Louis (XIV), Phélipeaux [signé] [1649 [?]], DECLARATION DV ROY, PAR LAQUELLE tous les Officiers du Parlement de Roüen sont interdits, declarez criminels de léze Majesté, & leurs Offices supprimez, en cas qu’ils ne se rendent dans quatre jours prés de sa Majesté. , françaisRéférence RIM : M0_920. Cote locale : A_1_14.
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DECLARATION DV ROY, PAR LAQUELLE
tous les Officiers du Parlement de Roüen sont interdits, declarez
criminels de léze Majesté, & leurs Offices supprimez, en cas
qu’ils ne se rendent dans quatre jours prés de sa Majesté.

LOVIS par la grace de Dieu Roy de France & de
de Navarre : A tous ceux qui ces présentes Lettres
verront : Salut. La desobeyssance des sujets
envers leur Prince est tousiours criminelle, mais
leur faute a ses degrez selon les circonstances de
l’action, & la qualité des personnes qui la commettent.
Souvent les peuples sont emportez par
les persuasions de ceux qui les gouvernent, qui
prennent des prétextes spécieux pour les jetter
dans la rebellion. S’ils ne découvrent pas d’abord leurs mauvais desseins,
ils jugent bien que ceux qui sont nais sujets du Roy sous vn bon & juste
gouvernement, ne sont pas aisément persuadez de rompre les liens de
leur devoir, ausquels la naissance & les loix de la sujection les ont si justement
attachez. La rebellion ne se présente pas à eux avec son visage
d’horreur : ceux qui les conduisent dans la révolte la font paroistre sous le
voile du bien public de leur soulagement, & souvent du service & de la fidélité
envers, leur Prince. Nous pouvons dire avec vérité, que les habitans
de nostre ville de Roüen ont esté séduits par ces artifices. Le Duc
de Longueville a tramé de longue main la révolte que l’on void presentement
éclore : Il s’est premiérement servi des graces que nous leur avons
accordées pour prendre créance dans leurs esprits, leut faisant croire que
c’estoit par son moyen qu’ils les avoient obtenuës, & en suite il leur a donné
l’exemple de la ville de Paris pour auctoriser son mauvais dessein, leur
imposant que toutes ces injustes entreprises contre nostre auctorité, se
faisoient pour le bien de nostre service, & pour appuyer davantage ses
mauvais desseins, il s’est servi des Officiers du Parlement de Roüen, afin
que par leurs exemples ces peuples se laissassent plus aisément emporter
à ses injustes intentions. Nous avons bien du déplaisir de voir que nos sujets

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ayent esté si facilement trompez, & leur faute excite plustost en nous
des mouvemens de compassion, que de colére à l’encontre d’eux, Nous
voudrions bien qu’ouvrant les yeux, ils pussent aussi promptement connoistre
la vérite de leur malheureuse condition où l’on les a engagez,
qu’ils ont esté aisez à suivre la passion déreglée de celuy que nous leur
avions donné pour les gouverner sous nostre auctorité. Nous sommes
prests d’oublier ce mouvement si prompt qui les a emportez à nous désobeyr,
& s’ils ont recours à nostre bonté, ils connoistront l’amour que
nous avons pour eux : Nous desirons seulement qu’ils reçoivent nostre grace,
& se retirent de la servitude où l’on les a jettez, n’attendans pas que
leur ruine les rende sages. Qu’ils considérent que le commerce qui a eslevé
leur ville à la grandeur où elle est aujourd’huy, sera bien-tost interrompu :
que les habitans, au lieu d’estre appliquez à leur négoce, seront obligez
de manier les armes, bien contraires a leur profession : que les bons marchands
se souviennent du misérable estat auquel ils estoient réduits lors
que la puissance du Roy deffunct nostre tres-honoré Seigneur & Pere les
tira de la servitude de ceux qui sont bien au dessous de leur condition, qui
s’estoient rendus leurs maistres : Ils verront qu’il est bien plus avantageux
de demeurer sous l’obeyssance de leur Roy légitime, que sous la tirannie
de ceux qui veulent vsurper sa puissance : Que peuuent-ils iamais esperer
de leur rebellion que la perte de leurs bi?s, la necessité de leurs familles, &
enfin pour comble de leurs malheurs nostre disgrace ? & apres estre accablez
sous le faix de tant d’incommoditez, il faudra qu’ils ayent recours
à nostre main pour les relever de leur cheute. Mais si nous avons de la tendresse
pour excuser la faute de nos sujets, nous ne pouvons voir qu’avec
indignation la mauvaise conduite des Officiers de nostre Parlement : ils
ont commis vne infidélité sans exemple, Nous leur avions fait entendre
nos volontez sur l’esloignement du Duc de Longueville, & que nous desirions
que ses ordres ne fussent plus reconnus dans la prouince, & pour
les obliger dauantage à executer nos commandemens, nous auions accordé
la reünion des deux semestres qu’ils auoient tant desirée. Cependant
apres nous avoir assuré par nostre Avocat General, qu’ils vouloient
demeurer dans l’obeyssance : Ils ont méprisé nostre grace & nos ordres, &
ont receu le Duc de Longueville dans leur compagnie, au mesme temps
qu’ils ont fait fermer la porte à nostre tres cher & bien amé cousin le
Comte d’Harcourt, que nous avions envoyé pour commander dans nostre
province de Normandie : Ils ont supprimé la resolution qui avoit esté
prise par le nouveau semestre de publier nostre Lettre de cachet, d’obeyr
à nos ordres, & de ne point reconnoistre ceux du Duc de Longueville :
Ils ont empesché l’exécution de la deliberation des Officiers de

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l’Hostel de ville qui s’estoi?t portez à recevoir nostredit cousin le Comte
d’Harcourt, & depuis ils ont entrepris de donner divers Arrests au mépris
de nostre auctorité, ayant suprimé la semestre dudit Parlement qui
avoit esté establi, & les Officiers pourveus & receus, & qui ont exercé
leurs charges conjointement avec eux : Ils ont ordonné la vente du sel qui
estoit dans nos greniers, avec diminution de moitié du prix, & enfin ils
ont pris connoissance des deniers de nos tailles, taillon, & de nos fermes,
qu’ils ont arrestez entre les mains des Receveurs, auec deffenses de les voiturer
que par les ordres de ladite Cour : en outre ils ont excité nos sujets à
faire la coupe de nos bois, & pris les deniers des consignations. L’on connoist
aisément que c’est l’ouvrage du Duc de Longueville, qui devroit se
souvenir que ses ancestres ont employé leur vie auec tant de valeur & de
fidelité pour deffendre les droits de nostre Couronne : Nous l’avons assez
obligé à suivre leurs exemples, par vn nõbre de graces & de bienfaits qu’il a
receus de nostre liberalité. Depuis nostre avenem?t à la Couronne, il a esté
honoré de ce digne employ de la negociation de la paix, ses soins & sa prudence
nous donnans lors sujet de croire avec raison qu’il avoit beaucoup
d’amour & de fidelité pour nostre service. Aussi nous luy en avons tesmoigné
nostre satisfaction, & l’estime que nous faisions de ses fideles services,
lors que nous luy avons donné à son retour vn rang si honorable dans nos
Conseils, que nous l’avons gratifié de la terre de Ioux proche de sa Comté
de Neufchastel, du gouvernement de la ville & chasteau de Caën, qui a
esté recompensé par nous de cent cinquante mil livres, outre plusieurs autres
gratifications que nous avons departies à divers particuliers en sa consideration,
auec des tesmoignages d’estime qui augmentoient bien le
prix de nos graces ; que nous representons seulement pour faire voir au
public que nous n’auons pas manqué de reconnoissance enuers luy, & que
c’est auec regret que nous auons esté obligez de le declarer criminel de
leze Majesté. Et comme toutes ces actions de desobeyssance des Officiers
de nostre Cour de Parlement meritent les peines qu’ils ont souuent eux
mesmes prononcées contre la rebellion, nous ne pouuons nous en dispenser
sans manquer à ce que nous deuons à la seureté de nostre Estat, & à la
dignité de nostre Couronne. A CES CAVSES, apres auoir tesmoigné
aux habitans de nostre ville de Roüen, que nous sommes prests
d’oublier leur faute, de les recevoir en nostre grace, & de les traiter auec
l’amour qu’ils peuuent desirer & attendre de nous, s’ils se remettent dans
quatre iours de la datte des presentes en nostre obeyssance. DE L’AVIS de
la Reine Regente nostre tres honorée Dame & Mere, de nostre tres-cher
& tres-amé Oncle le Duc d’Orleans, de nostre tres-cher & tres-amé
Cousin le Prince de Condé, & des autres Princes, Ducs, Paris & Officiers

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de la Couronne estans pres de nous, & de nostre certaine science,
pleine puissance & auctorité Royale : Novs auons par ces presentes signées
de nostre main, cassé & annullé, cassons & annullons, tous lesdits
Arrests, comme donnez par entreprise & attentat sur nostre auctorité, par
gens sans pouuoir en ce regard : Et en outre auons de nostre mesme auctorité
fait tres expresses inhibitions & deffenses aux Officiers tenans à
present nostredite Cour de Parlement de Roüën, de continuer leur seance ;
ny faire aucune fonction de leurs charges en ladite ville, leur enjoignant
de se rendre dans quatre iours, du iour & datte des presentes, pres de
nostre personne, pour receuoir nos commandemens sur la fonction de
leurs charges, & à faute de ce faire dans ledit temps, & iceluy passé, les
auons declarez & declarons criminels de leze Majesté pour leur rebellion
notoire, & comme tels priuez de leurs charge ; & Offices, qui demeureront
dés à present suprimez, & tous leurs biens acquis & confisquez, &
reunis à nostre Couronne : Faisons tres-expresses inhibitions & deffenses
à tous nos Officiers & sujets de les reconnoistre, à peine d’estre declarez
criminels de leze Majesté, comme nous les declarons en ce cas, & leurs
biens pareillement acquis & confisquez. SI DONNONS en mandement
à tous nos Officiers & sujets d’obeyr à la presente Declaration, & de
tenir la main à ce qu’elle soit executée selon sa forme & teneur. CAR
tel est nostre plaisir : En tesmoin de quoy nous auons fait mettre nostre
seel à ces presentes, que nous auons fait lire & publier en nostre Conseil,
la Reine Regente nostre tres-honorée Dame & Mere presente : où estoi?t
aussi nostre tres cher & tres-amé Oncle le Duc d’Orleans, nostre tres-cher
& tres-aimé Cousin le Prince de Condé, & autres Princes, Ducs, Pairs,
& Officiers de nostre Couronne, & plusieurs grands Seigneurs estans
prés de nous. DONNÉ à S. Germain en Laye le dix-septiéme iour de
Février, l’an de grace 1649, & de nostre regne le sixiéme. Signé LOVIS,
& plus bas, Par le Roy la Reine Regente sa Mere presente, PHELY-PEAVX,
& seellé du grand seau de cire jaune.

 

Collationné aux originaux par moy Conseiller
Secretaire du Roy & de ses Finances.

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Louis (XIV), Phélipeaux [signé] [1649 [?]], DECLARATION DV ROY, PAR LAQUELLE tous les Officiers du Parlement de Roüen sont interdits, declarez criminels de léze Majesté, & leurs Offices supprimez, en cas qu’ils ne se rendent dans quatre jours prés de sa Majesté. , françaisRéférence RIM : M0_920. Cote locale : A_1_14.