Maistre,
Dont pour luy auoir fait honneur
Ils en sont presque à malheur :
Mais parauant quinze Dimanches
Ils en pourront tirer reuanche :
Car nostre armée est bien complete
D’infanterie belle & leste,
Mesme sans faire brauerie,

-- 6 --


Nous auons belle caualerie,
Lesquels sont tous bien montez,
Enharnachez & esquipez,
D’ou la Ville en est bien contente :
Mais nos ennemis l’espouuante
Ont prise, sçauez-vous comment,
On leur a mandé vrayement
Que ce Grand Archiduc Guillaume,
Autrement Leopold se nomme,
Vient auec quantité de gens,
Vvalons, Crauates & Allemans,
Qui ont iuré, chose asseurée
De bien-tost reduire en fumée
Le Cardinal, si desormais
Bien-tost ne veut faire la Paix,
Et desia leur armée auance,
Puis qu’ils sont entrez dans la France,
Sans faire aucune hostilité,
Dont chacun est bien contenté,
Mesme il a mandé vne lettre
A Madmoiselle, sans obmettre,
La suppliant qu’à ceste fois
Elle se porta pour la Paix,
Et qu’elle fit tout son pouuoir,
Mettre la Reyne à son deuoir,
L’on dit qu’elle y est bien portée,
Et le bruit & la renommée
Court que la Reine vrayement
Demande accommodement.
D’autre ont dict que de Condé
Desire ce iour sans tarder,
Que l’on veille liurer bataille.
Si cela se fait, toute sa canaille
Pourra bien quitter l’ornement,
Les bagues & demy seings d’argent
Qu’ils ont pris à ces pauures femmes,

-- 7 --


N’est-ce pas pour eux vn grand blasme,
De passer plutost pour voleurs
Que non pas pour des gens de cœur
Car ils ont pillié les Eglises
Et mis les hommes en chemise
Sans auoir aucune pitié,
Estant pires plus de moitié
Que ne seroit pas le Tartare,
Le Ture, Sarazin & barbare,
Mais voicy leur chastiment
Qui aproche certainement
Car pour vray le Duc de Longueuille
A vne armée bien gentille
Qui est logée à ce iour
A Roüen dedans le fauxbourg,
Et ils s’en vont prendre leur marche
A tirer iusque au Pont de l’Arche
Pour s’assembler ce me dit on
Auec Monsieur de Matignon.
Cependant au pays du Maine
On si arme chose certaine,
Et les petits & les grands
Les gens de mestier & Marchands
Y veulent tous chose asseurée
Ce iour composer vne armée :
Bref desia plus de huict mille
D’humeur tres-gaillarde & gentille
Ont promis que le Mazarin
Poura, bien passer par leur main,
S’il y passe qu’il prenne garde
A ce bien fournir de Moutarde,
Car ils ont tres-bien de la chair,
Que l’on n’achette pas trop cher
Ca, ça, quitons la Normandie,
Faut à present que ie vous die
Qu’à ce coup deuers Bordeaux

-- 8 --


On arme hommes & Cheuaux
Pour & au nom de la Commune
Promptement tanter la fortune,
Et ont iuré par leur serment
Qu’ils seront pour le Parlement,
Comment disent-t’ils de courage
Soufrirons nous qu’on face outrage
Au plus illustre Parlement
Qui soit dessous le firmament,
Nenny nenny ie vous asseure
Qu’aucun de nous ne se pariure,
Nous sommes tous prests de mourir,
Et le parlement secourir.
Voila comme chacun se porte
A nous defendre de la sorte
Nous en deuons tous en ce lieu
Bien humblement remercier Dieu.

 

FIN.

Section précédent(e)


Anonyme [1649], LE CINQVIESME BABILLARD DV TEMPS EN VERS BVRLESQVES. , françaisRéférence RIM : M0_556. Cote locale : C_2_15_5.