Aldimary [signé] [1649], LA CASTILLE AVX PIEDS DE LA REYNE DEMANDANT LA PAIX. AVEC LA PREDICTION DV RETOVR du Roy dans sa bonne Ville de Paris. , français, latinRéférence RIM : M0_645. Cote locale : B_16_26.
LA CASTILLE AVX PIEDS DE LA REYNE DEMANDANT LA PAIX. AVEC LA PREDICTION DV RETOVR A. PARIS, M. DC. XLIX. Auec Permission
A LA REYNE REGENTE. MADAME, Auant qu’oser offrir des vers à Vostre
de le produire seule. Ces considerations m’auroient
MADAME, De Vostre Majesté, Tres-humble, tres-obeïssant & tres-fidele
LA CASTILLE AVX PIEDS DE LA REYNE, DEMANDANT LA PAIX.
A L’ombre d’vn Peuplier, sur le bord d’vn ruisseau, Où ie dormois au bruit du Zephire & de l’eau, Il me sembla de voir la Castille sans armes, Respandant à vos pieds vn deluge de larmes ; S’arracher les cheueux, embrasser vos genoux, Et d’vn flanc tout percé de plus de mille coups, Pousser de grands souspirs, & d’vn ton lent & graue, S’escrier qu’estant Reyne, on la traitte en Esclaue :
Madame, permettez que le sang de Castille, Ce sang dont l’Vniuers, sçait que vous estes Fille, Respandu par les mains de tant de vos Sujets, Se plaigne auec respect contre vostre colere ; Qui pourroit rencontrer de plus dignes objets, Sans enfoncer le fer au sein de vostre Mere.
Ie sçay bien, dites vous, ma Naissance & mon Rang, Il me souuient assez en ma iuste colere, Et de qui ie suis Fille, & de qui ie suis Mere, Et i’en veux à mon Sang, pour l’amour de mon Sang : La nature en ce poinct à soy-mesme est contraire, I’aymerois mieux combattre vn Barbare qu’vn Frere ; Mon desir est de voir ses peuples triomphants Des Mores, ou des Turcs, non pas de mes Enfans ; I’ay tousiours recognu pour Mere la Castille, L’Austriche pour Ayeule, & la France pour Fille : Les loix de la nature & celles de l’amour Postposent à mon Fils ceux qui m’ont mis au iour ;
Sur ces dignes reparts d’vne si grande Reyne, Passerent à cent pas des Chasseurs hors d’haleine, Vn Cerf depuis trois iours, incessamment pressé, Sur le poinct de se voir entierement lassé ; S’eslançant dedans l’eau, m’en couurit le visage, Malgré moy, de mes sens, me redonna l’vsage ; Me priua par malheur d’vn si noble entretien, Interrompit mon songe, & ie ne vis plus rien.
POVR LA REYNE.
ANNE, sur qui le Ciel arreste tous ses yeux, Et dont toute la terre admire la sagesse, On est rauy de voir en mille sacrez lieux, Des marques de vos soins & de vostre largesse.
Assez de pourpre & d’or brillent sur les Autels, Nos Eglises n’ont plus des Images de bouë, Le marbre luit par tout, & tout le monde aduouë Qu’il ne vous reste plus qu’à penser aux mortels.
Les Saincts en ont assez dans le siecle où nous sommes, Le Ciel souffrir a bien que vostre Majesté Iette l’oeil sur la terre, & que vostre bonté Se monstre aux immortels sans oublier les hommes.
Dieu se contente des loüanges, Qu’il reçoit des Roys & des Anges ; Et semble vouloir que leurs mains, Eternellement liberales, Soient des ressources generales, Aux infortunes des humains.
A LA REYNE.
Sonnet.
Anne, dont les bontez seruent d’exẽple aux Dieux ; Et dont tous les humains redoutent la puissance, Auez-vous donc iuré de ruiner des lieux Dignes de vostre Amour & de vostre Naissance.
De cent Trosnes diuers dont la faueur des Cieux A vostre Auguste Fils offre la iouïssance, Faut-il que celuy seul ou regnoient vos Ayeuls, Tombe, pour se soûmettre à son obeïssance.
Si l’exemple fameux des plus grands Conquerants Veut qu’il verse de sang cent furieux torrents N’en peut-il point ailleurs inonder la campagne ?
Dedans le sang des Turcs noyer leur Potentat, Et laisser viure en Soeurs, la France auec l’Espagne, Comme si sous deux Roys ce n’estoit qu’vn Estat ?
SVR L’ACCIDENT ARRIVÉ à la Reyne, le iour qu’on mit des cheuaux de Dannemarc au Carosse de sa Majesté.
Qvand des cheuaux nourris dans les forests du Nort, Estonnez de se voir dans vne autre contrée, Pour monstrer qu’ils estoient des enfans de Borée, Firent soudainement vn dangereux effort.
Et la Cour & le Ciel dans vne estrange peine Virent pallir le front du Soleil & du Roy ; Tout le monde saisi de colere & d’effroy, Ne cessoit de crier qu’on secourust la Reyne.
On vit marcher d’abord les Dieux en bataillon, Pompeusement suiuis de toute leur noblesse, Qui pensoit secourir cette Auguste Princesse, Mais il ne fut besoin que d’vn seul Papillon.
Depuis l’espouuentable cheute Du Fils & du Char du Soleil, Iamais vn accident pareil Ne mit tout le Ciel en émeute.
Mais Papillon plus prompt que ne furent les Dieux, Se vante d’vn honneur dont ils sont enuieux ; Il eut assez luy seul d’adresse & de courage, Pour vaincre des cheuaux l’insolence & la rage Tirant la Reyne du danger Où cét attelage Estranger L’alloit precipiter d’vn mouuement rapide ; Il fait gloire d’auoir preuenu Jupiter, Qui couroit pour prendre la bride, Et pour s’efforcer d’arrester.
Que tout le Ciel s’appaisse, & que sa crainte cesse ; Vne si genereuse & si grande Princesse N’a rien à redouter de pareils accidents, C’est en vain que contre elle on prend le frein aux dents.
Prediction du retour du Roy dans sa bonne Ville de Paris. Exprimé dans vne Ode Latine & Françoise. AD VRBEM PARISIENSEM. ODE.
O Navis, altâ quæ pelagus trabe Durare polles imperiosius, I, Navis, interfusa rupes Æquora diuidere albicantes,
Exasperati quâ Notus Adriæ Fluctus furentes sustulit arbiter, Vndâque fervescens ab imo Pontus inhorruit æstuanti :
Hac nocte, quotquot pingitur ignibus, Tot fulsit axis ; neve per anxios Actæ timores dux carinæ, Æthere deficeret fauenti,
Quæ stella quondam fulserat insolens Ad Regis ortum siderei Magos Ductura, tunc anno serenos Explicuit redeunte vultus.
I firma Regem quærere, sideris Quem signat omen, respice nescios Pallere Typhes, aut habenas Mittere de metuente dextrâ.
O Pinus, ô tu regia, Principum Subvecta remis, Palladis ô manu Compacta, præbe te Senatus Palladiâ moderetur arte.
La mesme tournée en François.
A la bonne Ville de Paris. STANCES.
Vaisseau, dont le corps & les cables Peuuent des Ondes implacables, Rompre les violents efforts, Fend les Mers sans craindre naufrage, Quoy que les Rochers de ses bords Blanchissent d’escume & de rage,
La nuict que l’horrible furie Du vent qui regne sur l’Adrie Eleua l’orgueil de ses flots ; Et que sa face estincellante Parut aux yeux des matelots Toute enflée & toute boüillante :
Le Ciel malgré cette tempeste De ses feux couronna sa teste : Et de peur qu’esmeuë des eaux On ne te vist perdre courage, Il en alluma de nouueaux Pour te guider pendant l’orage.
La planette qui fait l’année Alloit nous rendre la iournée, Que nous consacrons aux trois Roys, Et ce bel astre d’oroit l’Onde, Qui les a conduit autrefois Au berceau du grand Roy du monde.
Reçoy cét Augure auec ioye, Suis l’Estoille que Dieu t’enuoye, Cours hardiment chercher ton Roy. Typhis jadis pâlit de crainte, Voy cent Nochers qui sont pour toy A l’espreuue de cette attainte.
Superbe Amiral de nos flottes Vaisseau, dont nos Roys sont Pilotes, Les Princes ramant de leurs bras, Laisse au Parlement ta conduite Ploye, ô chef-d’œuure de Pallas, Sous vne main par elle instruite.
FIN.
|
Section précédent(e)
|
Aldimary [signé] [1649], LA CASTILLE AVX PIEDS DE LA REYNE DEMANDANT LA PAIX. AVEC LA PREDICTION DV RETOVR du Roy dans sa bonne Ville de Paris. , français, latinRéférence RIM : M0_645. Cote locale : B_16_26.