Sarasin, Jean-François [?] [1649], COQ-A-L’ASNE, OV LETTRE BVRLESQVE DV SIEVR VOITVRE RESSVSCITÉ, AV PREVX CHEVALIER GVISCHEVS aliàs LE MARESCHAL DE GRAMMONT. Sur les affaires & nouuelles du temps. , françaisRéférence RIM : M0_797. Cote locale : C_2_40.
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COQ-A-L’ASNE,
OV
LETTRE BVRLESQVE
DV SIEVR
VOITVRE RESSVSCITÉ,
AV PREVX
CHEVALIER GVISCHEVS
aliàs
LE MARESCHAL DE GRAMMONT.

Sur les affaires & nouuelles du temps.

A PARIS,
Chez la vefue & heritiers de l’Autheur, ruë Bonconseil,
à l’enseigne du bout du Monde.

M. DC. XLIX.

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COQ-A-L’ASNE OV LETTRE BVRLESQVE
du Sieur Voiture ressuscité, au preux Cheualier
Guischeus, aliàs le Mareschal de Grammont.

Sur les affaires & nouuelles du temps.

 


TROVVEZ bon que ie vous escriue,
Sans vous informer du Qui-Viue,
Et sans regarder de trauers
Cette trouppe de petits vers,
Parce que Paris les fait naistre,
Paris que vous prendrez peut-estre,
Mais aussi peut-estre que non :
De braues gens y tiennent bon,
Qui ne parlent pas de se rendre,
Mais iurent de vous aller prendre.
Ie sçay, comme ils sont gens de bien,
Qu’ils ne iureroient faux pour rien.
Ainsi vous pouuez vous attendre,
Puis qu’ils ont iuré de vous prendre,
Que pour rien ils n’y manqueront,
Mais bien qu’ils vous enleueront,

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Auec vn peu moins de caresses
Que l’on n’enleue des Maistresses.
Vous plaist-il familierement,
Attendant cet enleuement,
Que vous debitions des nouuelles,
Et vous en comptions des plus belles.

 

 


Voicy, Monsieur le Mareschal,
Vn assez fascheux Carnaual,
Où les Corselets, les Salades
Font les habits des Mascarades,
Où les Mousquets, & les Canons,
Massent, & toppent les Mommons.
A mon sens telle Mommerie
Est vne droite diablerie.
N’en parlons plus, elle fait peur.
Nous tenons icy pour le seur,
Que vous passez mal vostre vie,
Que la Campagne vous ennuie,
Et que vous regrettez Paris,
Où maintes dolentes Cloris
Plaignent vostre suitte inhumaine
Et chantent Birene, Birene.

 

 </p>
Or ie donnerois force argent

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Pour voir vn peu presentement,
Quelle est vostre Galanterie,
Comme auprés de Dame Marie
La fille de maistre Denis,
Cabarettier de sainct Denis,
Vous auez la puce à l’oreille,
Comme vous luy contez merueille,
Comme vous traittez de Soleil
Les Boulangeres de Corbeil.
A cette beure mesme peut-estre
Chantez-vous sous vne fenestre
Pour quelque joly bauolet
Vn des plus beaux Airs de Boisset :
Et la fille en fait raillerie
Auec vn valet d’escurie.
Dieux ! pour en estre là reduit
Falloit-il sortir à minuit ?
Mais quoy ? vous estiez en colere,
Et vous auiez fait bonne chere :
Puis vous pensiez qu’en deux marchez
Les Badauts seroient dépeschez,
Que le Peuple armé de furie
Fronderoit sur la fronderie,
Et qu’vn Samedy seulement
Estrangleroit le Parlement.

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Il est vray que gens sans farine
Sont d’vne humeur assez mutine :
Mais gens qui sont enfarinez
Font aux autres vn pied de nez.
Nous en auons en abondance,
Ainsi faites la consequence.

 

 


Pour changer vn peu de discours
Sçachez que depuis peu de iours
Nostre Duchesse incomparable
A fait vn enfant adorable,
Et que le Preuost des Marchands
L’a nommé Paris d’Orleans.
En naissant il a voulu boire,
Par là commence son Histoire :
Demandez à quelque Allemant
Si c’est vn beau commencement.
Lagneau, Goizel, & nos Prophetes,
Comme de bruyantes trompettes,
Disent desia, que cet enfant
Doit estre vn Heros triomphant,
Egalant en valeur guerriere
Messieurs ses Oncles, & son Pere :
Et representant la beauté
De la Dame qui l’a porté,

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Ce qui se voit dans les Planetes
Auec de fort bonnes lunettes.

 

 


Mais pour finir cet entretien,
Tous vos amis se portent bien,
Et ie crois qu’ils prendront la peine
Dans la fin de cette Semaine
De vous aller voir de plus prés :
Ils ont leurs equipages prests,
Et sont tous dans l’impatience
De rompre auec vous vne lance.
Il n’est pas iusqu’aux Citadins,
Qui ne fassent les Paladins,
Vous menaçans auec brauades,
D’escalades, & de camisades.
Vous direz qu’ils sont des badins,
Ils le sont moins que vos blondins,
Et les bales de mousquetades
Leur passent pour noix de muscades.
Ie pense aussi que les Normans
Vous porteront leurs complimens ;
C’est vne nation peruerse,
Qui demande partie aduerse,
Et sur ce suiet vous diron
A furore Normanorum,

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Ou plustost de toute la France,
Car, à dire le vray, ie pense
Que vous aurez de tous costez
Vne troupe de deputez
Aussi soumise, aussi ciuile
Que celle du haut Longueuille :
Et vous verrez de main en main
La Cour fort grosse à Sainct Germain,
En attendant, vaille que vaille,
Dites à cet homme qu’il s’en aille.

 

ANAGRAMME PROPHETIQVE,
sur la sortie du Cardinal
IVLES MAZARIN.

SERA MIS AV LOIN.

Lettres numerales dudit Anagramme, marquans l’année
de cette sortie.

M. VI. IL.
1649

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