Anonyme [1652], LA VERITÉ PRONONÇANT SES ORACLES sans flatterie. I. Sur la Reyne: II. Sur le Roy. III. Sur le Duc d’Orleans: IV. Sur le P. de Condé. V. Sur le Parlement: VI. Sur le Duc de Beaufort. VII. Sur le Coadjuteur: VIII. Sur le Parlement de Pontoise. IX. Sur Paris: Et sur l’Estat. , françaisRéférence RIM : M0_3998. Cote locale : B_17_18.
Sub2Sect précédent(e)

Sub2Sect suivant(e)

LE PARLEMENT DE PONTOISE.

Il me semble que le Parlement de Pontoise n’a
esté estably que pour nous donner vn subiet de rire

-- 34 --

parmy tant de subiets de pleurer : Les vns l’appellent
vn Caprice d’Estat, les autres le nomment la derniere
crise de la Politique Mazarine : Quelques vns
l’intitulent la Iustice sans bandeau Il en est beaucoup
qui disent que cet le parlement Courtisan, tout le
monde conclut que c’est l’Areopage des Transfuges
& les deserteurs de leur legitime milice.

 

Cependant ce parlement pretendu le porte bien
haut, il iustifie Mazarin, il casse les Arrests du Parlement
de Paris, ce qui ne se fait iamais, car vn parlement
n’a point de pouuoir de casser les Arrests
d’vn autre sans attentat puis qu’ils sont tous deux
Souuerains. Mais que faut il donc dire pour parler
sincerement de ce Parlement pretendu, il faut dire
que c’est la plus baute folie que Mazarin & les Mazarins
ait iamais fait. Il faut dire que le Mazarin pour
se iustifier a fait vn parlement à sa façon, tout composé
de pieces rapportées, de Mareschaux, de Gouuerneurs,
de Maistres des Requestes, de Capitaines,
de Courtisans, d’Intendans & d’autres personnes de
cette nature. Il faut dire que Mazarin à son ordinaire
veut chicanner dans la Politique ; car, à bien parler,
ce Parlement n’est autre chose qu’vne pure chicanne
d’Estat, qui ne seruira qu’à mesler les affaires
pour donner de la peine à ceux qui les voudront demesler.

Mais combien de temps durera-t’il ? Tout autant
que les guerres ciuilles : c’est l’enfant de la guerre
qui ne peut viure qu’autant que sa mere, & qui doit
mourir auec elle. C’est vn tres mauuais signe de ce
qu’il vaut ; car à tout rompre on ne peut dire autre
chose de luy, si ce n’est qu’il faut regler sa valeur à
celle de sa mere, la mere est vne seditieuse, vne
parricide, vne insolente, vne denaturee, le fils tenant

-- 35 --

de la mere est donc vn seditieux, vn parricide,
vn insolent & vn desnaturé, Voila vn pauure baptesme.

 

Parlons auec moins d’aigreur du transport du
Parlement qu’on pretend estre fait de Paris à Pontoise
est il legitime ? est il conforme aux loix est-il
pour le bien de l’Estat, si le transport a ces qualitez il
est bon, s’il ne les a pas il ne vaut rien, car la bonté
de ce qui se fait dans l’Estat ne se doit considerer que
dans le bien qu’elle cause à l’Estat.

Le transport d’vn Parlement ne peut estre fait que
par Declaration du Roy, cette declaration doit estre
receuë & verifiee dans ce mesme Parlement. Cette
circonstance qui est essentielle a esté obmise, car le
Parlement de Pontoise a esté esclos comme vn potiron
dans vne nuict, & l’on a plutost entendu ses
Arrests que son establissement. Que faut-il donc
dire, si ce n’est que les transfuges du Parlement de
Paris se sont lassez de ne iuger point, & qu’ils ont fait
esperer au Mazarin que s il vouloit leur faire donner
vne apparence d’authorité dans Pontoise, on les entendroit
si souuent fulminer en sa faueur, que du
bruit qu’ils feroient ils en estonneroient pour le
moins les simples.

Le transport d’vn Parlement est vn affaire d’Estat,
qui ne se peut conclurre en France que par le Roy &
par son conseil, si le Roy l’a voulu ie m’en rapporte,
ie sçay bien que son conseil n’en a point esté d’aduis,
car son conseil legitime qui sont ses Princes du Sang
est icy, & ie suis bien asseure que son sentiment n’est
pas que le Parlement soit à Pontoise.

Le transport d’vn Parlement ne se doit iamais faire
que pour le bien de l’Estat, comme son establissement
ne doit iamais auoir que cette mesme fin.

-- 36 --

Qui ne voit que ce parlement estant à Pontoise,
n’auroit point aucune liberté, & que la foiblesse du
lieu dont l’ennemy declaré de l’Estat est le maistre,
l’obligeroit de se rendre complaisant à tous ses pernicieux
desseins. Cela se pourroit-il sans exposer le
repos public.

 

Enfin ce transport de Parlement n’a rien de plus
considerable que son aueuglement & son iniustice.
Il est fait par vn Roy qui n’est declaré majeur que
par Politique, il est fait par l’aduis d’vn conseil bastard
& illegitime, qui n’aura de pouuoir que pendant
qu’il sera armé. Il est fait pour iustifier les maluersations
d’vn mauuais Ministre, & les attentats de
l’ennemy de l’Estat. Il est fait pour prolonger la
guerre & pour faire naistre de nouuelles difficultez
dans l’accommodement. Il est fait au preiudice des
droicts & des priuileges de tous les Parlements. Il
est fait sans autre necessité que celle de sauuer vn
ennemy que tous les François veulent perdre. Celuy
qui a composé le Parlement Burlesque le depeint
comme il faut, que le Lecteur y contente sa curiosité.

Sub2Sect précédent(e)

Sub2Sect suivant(e)


Anonyme [1652], LA VERITÉ PRONONÇANT SES ORACLES sans flatterie. I. Sur la Reyne: II. Sur le Roy. III. Sur le Duc d’Orleans: IV. Sur le P. de Condé. V. Sur le Parlement: VI. Sur le Duc de Beaufort. VII. Sur le Coadjuteur: VIII. Sur le Parlement de Pontoise. IX. Sur Paris: Et sur l’Estat. , françaisRéférence RIM : M0_3998. Cote locale : B_17_18.