Guise, Henri II de [?] [1652], LA DECLARATION DE MONSEIGNEVR LE DVC DE GVISE, FAICTE A BORDEAVX LE Troisiéme du mois courant, sur la ionction de ses interests, auec ceux de Messieurs les Princes. Auec toutes les Particularitez de sa sortie. , françaisRéférence RIM : M0_885. Cote locale : B_8_35.
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LA
DECLARATION
DE
MONSEIGNEVR
LE DVC
DE GVISE,

FAICTE A BORDEAVX LE
Troisiéme du mois courant, sur la ionction de
ses interests, auec ceux de Messieurs les Princes.

Auec toutes les Particularitez de sa sortie.

Iouxte la Copie Imprimée à Bordeaux.

Chez Guillaume de la Court, Imprimeur ordinaire de Monseigneur
le Prince.

M. DC. LII.

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LA
DECLARATION
DE
MONSEIGNEVR
LE DVC
DE GVISE.

Faite à Bordeaux le 3. du mois courant, sur la
ionction de ses interests auec ceux de
Messieurs les Princes.

Auec toutes les Particularitez de sa sortie.

Toute l’Europe, qui sçauoit la promptitude auec
laquelle i’auois reçeu les ordres de sa Majesté
Regẽte, pour voler au secours des Napolitains ; ne doutoit
point que leur Courõne ne fut en estat d’acheuer
au plustost la Tiare des Roys de France & de Nauarre ;
& que le ioug d’Espaigne n’eut enfin lassé la patience
de ces Peuples, pour les obliger de tanter le restablissemẽt
de leur liberté sous la puissance de ceux, qui les
auoient autrefois gouuernés auec tant de douceux. En
effet les grandes dispositiõs du retour des Napolitains,
sous l’authorité des lys, fõdoit si probablemẽt le soubçon
de la decadẽce du pouuoir d’Espaigne dãs ce beau
Royaume vsurpé par sa tirannie, qu’on n’estoit plus en
impatience, que d’y voir terminer son Empire, par vn
masacre general de tous ceux qui s’efforçoiẽt encor de

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l’y maintenir, & de voir donner enfin le coup de grace
à cette fierté naturelle, qu’ils ne laissoient pas de faire
encor éclater auec autant de faste, que si les dernieres
conuulsions de leur estat, n’eussent point monstre qu’il
estoit reduit aux abois.

 

Cette agonie d’Espaigne pratiquee par la politique
du C. de R. aussi bien que les Schismes de Portugal &
de Cataloigne, n’eut pas manqué de reussir à vn dernier
desastre : si le M qui n’a iamais regardé nos auantages
qu’auec desespoir, se rencontrant iniustement
pourueu de la charge de premier Ministre d’Estat, ne
se fut resolu, de rasseurer cette Couronne sur la teste
de son Prince naturel, par vne trahison d’autant plus
horrible, que plus il estoit obligé, pour recompenser
la faueur de France de la reconnoistre du moins par la
fidelité de ses seruices.

Quoy qu’il en foit, il ne se seruit de ces belles aparences
de nostre agrandissement, que pour en faire les
derniers escueils, de la fortune de ceux qui luy pesoiẽt
sur les bras, & pour y faire perir auec la iustice de nos
esperances, la plus belle eslite des grãds que sa ialousie
luy faisoient regarder, comme les eternels obstacles
de son ambition, sans autre dessein cependant que de
laisser egorger tout à loisir ces pauures Peuples, pendãt
qu’ils ne seroiẽt occupés qu’a nous rẽdre les bras, pour
nous appeller à leurs secours, & a nous sou mettre leurs
testes, pour receuoir l’honneur de nostre ioug

Ce mauuais Ministre eut biẽ voulu esblouïr les yeux
de M. le Prince des belles apparences de cette illustre
conqueste, dont il ne manquoit pas de luy exagerer

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pompeusement tous les aduantages, en luy faisant entendre,
que la gloire l’inuitoit de courõner le reste de
ses victoires par le triomphe d’vn Royaume entier : &
qu’il se mettroit en estat de ne trouuer point de Capitaine
qui peut marcher de pair auec luy, s’il auoit le
bon heur de reprendre les conquestes de Pepin & de
Charlemagne ; pour lesquelles il lui faisoit faussement
esperer qu’il ne manqueroit pas de lui procurer toute
sorte de secours, auec asseurance mesme que si sa fortune
luy en disoit dans cette entreprise, il ne permettroit
iamais que la Courõne en fut trãsportee à d’autre
teste qu’à celle du vainqueur. La trahison que ce perfide
luy ioüa puis apres dans la Catalogne ne fit voir
que trop euidemment, que ses promesses estoiẽt bien
éloignez de ses intentions, & qu’il n’auoit de plus forte
passion que de se defaire au plustost de celuy dont
l’authorité deuoit brider la sienne dans le maniment
des affaires d’Estat. Aussi ne remporta t’il point d’autre
fruit de la proposition qu’il luy en auança ; que celuy
de se voir rebuté auec desdain, & de se voir obligé
à confesser par la response qu’il fit a la proposition de
la conqueste de la Franche Conté, qu’en effet il n’auoit
voulu l’engager à cette belle entreprise qu’a dessein
de l’y faire perir.

 

Mon absence luy donna plus de prise pour faire triõpher
la haine, qu’il fomẽtoit secreremẽt contre moy :
& le sejour que ie faisois pour lors dans la Ville de
Rome, le fauorisa d’autãt plus heureusement, que plus
il auoit raison d’[1 mot ill.], que la proximité du lieu me
deuoit leuer route sorte de méfiance ; ce, & qu’on n’auoit

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en patrie ietté le choix sur ma personne pour m’enuoyer
au secours de Naples ; que parce qu’estant porté
sur les lieux, & possedant outre cela l’affection de plusieurs
des Potẽtats d’Italie, il sembloit à propos qu’on
deuoit me donner cét employ preferablement à tout
autre. Ie me donnay fort facilement à l’apparence de
ces raisons, ausquelles ie me soûmis aueuglemẽt, parce
qu’elles estoit appuyees de l’authorité de sa Maiesté
Regente : Outre que les belles dispositions des Napolitains,
iointe à l’attente du secours qu’on me faisoit
esperer de la Cour, me firent conclure à l’obeissance,
sans me donner le loisir de faire toutes les reflections
du danger qu’il y auoit à l’executer.

 

Quel en fut le succez toute l’Europe n’e fut que trop
instruite à la honte des Lys & au desauãtage de la sincerité
des paroles Royales : puis que m’estãt transporté
auec tant de cœur, & cõme ie l’ay du depuis ressenty,
auec beaucoup plus d’imprudence, à l’execution de
leurs volontez, ie me vis à faute de secours, abandoné
à la discretion de mes ennemis, sans que leur bonté
Royalles se soit iamais interessé à procurer mon élargissement,
quelque obligée neantmoins que sa Iustice
y fut par la necessité de restablir vn Prince, qui n’estoit
tombé dans l’esclauage que pour en auoir voulu
affranchir par ses ordres, ceux qui ne respiroient que
l’honneur de porter le ioug de sa Majesté.

A. Dieu ne plaise neantmoins que i’impute cette iniustice
à la conduite de mes Souueraines l’experience
ne me mõstre que trop que ce mauuais Ministre qui
en auoit surpris la simplicité par ses artifices sçauoir

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deguiser si adroitemẽt le bon où le mauuais estat des
affaires, qu’il le faisoit enuisager par leurs Maiestez au
gré de ses caprices, & la haine generale qu’il a fait éclater
pendãt ma detention, cõtre toutes les maisons des
Princes de Condé, de Vãdosme, d’Angoulesme, d’Orleans,
de Lorraine, & de Sauoye, desarme tous mes ressentimens,
pour me contenter de dire que ce fauory,
qui meditoit le dessein d’establir sa tyrannie sur les
testes des peuples, vouloit premierement enleuer les
testes de ceux, que leur iustice & leur naissance deuoient
obliger de ne souffrir pas les iniustes progrez
de son ambition.

 

Cependãt ie ne laissois pas de crier assez haut dãs ma
prison, pour m’efforcer de faire retentir mes plaintes
aux oreilles de sa Majeste, dont ie faisois constament
solliciter la iustice par l’entremise de ceux qui estoient
interessez à mon élargissement ; Mais les obstacles de
cet insolent Ministre ; (qui pour adiouster l’outrage à
l’iniustice disoit en se riant que ie serois bien aise de
voir & de seiourner dans l’Espagne) faisoient auorter
toutes leurs plus belles intentiõs ; & tirer ma deliurance
en vne si prodigieuse longueur, que ie n’y voyois
plus d’esperance iusqu’à la conclusion d’vne paix generalle ;
à moins que le Ciel s’interessant à me faire
rendre iustice par la faueur de quelque coup extraordinaire,
ne rompit luy mesme les fers, qui captiuoit
iniustement ma liberté depuis tant d’années.

L’assouuissemẽt de mes desirs à de beaucoup precedé
mes esperances, parce que les conionctures du temps
ne me permetoit point d’en conceuoir de si aduantageuses,

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si les reuolutions de l’Estat n’eussent point fait
changer de face aux affaires pour me les faire paroistre
dans vne plus agreable posture. Et le dessein secret de
la Cour pour le restablissement de C. M. ayant obligé
M. le Prince de s’interesser genereusement pour la
trãquillité des peuples en s’oposant au retour de leurs
tyrans, le Ciel par vn secret de sa prouidence, comme
voulant me faire satisfaction de tant d’iniustices passées
m’a fait enfin voir vne resource pour mon eslargissemẽt,
par la faueur de ce mesme Prince, lequel esleuant
la generosité de ses idées, iusqu’au dessein de brizer
les fers, sous lesquels ils voyoit gemir ma liberté,
a interessé tout son credit dans la Cour d’Espagne,
pour en obtenir ma deliurance.

 

Ce coup de generosité ne luy ayant pas moins reussi
au gré de ses desirs que de mes attentes, m’engage si
sensiblemẽt à prẽdre tous ses interests pour les porter
contre l’iniustice de l’Estat, que i’espere qu’on ne trouuera
pas mauuais, qu’auec les troupes que la Cour d’Espagne
m’a donné pour cette intention, ie contribuë
de tout mon pouuoir pour la deffaite de ce monstre,
que tous les veritables François doiuent regarder
comme le plus mortel ennemy de leur liberté

Ainsi dans le dessein que i’ay d’exposer les motifs
qui me font partager les mescontentemens de Monsieur
le Prince, ie pense premierement qu’il ne sera
point de personne assez iniuste, pour ne iuger pas
auec moy, que mon eslargissement n’estant point
vn ouurage de la Cour, c’est à tort qu’elle espereroit

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que i’entrasse dans ses interests lesquels ie ne sçaurois
épouser sans trahir la fidelité que ie dois à celuy
qui s’est si genereusement entremis pour l’eslargissement
de ma liberté Et cette raison est si conuainquante,
que lors mesme que ie paroistray à la teste des troupes
d’Espagne pour affronter genereusement celles
de sa Maiesté, si toutefois les trouppes de Mazarin
doiuent estre honorées de ce titre, l’Arrest par lequel
on pourroit peut estre pretendre de me traiter en criminel
d’Estat, seroit aussi ridicule qu’inutile, puis que
le Roy n’ayant aucunement pourueu à ma deliurance
comme il estoit de sa iustice, n’a par consequent non
plus de pouuoir sur moy, quelque libre que ie sois,
que si i’estois encor dans les prisons de Madrid ; Et par
cette mesme raison, qui ne peut estre des approuuée
d’aucun homme sage, ie pense que ie suis obligé d’espouser
aueuglement les interests de celuy que ie reconnois
comme le seul autheur de ma liberté.

 

Cette raison qui me fait ietter dans le party de Monsieur
le Prince, sans danger d’estre condamné par aucun
homme sage, se trouue neantmoins appuyée d’vne
seconde qui me feroit encore declarer pour le mesme
auec autant de passion, quand bien ie n’y serois
point obligé par les motifs de ma reconnoissance. Il est
question de pouruoir à la tranquillité publique, qui se
void auiourd’huy cruellement menacée par son plus
mortel ennemy, & que beaucoup de Declarations
Royales verifiées dans tous les Parlemens de la Monarchie,
ont mesme fait passer pour son perturbateur. Il

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est question de seconder en cela la generosité d’vn
premier Prince du Sang, lequel espurant ses intentions
des attachemens honteux de toute sorte d’interest
particulier, se iette hardiment au trauers de l’orage
pour le destourner de la teste des peuples, & pour
en faire creuer la tempeste sur celle de leurs ennemys.
N’est-il pas vray que le sang heroïque des anciens Guises
n’auroit point coulé dans mes veines, si ie m’oubliois
dans cette occasion, & que ces beaux mouuemens
qui faisoient entrer mes ancestres dans les querelles
des peuples opressez, n’auroient point esté transmis
iusqu’à moy, si maintenant que la tyrannie des fauoris
est en estat de se voir plus fortement establie que
iamais, on me voyoit seulement fauoriser ses iniustes
progrez par vne indifference criminelle, & si ie ne me
portois pas à la contre quarrer auec autant de passion,
que ceux qui sont instruits dans les Annales de ma
maison, peuuent en exiger de ma personne.

 

Encore est-ce vne raison qui me semble trop particuliere
pour iustifier à l’espreuue de toute response
vn armement d’Estat. Lors que ie diray que la passion
de vanger les interests communs de toute l’Europe,
me ietteroit toute seule dans le glorieux armement
de Monsieur le Prince, qui n’a pour tout dessein
dans la ruine du Mazarin, que celuy de disposer
les affaires à vne Paix generalle ; le motif ne seroit-il
pas d’autant plus glorieux, que plus il s’estendroit
pour embrasser generallement le repos de
tous les Estats de la Chrestienté. Or ie proteste que

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ce noble mouuement predomine hautement parmy
tous ceux de mon esprit ; mais principalement depuis
qu’estant allé prendre congé de sa Maiesté Catholique
dans l’Escurial, ie me suis veu exhorté mesme par
la bouche d’vn Roy d’Espagne, d’aller contribuer genereusement
à la vengeance des interests de toute l’Europe, par la
perte du Cardinal Mazarin, lequel ne deuant pas estre moins
qu’il a esté cy deuant le seul obstacle de la paix generalle que
tous les Plenipotentiaires auoient concluë dans Munster, doit
par consequent vnanimement estre choqué par tous les genereux ;
que pour luy, il me protestoit à foy de Monarque quoy
qu’à present ennemy de la France, que ses intentions, en fournissant
ses troupes, n’estoient autres, que de contribuer à la
perte, de ce malheureux perturbateur public, apres laquelle,
quelque occasion qu’il eut de se preualoir de nos desordres, il
estoit tout prest de signer vne paix, telle qu’elle auoit esté cy-deuant
concluë. Ces paroles Royales suiuies des acclamations
generalles de toutes les villes d’Espagne, qui
me souhaittoiẽt en passãt vne heureuse victoire sur cét
ennemy de la paix, m’ont tellement appris à me desinteresser
dans le dessein de le pousser à bout, que ie
ne suis plus en estat d’entendre à aucun accommodement,
à moins qu’on n’y propose pour le premier
article que le C. Mazarin & tous ses adherans
seront à iamais chassez du gouuernement de cette
Monarchie.

 

Qui pourra s’estonner maintenant de la passion
auec laquelle ie pretends espouser les interests de
Monsieur le Prince, puis qu’il n’en a point d’autres

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que ceux des peuples : mais qui ne s’estonneroit pas
si ie m’engageois à quelque autre party, pendant que
ie voy que tous les Princes de l’Estat sont dans le sien,
& qu’il ny a que certains broüillons qui grossissent
celuy du Mazarin, sur l’asseurance qu’ils ont de son
rehaussement sera celuy de leurs fortunes particulieres ;
& qu’il ne pourroit décheoir de ses pretentions
sans leur en faire partager les incommoditez par
l’impuissance qu’il auroit de contribuer dauantage à
leur eleuation. Il est vray que la presence de sa Maiesté
sembleroit du moins apparemment iustifier l’iniustice
de ce party, si ceux qui l’y voyent innocemment
engagée, ne sçauoient parfaitement que c’est la premiere
vsurpation de la Regence, laquelle s’en estant
emparée contre toutes les loix de l’Estat à la faueur de
la simplicité de son âge, ne peut aucunement s’en preualoir ;
pour pretendre iustement luy faire donner des
Declarations, contre ceux qui se sont rangez dans vn
autre party. Ainsi tous les Princes se trouuant raisonnablement
choquez de cette tyrannique vsurpation
d’vn droit qui leur estoit adjugé par les loix, ne iustifient
que trop l’armement de ceux qui les seconderont,
pour tascher de redonner le repos à la France en
ostant le Roy d’entre les mains de ceux qui s’en sont
saisis pour la troubler plus heureusement.

 

On auroit quelque sorte de raison de soupçonner
d’infidelité, la montre que ie fais d’vne generosité
des-interessée, si ie pretendois absolument que la
consideration de mes interests particuliers, n’en partageroit

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point les ressentimens ; & que ce seroit par
vn simple motif espuré de toute sorte d’attachement
pour ce qui me touche, que ie me porterois auec tant
d’ardeur contre le tyran des peuples. Cette eleuation
de genie, quelques serments que nous en fasse l’histoire,
pour nous faire conceuoir quelque belle idée de
ses genereux, n’a iamais paru que dans les Romans ;
c’est à dire, dans les fixions des Poëtes, & les naturels
les plus éleuez par dessus le commun ne se sont iamais
portez tout au plus, qu à ménager si adroitement leur
conduite, que leurs interests particuliers y fussent inseparables
d’auec les generaux, & que les affaires de
leur maison, marchassent incessamment de pair auec
ceux du public.

 

Si ie pretends allier mes forces auec toutes celles de
l’Estat, pour exterminer toute la malheureuse engeance
des Mazarins, ie confesse bien que le premier & le
plus illustre motif qui me pousse à cette entreprise,
m’est inspire par la passion que i’ay, de voir puis apres
refleurir la liberté publique sous la debonnaireté de
nos Monarques. Mais si pour soustenir plus efficacement
la iustice de ce motif, i’adiouste encor que celuy
d’espouser la querelle des Princes, m’engage tres sensiblement
au commun dessein de ruiner la fortune de
leurs ennemis, ie pense que ie n’en dois point moins
estre estimé par aucun homme de sens, puis que cette
consideration, quoy que particuliere, bien loin de retarder
les desseins generaux, seruira plustost pour les
auancer auec plus de succés.

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Ceux qui sont tant soit peu sçauans dans la politique,
doiuent sçauoir que les fauoris ne sont pas plustost
éleuez à la confidence de leurs Souuerains, qu’ils regardent
auec ialousie tous ceux que la naissance a placé
dans la proximité du rang & comme ils ne doutent
point que ces esprits naturellement genereux, ne seront
iamais si lasches que de s’abaisser iusqu’à se rendre
complaisans à la conduite de ceux qui ne sont éleuez
que par vn reuers de fortune ; ils ne manquent
point tous de faire tous leurs efforts pour en donner des
ombrages au Souuerain, dont il sont l’honneur d’estre
les fauoris, afin de disposer leur esprit à se defaire de
ceux que ces tyranneaux leur font regarder auec défy,
parce qu’ils regardent eux mesmes auec ialousie.

Le Cardinal de Richelieu n’a mis que trop cette verité
dans son euidence, depuis que s’estant emparé de
l’esprit de Louis le Iuste, il a mesme fait ressentir les effets
de sa ialousie à la Mere & au Frere du Maistre qu’il
seruoit : Mais le Mazarin pour encherir par dessus la tyrannie
de son predecesseur, ne se contentant pas de vouloir
éloigner du secret de la confidence de l’Estat, ceux
qui n’y sont pas moins appellez par leur naissance que
par leur merite, en est mesme venu iusqu’à ce point
d’insolence, que d’en vouloir entierement ruiner les
fortunes par les fourbes qu’il leur a joüé pour s’en dé
faire sous de beaux pretextes. Et le ressentiment de
cét iniustice me deuãt interesser en quelque façon pour
conspirer auec l’armement general qui se fait, à la destruction
de ce grãd ennemy, ie croy que si ie m’y la

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porter par le motif de soustenir auec les interests des
peuples, ceux des Princes & des miens en particulier,
on aura d’autant plus de raison de ne se deffier point
de ma conduite, que plus on verra que ie ne pourray
point la menager au des-aduantage de ceux dont les
interests doiuent estre inseparables des miens dans
cette poursuitte.

 

FIN.

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