Louis (XIV), Phélippeaux [signé] [1650], DECLARATION DV ROY, Accordée pour la pacification des troubles de Bordeaux, Du 1. Octobre 1650. à Bourg sur la mer. , françaisRéférence RIM : M0_903. Cote locale : B_2_26.
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DECLARATION
DV ROY,
Accordée pour la pacification des
troubles de Bordeaux,

Du 1. Octobre 1650. à Bourg sur la mer.

A PARIS,
Par les Imprimeurs & libraires ordinaires
du Roy.

M. DC. L.

Auec Priuilege de sa Maiesté.

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DECLARATION
DV ROY,
Accordée pour la pacification des troubles
de Bordeaux.

LOVIS PAR LA GRACE DE
DIEV ROY DE FRANCE ET
DE NAVARRE, A tous ceux qui
ces presentes Lettres verront, salut.
L’experience a fait voir depuis
quelque temps, que rien n’a donné tant d’audace
à nos Ennemis, pour leur faire refuser vne
Paix raisonnable, que nous leur auons fait offrir,
& qu’ils eussent enfin esté contraints d’accepter,
que les troubles, qui ont esté excitez en
quelques endroits de nostre Royaume. Il n’y a
point de doute qu’ils n’en ayent esté les secrets
& principaux autheurs, par le moyen de leurs
Emissaires & partisans, & par les impostures &
fausses impressions, dont ils ont tasché sans cesse

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de remplir les esprits de nos peuples, pour les
partager en diuerses factions, & les animer les
vns contre les autres. De nostre part nous n’auons
rien obmis de tout ce qui a esté en nostre
pouuoir, pour preuenir vn si dangereux mal
auant sa naissance, & pour le faire cesser promptement
aux lieux où il a paru. Chacun a pû
connoistre aussi, que tandis que nous auons pû
conseruer nos forces toutes vnies, pour agir au
dehors, & que nous n’auons point esté obligez
d’employer vne partie pour appaiser les mouuemens
du dedans ; Dieu nous a fait la grace auec
l’assistance de nostre genereuse Noblesse, &
de nos autres fideles sujets & seruiteurs, qui sont
employez dans nos armées, de soustenir glorieusement
& auec auantage les droits de nostre
Couronne, & l’honneur de la Nation qu’il
a soûmise à nostre obeïssance. Contre toutes les
puissances estrangeres. On a veu toutes les années
le siege de la guerre estably dans le pays de
ceux qui n’ont pas voulu se porter à la raison ;
& nos Estats ayans esté garantis de toute sorte
d’inuasions, ont esté presque les seuls de l’Europe,
pendant le cours des hostilitez dont elle est
agitée, qui ont joüy d’vne espece de calme au
milieu de l’orage public. Mais depuis que l’artifice
de nos Ennemis est deuenu assez heureux

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pour seduire & attirer dans le Party quelques vns
de nos suiets, qui non contens d’auoir trauaillé par
diuerses pratiques à allumer le feu de la reuolte en
plusieurs Prouinces de nostre Royaume, se sont
rendus eux-mesmes les conducteurs de nos plus
obstinez ennemis, pour leur faciliter les moyens
de rauager nos Frontieres, & d’y faire des progrez.
Nous auons veu auec vn extréme desplaisir les Espagnols,
enflez par l’esperance de profiter des desordres
qu’il croyoit auoir excitez dans nostre
Estat, non seulement reietter les conditions de
paix qu’ils auoient cy-deuant eux-mesmes proposées
ou accordées ; mais ne faire pas scrupule de
rompre toute sorte d’assemblées & de negociations
pour la traitter & la conclurre. Cette consideration
nous a conuiez de redoubler nos soins
pour calmer promptement tous les troubles de
nostre Royaume, afin de paruenir plus facilement
aux moyens de calmer aussi tous ceux de la
Chrestienté : ç’a esté pour en venir à bout, que
pendant les rigueurs de l’Hyuer nous auons entrepris
les voyages de Normandie & de Bourgogne,
afin d’affermir par nostre presence le repos
de nos peuples dans ces deux Prouinces, &
empescher l’effet des menées & cabales, qu’on y
auoit faites pour les ietter dans la desobeïssance.

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Nous n’auons pas eu peine en ces occasions de
nous resoudre à preferer les voyes de la douceur
& du pardon à celles des armes ou de la Iustice,
lors que nous auons fait reflexion que le sang qui
eust esté respandu d’vne façon ou d’autre, estoit
celuy de nos suiets, que nous auons interest &
intention de conseruer comme le nostre, n’ayant
pas moins d’amour & de tendresse pour eux que
s’ils estoient nos propres enfans. Lors qu’ils se sont
esloignez de leur deuoir, nous nous sommes contentez
de les y ramener par des effets de bonté, en
leur faisant seulement connoistre que nous estions
en estat de les y contraindre par ceux de nostre
puissance, lesquels nous nous sommes reseruez de
faire sentir à nos Ennemis, aprés auoir consideré
qu’on ne peut gagner des victoires sur des suiets,
sans perdre beaucoup. Autant de fois que les nostre
ce sont mis en chemin de se ruïner par quelque
entreprise faite contre nostre authorité,
nous auons mieux aymé nous vaincre nous-mesmes
pour les sauuer, que de tirer raison par la force
des offenses qu’ils nous auoient faite : dés qu’ils
nous ont témoigné vn veritable repentir de leurs
fautes, nous les auons de bon cœur oubliées, pour
peu que nous ayons pû auoir d’asseurance qu’ils
n’y retomberoient plus, & que la grace qu’ils receuoient
de nous, ne seroit point preiudiciable au

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reste de nostre Estat. Les mouuemens suruenus en
nostre ville de Bordeaux pendant les deux dernieres
années, nous ont donné lieu de faire éclater
en faueur des Habitans de ladite ville, l’affection
paternelle que nous auons pour tous nos suiets :
Aprés auoir desia appaisé ceux de l’année 1649. par
nostre Declaration & articles du 26. Decembre
dernier, registrée le 7. Ianuier 1650. nous auons encore
resolu de faire cesser auec la mesme bonté,
ceux de l’année presente, en esteignant & assoupissant
la memoire de tout ce qui peut auoir esté fait
ou entrepris depuis le iour de ladite Declaration
iusques à present. A CES CAVSES, aprés que nostre
Cour de Parlement, & les Habitans de nostre
ville de Bordeaux, nous ont rendu toutes les
sousmissions & obeïssances que nous auons desiré
d’eux, auec les asseurances de leur fidelité à nostre
seruice : De l’aduis de la Reyne Regente nostre
tres-honnorée Dame & Mere, de nostre tres-cher
& tres-amé Oncle le Duc d’Orleans, de plusieurs
Princes, Ducs & Pairs, Officiers de nostre Couronne,
& autres grands & notables personnages
de nostre Conseil, de nostre certaine science, pleine
puissance & authorité Royale, nous auons dit
& declaré, disons & declarons par ces presentes signées
de nostre main, voulons & nous plaist
qu’Amnistie generale soit accordée, comme

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nous l’accordons dés à present, à tous les Habitans
de nostredite ville de Bordeaux, de quelque
qualité & condition qu’ils soient ; comme aussi
à nostre Cousin le Duc & Mareschal de la Force,
les Marquis de la Force, de Castelmoron, & de
Cugnac ses enfans, de tout ce qui a esté fait, entrepris
ou negocié depuis nostredite Declaration
du 26. Decembre dernier, soit qu’ils ayent fait ligues,
vnions, associations, leuées ou enroollemens
de gens de guerre, sans nos Commissions,
Prises de deniers publics ou particuliers, ordonné
des impositions sans nostre permission, fait
des fortifications nouuelles, occupé des Places,
Chasteaux ou Passages, & generalement pour
tout ce qui a esté fait & commis à l’occasion desdits
mouuemens : Ensuite dequoy nous voulons
& entendons, que tous les dessusdits, de quelque
qualité & condition qu’ils soient, sans nul reseruer
ou excepter, soient conseruez en tous leurs biens,
priuileges, honneurs, dignitez, preeminences,
prerogatiues, charges, offices & benefices, en
tel & pareil estat qu’ils estoient auant ladite prise
d’armes, nonobstant toutes Declarations, Lettres
de cachet, Arrests ou Iugemens publiez ou donnez
au contraire, lesquels demeureront nuls, &
de nul effet.

 

En consequence de ladite Amnistie, nostre

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Cousine la Princesse de Condé pourra se retirer auec
nostre Cousin le Duc d’Enguy en son fils, auec leurs
trains composez de leurs Officiers domestiques, &
de ceux de nostre cousin le Prince de Condé, en l’vne
de ses Maisons d’Anjou ; où elle pourra demeurer en
toute liberté & seureté, & jouïr de tous ses biens &
reuenus, ensemble de ceux de nostredit cousin le Prince
de Condé son mary, par les mains de ceux qui y
ont esté par luy cy-deuant commis & agreez par nous ;
& mainleuée des meubles & immeubles si aucũs ont
esté par nous saisis, à condition de demeurer cy apres
dans la fidelité & obeïssance qu’ils nous doiuent, &
de renoncer à toutes vnions, ligues, associations & pratiques
où ils pourroient estre cy-deuant entrez tant
dedans que dehors nostre Royaume, dont nostre cousine
donnera sa Declaration par escrit : En suitte dequoy
elle fournira les ordres necessaires, pour faire
cesser à l’auenir tous les actes d’hostilitez qui s’exercent
sous son nom, & de celuy de nostredit cousin son
fils, dans leurs terres ou ailleurs, en la prouince de
Berry, Vicomté de Turenne, & autres prouinces deçà
Loire ; & pour faire retirer les garnisons qu’ils ont
establies en diuerses places ou chasteaux qui ont esté
occupez, lesquels seront remis en nostre disposition,
pour estre ordonné touchant la garde & conseruation
d’iceux, ce que nous jugerons à propos pour nostre
seruice, & pour asseurer le bien de nos sujets, si mieux

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elle n’ayme d’aller à Mouron, à condition de reduire
la Garnison à deux cens hommes de pied, & cinquante
gardes à cheual, qui seront entretenus à nos dépens,
sur la recepte generale de Berry, en donnant les seuretez
necessaires ; Que ladite Garnison ny lesdites Gardes
ne ferõt aucun Acte d’hostilité ; Moyennãt quoy ceux
qui sont à present dans ledit lieu de Mouron, & dans
les autres chasteaux de Berry & Bourbonnois appartenans
à nostredit Cousin le Prince de Condé, & autres
occupez par ses ordres, en les remettant dans le mesme
estat qu’ils estoient auant les mouuemens, jouïront de
l’Amnistie generale, & seront remis en leurs biens,
dignitez & charges ; en faisant par eux les mesmes Declarations
que dessus : Et en consequence tous prisonniers
de guerre seront rendus de part & d’autre, & les
cheuaux occupez par nos armes appartenans à nostredit
Cousin le Prince de Condé, & cousine sa femme,
seront pareillement remis au mesme estat qu’ils estoient.

 

Les Ducs de Boüillon & de la Rochefoucault,
les Marquis de Sauuebœuf, de Sillery, & de Lusignan,
Mazerolles, Batz, Fanget, la Mothe de Bats,
la Borde, & tous autres Seigneurs, Gentilshommes,
Officiers, Soldats, ou Habitans de nostredite Ville
de Bordeaux de quelque condition & qualité qu’ils
soient, sans aucun excepter, qui ont prins ou porté
les Armes pour ladite Ville, pris part ausdits mouuemens,

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mesmes ceux qui ont esté cy-deuant à Bellegarde,
traité ou negocié auec les Espagnols, ou autres
étrangers, fait ligues vnions ou associations, tant
dedans que dehors nostre Royaume, en connoissance
ou participatiõ desdits traitez, negociations ou
ligues pendant les mouuemens de la presente année
& les precedentes, ioüiront de ladite Amnistie, à la
charge de demeurer cy apres dãs la fidelité & obeïssãce
qu’ils nous doiuẽt, & de renoncer ausdits traités,
ligues, vnions, & associations, & moyennant ce, ils
seront remis en la possession & joüissance de leurs
charges, biens & dignités dont ils joüissoiẽt au iour
que nostredite Cousine la Princesse de Condé est
partie de Mouron, sans mesmes qu’ils puissent estre
inquietez ny recherchez en leurs personnes, ny en
leursdits biens, dont main-leuée leur est faite à
nostre égard pour ce qu’ils pourront auoir commis
ou entrepris auparauãt depuis le 18. Ianuier dernier,
à condition neanmoins que les nouuelles fortifications
qui ont esté faites à Turenne, S. Cleré, Luneuil
& autres lieux qui leur appartiennent, seront razées,
& que les garnisons qui y ont esté establies en
seront ostées. Ce qui sera executé incessamment en
presence de ceux qui seront par nous commis pour
le faire faire.

 

Aussi tost que la presente Declaration aura esté
publiée ; Nous voulons & entendons que tous nos

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sujets de ladite Ville & tous autres qui sont presentemẽt
en icelle, posent les Armes, auec deffences de
les reprendre cy-apres pour quelque cause & pretexte
que se puisse estre, sans nostre commandement
exprés, ou de ceux qui auront pouuoir de
nous de le leur ordonner.

 

Tous les gens de guerre estrangers ou de ladite
Ville qui ont esté leuez par les ordres de nostredite
Cousine la Princesse de Condé, de nostre Cousin le
Duc d’Enguien son fils, du Parlement, ou Ville de
Bordeaux, ou par ceux des Ducs de Boüillõ, ou de la
Rochefoucault seront licentiez incontinent apres
la publication de la presente Declaration, & les Officiers
& Soldats qui sont à present dans ladite Ville
en sortiront incessamment pour se retirer en leurs
maisons, apres auoir fait les declarations & sermens
que dessus à l’égard des Officiers seulement, & leur
seront donnez les passe-ports & sauf-conduits necessaires
pour la seureté de leur retraite, mesmes
ausdits Marquis de Sauue-bœuf, & de Sillery, Mazerolles,
Bats, Fanget, la Lãde, la Borde & autres qui
sont en Espagne ou ailleurs, pour reuenir en France
auec leurs domestiques, train & équipage, &
iouyr de leurs biens, charges, & dignitez, sans que
toutesfois lesdits gens de Guerre puissent se retirer
en trouppes qui excedent le nombre de vingt Maistres,
ny rien prendre sur nos sujets, sans payer

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aux lieux où ils passeront.

 

Tous prisonniers de Guerre & autres faits depuis
ledit temps à l’occasion desdits mouuemens seront
mis en liberté au iour de la publication de la presente
Declaration.

Tous Arrests & Iugemens donnez, ou resolutions
prises depuis le iour de laditte Declaration, du
vingt sixiéme Decembre dernier : Et Arrest d’enregistrement
iusques à present, pour raison desdits
mouuemens, ou des differens qui les ont causez,
contre nostre tres-cher & bien-Amé Oncle le Duc
d’Espernon, ses Officiers & domestiques, par coutumace
ou autrement, contre le feu General de la
Valette, ou autres qui ont commandé nos troupes,
serui en icelles, ou en quelqu’autre maniere que ce
soit, excepté nos ordres & commandemens dans
laditte Prouince de Guyenne, tant nos Officiers
qu’autres qui peuuent y auoir esté employez de
quelque façon que ce puisse estre, au preiudice d’icelles
personnes, biens, honneurs, droits, dignitez,
charges, prerogatiues ou priuileges ; comme pareillement
toutes Ordonnances dudit Duc d’Espernon
demeureront nulles, & de nul effet, sans que de tout
le contenu en iceux il puisse estre fait à present, ny
à l’aduenir aucune poursuitte ny recherche.

Tout ce qui aura esté pris & enleué par les gens de
Guerre de mer, ou de terre, à la reserue des armes &

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cheuaux sera rendu aux proprietaires. SI DONNONS
en mandement à nos Amez & feaux Conseillers les
Gens tenans nostre Cour de Parlement de Bordeaux,
que ces presentes ils ayent à faire lire, publier
& enregistrer, le contenu en icelles garder & obseruer
sans y contreuenir, ny souffrir qu’il y soit contreuenu
en quelque sorte & maniere que ce soit.
CAR tel est nostre plaisir ; En témoin de quoy nous
auons fait mettre nostre Seel à cesdites presentes.
DONNE à Bourg le premier iour d’Octobre l’an de
grace mil six cens cinquante. Et de nostre regne le
huictiéme. Signé, LOVYS, Et sur le reply par le
Roy, la Reyne Regente sa mere presente.

 

PHELIPPEAVX.

Extrait des Priuileges des Imprimeurs ordinaires du Roy.

PAR Arrest de la Cour du 24. Octobre 1648. donné en consequence de la
Declaration du Roy verifiée en Parlement, Chambre des Comptes, Cour
des Aydes, Chastelet & Baillage du Palais, & autres Arrests confirmatifs : il
n’est permis qu’à Antoine Estienne, Sebastien Cramoisy, Pierre Rocoler, Iacques
Dugast, Pierre le Petit, & Iacques Langlois Imprimeurs ordinaires de
sa Majesté, d’imprimer tous les Edits, Declarations, Arrests & autres expeditions
concernans les affaires du Roy portées par ladite Declaration : Et defenses
sont faites à tous autres Imprimeurs, mesme à ceux se disans pourueus
par Breuets, de les imprimer ou contrefaire, sur peine de faux & de cinq cens
liures d’amende : Et en cas de contrauention, la peine de cinq cens liures
portée par icelle Declaration dés à present encouruë : Et cependant permis
de saisir, seeller ou transporter les impressions, presses & caracteres des contreuenans,
nonobstant lesdits Breuets, & autres oppositions quelconques : Et
encore tant par ledit Arrest que autres, sont faites les mesmes defenses à tous
Colporteurs & autres d’en vendre & debiter ny s’en trouuer saisis, sur les mesmes
peines, & emprisonnement de leurs personnes.

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