Anonyme [1649], PROCEZ VERBAL, DE LA CONFERENCE faite à Ruel, Par Messieurs les Deputez du Parlement, Chambre des Comptes, & Cour des Aydes, ensemble ceux de la Ville. Contenant toutes les Propositions qui ont esté faictes, tant par les Princes & Deputez de la Reine, que par les Deputez desdites Compagnies, & de tout ce qui s’est passé entr’eux pendant ladite Conference. , françaisRéférence RIM : M0_2892. Cote locale : A_1_65.
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IX.

Sera accordé descharge generale pour deniers receus, tant publics
que particuliers, & meubles vendus, comme il sera plus particulierement
exprimé dans les lettres tant à Paris & Roüen, que
ailleurs.

Du Ieudy vnziéme Mars, huict heures du matin, Messieurs les
Deputez estans assemblez au logis de Monsieur le premier President,
il dit à la Compagnie qu’il auoit receu deux lettres, l’vne de
Monsieur le Prince de Conty, & l’autre de Monsieur le President
de Bellievre, qui luy faisoient sçauoir l’estat de la Ville, & le pain
qui estoit arriué & porté aux marchez, lesquelles lettres furent
leuës par Monsieur le President de Nesmond, auec vne autre que
luy escriuoit le sieur de la Moignon Maistre des Requestes, qui l’informoit
du bruit qui estoit arriué le iour precedent au Marché des
Halles, où il y eut vn homme de tué par sa faute, d’vn pistolet qu’il
auoit en sa poche, & à l’instant arriua ledit sieur Saintot de la part
de Monsieur le Duc d’Orleans, qui dit à la Compagnie qu’elle eust
à se trouuer au Chasteau, attendu que son A. R. desiroit terminer
promptement la Conference, & leur donna vn ordre pour faire
monter vn batteau de bled à Paris de quatre vingts muids, qui
estoit à S. Cloud, destiné pour les munitionnaires dudit lieu. A mesme
temps, Monsieur le premier President dit au sieur Fournier Escheuin,
l’vn desdits Deputez, qu’il enuoyast au plus viste ledit ordre
à Paris, ce qu’il promit faire ; & dans cét interuale de temps arriua
encore vn second ordre à mondit sieur le premier President de
la part de Monsieur le Duc d’Orleans, pour l’aller trouuer au Chasteau,
lequel y fut auec Monsieur le President de Mesmes, pour negocier
auec son A. R. l’accommodement de trois Articles, faisant
partie des neuf qui auoient esté presentez par les Deputez, dont la
response des Princes blessoit extrémement le Parlement, la Ville
& Messieurs les Generaux : A l’égard du Parlement, ils desireroient
que vingt-cinq dés Officiers du Corps se retireroient en vn lieu qui
leur seroit nommé par sa Majesté pour y demeurer iusqu’à temps
qu’elle les rappelleroit, Que le Preuost des Marchands & Escheuins
de la Ville de Paris, accompagnez de grand nombre de notables
Bourgeois iroient demander pardon au Roy pour auoit pris les armes
dans les mouuemens derniers arriuez, mesme aussi Messieurs
les Generaux. Monsieur le premier President voyant qu’apres plusieurs

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Conferences prises, & contestations que lesdits trois Articles
luy estoient refutez, il auroit demandé trois ou quatre fois le passepoit
de tous Messieurs les Deputez pour s’en reuonir. Monsieur le
President de Mesmes representa à Monsieur le Duc d’Orleans & à
Monsieur le Prince les mal-heurs que pourroit causer la guerre si la
Paix ne se faisoit : Enfin ils accorderent lesdits trois Articles, & les
modererent, ainsi que Monsieur le premier President les auoit souhaitez
En suite les autres Deputez se trouuerent audit Chasteau en
la salle où ils auoient coustume de s’assembler, où il leur fut fait recit
de l’accommodement desdits Articles, & pendant la Conference
des Deputez desdites Compagnies. Monsieur le Duc d’Orleans
arriua dans ladite salle où ils estoient auec Monsieur le Prince, Monsieur
d’Auaux, & Monsieur le Tellier, tous auec vn visage fort ouuert,
& tesmoignerent à la Compagnie qu’ils desiroient extrémement
la Paix, & Monsieur le Prince leur fit cognoistre dans cette
action qu’il auoit quitté son humeur seuere, dont il auoit fait paroistre
pendant tout le temps de la Conference : & apres diuers entretiens,
ils se seroient retirez, & à l’instant ledit sieur Saintot vint prier
de la part de son A. R. Monsieur le premier President, & Monsieur
le President de Mesmes, de l’aller trouuer dans la chambre ou il
estoit, ce qu’ils firent à mesme temps, & leur bailla les Articles qu’il
auoit reglez. Lesquels ayans esté rapportez par eux à la Compagnie
elle les trouua raisonnable, à l’exception d’aucuns qui furent mis en
deliberation ; sçauoir, vn pour le fait des comptans, vn autre concernant
Messieurs les Generaux.

 

L’Article des comptans a esté reglée pour l’année presente, & la
suiuante seulement, à raison du denier douze, dont les interests seroient
employez en ligne de compte : & pour celuy de Messieurs les
Generaux, il a esté atresté que dans quatre iours ils le ratifieroient,
& Monsieur de Longueuille dans dix iours : & d’autant qu’il estoit
vne heure, la Compagnie s’est retirée, & a continué l’assemblée
apres disné.

Du Ieudy vnziéme Mars de releuée, tous Messieurs les Deputez
s’estans trouuez au Chasteau suiuant leur remise, où estans assemblez
en leur chambre ordinaire, le sieur Saintot vint prier Monsieur
le premier President, & Monsieur le President de Mesmes d’aller
trouuer son A. R. ce qu’ils firent, & porterent les Articles sur lesquels
il y auoit eu quelque difficulté le matin pour les faire entendre
à sadite A. R. mesme ceux qui regardoient le Parlement de

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Roüen & d’Aix ; & à l’égard de celuy d’Aix, leur auroit esté baillé
pieces iustificatiues par sadite A. R. comme ils estoient d’accord
auec sa Majesté, lesquels ils ont apporté, & monstré aux Deputez
desdites Compagnies, qui ont apres plusieurs contestations de part
& d’autre, arresté & mis au net les Articles cy-apres, lesquels ont
esté leurs par Mr le President de Nesmond, & en suite signez par Mr le
Duc d’Orleans, Mr le Prince, Mr le Cardinal Mazarin, Monsieur le
Chancelier, Monsieur le Mareschal de la Milleraye, Monsieur d’Auaux,
Monsieur le Comte de Brienne, Monsieur l’Abbé de la Riuiere,
& Monsieur le Tellier, tous Deputez de la part du Roy & de
la Reyne Regente sa Mere. Et sur la contestation de Monsieur
Amelot, premier President de la Cour des Aydes, de signer ainsi
qu’il auoit eu seance pendãt toutes les assemblées, & qui neluy auoit
esté contestée par Monsieur Briçonnet, ny aucun de Messieurs les
Conseillers du Parlement, non plus qu’à Monsieur le President Nicolay,
qui auoient esté tous deux traitez comme Messieurs les Presidens
du Parlement par Monsieur le premier President : a esté
resolu que chacune des Compagnies signeroit par corps, ainsi que
vous verrez par les Articles de ladite Paix, dont la teneur ensuit.

 

LE Roy voulant faire connoistre à sa Cour de Parlement &
aux Habitans de sa bonne ville de Paris, combien sa Maiesté
a agreable les submissions respectiues qui luy ont esté rendus de
leur part, auec asseurance de leur fidelité & obeyssance. Apres
auoir consideré les propositions qui luy ont esté faites, a volontiers
par l’aduis de la Reyne Regente sa mere, accordé les Articles qui
ensuiuent.

Le traitté de l’accommodement estant signé, tous actes d’hostilité
cesseront, & tous passages tant par eaux que par terre seront libres,
& le commerce estably. Le Parlement se rendra suiuant l’ordre
qui luy sera donné par sa Maiesté à S. Germain en Laye, où sera
tenu vn lict de Iustice par sa Maiesté, auquel la Declaration contenant
les articles accordées sera publiée seulement. Apres quoy le
Parlement retournera à Paris faire ces fonctions ordinaire.

Ne sera fait assemblées de Chambre pendant l’année 1649. pour
quelque cause, pretexte & occasion que ce soit, si ce n’est pour la
reception des Officiers & pour les Mercurialles, & ausdites assemblées
ne sera traitté que de la reception desdits Officiers & des Mercurialles.

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Dans le narré de la declaration qui sera publiée, il sera nommé
que la volonté de sa Maiesté, est que les Declarations des mois de
May, Iuillet, & Octobre 1648. veriffiées au Parlement seront executées,
hors ce qui concerne les prests, ainsi qu’il sera expliqué cy-apres.

Que tous Arrests qui ont esté rendus par le Parlement de Paris
depuis le 6. Ianuier iusqu’a present, demeureront nuls cõme non aduenus,
excepté ceux qui ont esté rẽdus, tant auec le Procureur General
qu’autres des particuliers, principallemẽt tant en matiere ciuille
& criminelle, adiudications par decret & receptions d’Officiers.

Les lettres de Cachet de sa Maiesté qui ont esté expediées sur les
mouuemens derniers arriués en la ville de Paris, comme aussi les
declarations qui ont esté publiées en son Conseil, Arrest du Conseil
sur le mesme suiet depuis le 6. Ianuier dernier, demeureront nuls
& comme non aduenus.

Que les gens de guerre qui ont estez leuez, tant en la ville de Paris
que dehors, en vertu des pouuoirs donnez tant par le Parlement
que par la ville de Paris, seront licentiées apres l’accommodement
fait & signé. Sa Maiesté fera retirer les trouppes des
enuirons de Paris, & les enuoyera au lieu de la garnison qu’elle leur
ordonnera, ainsi qu’il a esté praticqué les années precedentes.

Les Habitans de la ville de Paris poseront les armes, apres l’accommodement
fait & signé, sans qu’ils les puissent reprendre que
par l’ordre & commandement exprés de sa Maiesté.

Que le Deputé de l’Archiduc Leopold, qui est à present à Paris,
sera renuoyé sans responce le plustost que faire se pourra apres la signature
du present traitté.

Que tous les papiers & meubles qui ont estez enleuez appartenant
des particuliers leurs seront rendus.

La Bastille, ensemble l’Arsenac auec tous les Canons, toute la
poudre & autres munitions de guerre, seront remis entre les mains
de sa Maiesté apres l’accommodement fait.

Que le Roy pourra emprunter les deniers que sa Maiesté iugera
necessaire pour les despences de l’Estat, en payant l’interest, à
raison du denier douze durant la presente année, & la suiuante seulement.

Que Monsieur le Prince de Conty & autres Princes, Ducs, Pairs
& Officiers de la Couronne, Seigneurs & Gentil-hommes, Villes

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& Cour, & toutes autres personnes de quelque qualité & condition
qu’ils soient, qui auront pris les armes durant les mouuemens arriuez
depuis le 6. Ianuier dernier iusqu’à present, seront conseruez
en leurs biens, droicts, offices, dignitez, honneurs, priuileges, prerogatiues,
charges, gouuernement, en tel & semblable estat qu’ils
estoient auant lad. prise des armes, sans qu’il en puissent estre recherchez
ni inquietez pour quelque cause & occasion que ce soit, en declarant
par les susdits dénommez, sçauoir, par Monsieur le Duc de
Longueville dans dix iours, & par les autres dans quatre jours, à
compter de celuy que les passages tant pour les viures que pour les
commerces seront ouuerts, qu’ils veulent bien estre compris au
present Traitté : & à faute par eux de faire ladite declaration dans ledit
temps, & iceluy passé, le Corps de la Ville de Paris, & autres
Habitans de quelque qualité & condition qu’ils soient, ne prendront
plus aucune part à leurs interests, & ne les ayderont ny assisteront
en chose quelconque, soubs quelque pretexte que cesoit

 

Le Roy desirant tesmoigner son affection aux Habitans de sa
bonne Ville de Paris, a resolu d’y retourner faire son sejour au
plustost que les affaires de l’Estat luy pourront permettre.

Sera accordé descharge generale pour deniers pris, enleuez ou
receus, tant publics que particuliers, meubles vendus tant à Paris
qu’ailleurs : comme aussi pour les Commissions données pour la
leuée des gens de guerre, mesmes pour enleuement d’armes, poudres
& autres munitions de guerre, de bouche, enleuez tant en
l’Arsenal de Paris, qu’autres lieux.

Les Eslections de Xainctes, de Cognac, & de Sainct Iean d’Angely,
distraites de la Cour des Aydes de Paris, & attribuez à la
Cour des Aydes de Guyenne, feront reünies à ladite Cour des Aydes
de Paris, comme elles estoient auparauant l’Edict de

Au cas que le Parlement de Roüen accepte le present Traitté
dans dix iours, à compter du iour de la signature d’iceluy, Sa Majesté
pourvoira à la suppression du nouueau Semestre, ou reünion
de tous les Officiers dudit Semestre, ou de partie d’iceux au Corps
dudit Parlement.

Le Traitté fait auec le Parlement de Prouence sera executé selon
sa forme & teneur, & Lettres de sa Majesté expediées pour la reuocation
& suppression du Semestre dudit Parlemẽt d’Aix & Chambres
des Enquestes, suiuant les Articles accordées entre les Deputez

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de sa Majesté & Cour du Parlemẽt & Pays de Prouence, du 21.
Février dernier, dont coppie a esté donnée aux Deputez du Parlement
de Paris.

 

Quand à la descharge des Tailles proposées pour l’Eslection de
Paris, le Roy se fera informer de l’estat auquel se trouuera ladite
Eslection, lors que les Troupes en seront retirées, & pourvoira au
soulagement des Contribuables de ladite Eslection, comme sa
Maiesté iugera necessaire.

Que lors que sa Maiesté enuoyera des Deputez pour traitter de
la paix auec l’Espagne, elle choisira volontiers quelqu’vn des Officiers
du Parlement de Paris, pour assister audit traitté, auec le mesme
pouuoir qui sera donné aux autres.

Au moyen du present Traitté, tous les prisonniers qui ont esté
faits de part & d’autre, seront mis en liberté du iour de la liberté
d’iceluy. FAIT & arresté à Ruel ce vnziéme Mars 1649.

Signé, GASTON. LOVIS DE BOVRBON.

Le Cardinal Mazarin.

Seguier.

La Milleraye.

Demesmes.

Delomenie.

De la Riuiere.

Le Tellier.

Messieurs du Parlement.

Molé

Demesmes.

Le Coigneux.

Nesmond.

Briçonnet.

Mesnardeau.

Delongueil.

Viole.

Lefebvre.

Bitault.

Delanauue.

Lecocq Corbeville.

Paluau.

Messieurs de la Chambre
des Comptes.

A. Nicolay.

Paris.

Lescuyer.

Messieurs de la Cour des Aydes.

Amelot.

Bragelonne.

Quatr’omme.

Messieurs de la Ville.

Fournier.

Helyot.

Berthelemy.

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Apres la signature desdits Articles, Monsieur le Duc d’Orleans
& Monsieur le Prince ont presenté Monsieur le Cardinal à tous les
Deputez desdites Compagnies, ausquels il leur a dit qu’il vouloit
viure & mourir leur seruiteur, tant en general qu’en particulier, auec
protestations de les seruir en toutes les occasions qui se presenteroient,
mesme les a conduits iusqu’à l’entrée de la derniere salle,
auec Monsieur le Chancelier, qui les ont remercié tous chacun à
part en passant, & se sont retirez ainsi.

Le lendemain Vendredy douziéme Mars 1649. lesdits Deputez
partirent dudit Ruel sur le midy, & se rencontrerent tous auec leurs
carosses & chariots deuant la porte dudit Chasteau, où ils se deuoient
attendre les vns & les autres ; & furent conduits & escortez
par deux ou trois Compagnies de Suisses en haye, tambour battant
iusqu’au lieu de S. Cloud, qui marchoient ainsi auec lesdits carosses,
& les Gardes de Monsieur le Mareschal de Grammont deuant & au
bout du pont dudit lieu de S. Cloud, du costé du Bois de Boulogne,
au lieu desdits Suisses, quatre Compagnies de caualerie en trois
escadrons les vint joindre dans ledit bois, où estoit ledit sieur
Mareschal de Grammont à cheual, auec plusieurs Seigneurs, Gentils-hommes
& Officiers, qui les conduisirent iusques hors ledit
Bois, & lesdits Gardes iusques à la porte de la Conference, au bout
du Cours-la-Reyne.

FIN.

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Anonyme [1649], PROCEZ VERBAL, DE LA CONFERENCE faite à Ruel, Par Messieurs les Deputez du Parlement, Chambre des Comptes, & Cour des Aydes, ensemble ceux de la Ville. Contenant toutes les Propositions qui ont esté faictes, tant par les Princes & Deputez de la Reine, que par les Deputez desdites Compagnies, & de tout ce qui s’est passé entr’eux pendant ladite Conference. , françaisRéférence RIM : M0_2892. Cote locale : A_1_65.