Dubosc-Montandré, Claude [?] [1652], LA TVTELLE DES ROYS MINEVRS EN FRANCE. Auec les Reflexions Politiques sur le Gouuernement de l’Estat, de chaque Roy Mineur. PREMIEREMENT. Que tous les Roys qui ont esté dans la Minorité, ont eu des Tuteurs iusqu’à l’aage de 25. ans, soit par choix ou par vsurpation, mais tousiours par necessité. II. Que Charles V. n’a reglé la Maiorité à 14. ans, que pour changer de Regents, & non pas pour abolir la Regence. III. Que la Reyne contreuient formellement à la Constitution de ce sage Roy, & à la Loy Salique, faisant vn tort irreparable à l’Authorité Royale. IV. Quelle ne tient le pouuoir qu’elle a que par vsurpation, & le veut maintenir par la force des armes du Roy, desquelles fait mauuais vsage, & est tenuë d’en rendre compte à l’Estat. V. Qu’enfin il s’ensuit que sa Puissance est tyrannique, puis qu’elle subsiste contre toute sorte de Loix, & que toute la France est obligée de s’y opposer, pour l’interest de la Couronne. , françaisRéférence RIM : M0_3901. Cote locale : B_3_2.
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DISCOVRS AV LECTEVR,
sur le Regne de Louys XIV.

Amy Lecteur, ie vous donne ce Regne
beaucoup plus estendu que tous les
autres, parce qu’il est tres-important de sçauoir
tout ce qui se passe de nostre temps à la
memoire glorieuse de nostre jeune Majeur. Il
est vray que les commencemens de sa Minorité
ont esté tres-heureux, c’est ce qui m’auoit
porté à encherir par dessus tous les autres, &
de loüer excessiuement la belle Education du
Prince, la bonne conduite de l’Estat par les
Princes & les Ministres, & le sage gouuernement

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de Monsieur de Villeroy sur la personne
& le jeune âge de nostre Monarque.

 

Mais il m’a bien fallu changer de resolution
dans la confusion & le renuersement general
d’vn si bel ordre, qui sembloit deuoir
durer tousiours. I’auois pris vn grand vol auec
beaucoup de satisfaction. Ie voudrois estre en
estat de le continuër, ce que ie ferois sans doute,
si les choses auoient suiuy de mesme pied
& sans interruption. Helas ! j’apprehende que
de long temps ie ne puisse retreuuer la tramontane
que j’ay perduë, & que le fil de mon
histoire ne soit rompu pour jamais, par les
mal-heureuses menées qui se prattiquent auec
tant de violence, qu’on en oseroit plus dire à
present la verité, de peur d’en choquer ceux-mesme
qui font veritablement tous les malheurs,
ou de donner tant d’horreur à la posterité,
qu’elle soit mal receuë dans l’esprit des
Sages & du vulgaire.

Quoy qu’il en puisse arriuer, ie parleray
tousiours comme ils feront, & ie diray tousjours
mes sentimens auec tant de sincerite &
de franchise, que si j’en suis desapprouué par
ceux qui ne veulent pas qu’on mette au jour
leurs manquemens : I’auray du moins cét aduantage

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de n’auoir point failly le premier, où
plutost d’auoir dit librement qu’ils n’ont rien
fait qui vaille.

 

I’ay donc traitté d’vne autre sorte la suitte
de ce Regne de Louys XIV. & ie me suis
accommodé aux changemens de la Cour
qui ont esté si frequens & si fascheux pour
nous, ie ne les deguise point, car il est bien
permis de loüer excessiuement les bonnes
choses, mais non pas de diminuer les mauuaises ;
d’autant que ce qui est mal ne peut
iamais passer pour vn bien tant petit puisse
t’il estre.

Mon sentiment est appuyé de cette raison
que les loüanges excessiues aux bonnes
actions sont tousiours vn moyen capable
d’exciter à de meilleures & de plus illustres.
Au contraires des mauuaises qu’on ne peut
iamais adoucir qu’en trompant l’esprit de
celuy qui les commet, & c’est la que ie mets
toute la flatterie.

Ie ne seray iamais lasche à ce point d’approuuer
ce que la raison condamne tacitement,
ie le publieray tousiours tout haut,
& feray vne veritable deduction quoy que
bien differente de la premiere, de tout ce qui

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s’est passé depuis la Majorité & tout ce qui
se doit passer cy apres d’vne façon d’escrire que
tu trouueras incorruptible.

 

Ie te prie, Mon cher Lecteur, d’examiner
le tout sans preoccupation d’esprit : Si tu
me vois tout changé sur la fin de ce Panegyrique,
de ce que j’estois au commencement,
ne t’en estonne point : Regarde seulement
les changemens de l’Estat, & pour lors
tu auoueras auec moy, que j’ay raison de
n’estre plus moy-mesme.

Tu verras pourtant toute cette suite dans
la plus naïfue representation de tout ce qui
s’est passé, & si tu me demandes par quelle
Politique tout cela se gouuerne, ie te diray
hardiment que c’est faute d’y en auoir. Si
bien que quand ie me plaindray du mauuais
Gouuernement, ie le feray voir à mesme
temps, & tu t’en pourras bien ressouuenir
toy-mesme, afin qu’on sçache que ce
n’est pas sans raison que ie regrette le temps
passe, & que ie donne de l’apprehension de
l’auenir.

Ne cherche point dans cét Escrit, combien
nos maux dureront encore, ie te le declare
en cet article : Ce sera, Mon cher Lecteur,

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jusques à ce que le Roy prenne connoissance
des maluersations de ceux qui le gouuernent
& qui ruinent son Estat, que les
ayant bien reconnus, il les chastiera de
leurs volontez passionnées, & viendra enfin
à regner comme vn alcion sur les eaux dans
vn grand calme, apres vne effroyable tempeste.

 

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Dubosc-Montandré, Claude [?] [1652], LA TVTELLE DES ROYS MINEVRS EN FRANCE. Auec les Reflexions Politiques sur le Gouuernement de l’Estat, de chaque Roy Mineur. PREMIEREMENT. Que tous les Roys qui ont esté dans la Minorité, ont eu des Tuteurs iusqu’à l’aage de 25. ans, soit par choix ou par vsurpation, mais tousiours par necessité. II. Que Charles V. n’a reglé la Maiorité à 14. ans, que pour changer de Regents, & non pas pour abolir la Regence. III. Que la Reyne contreuient formellement à la Constitution de ce sage Roy, & à la Loy Salique, faisant vn tort irreparable à l’Authorité Royale. IV. Quelle ne tient le pouuoir qu’elle a que par vsurpation, & le veut maintenir par la force des armes du Roy, desquelles fait mauuais vsage, & est tenuë d’en rendre compte à l’Estat. V. Qu’enfin il s’ensuit que sa Puissance est tyrannique, puis qu’elle subsiste contre toute sorte de Loix, & que toute la France est obligée de s’y opposer, pour l’interest de la Couronne. , françaisRéférence RIM : M0_3901. Cote locale : B_3_2.