Anonyme [1651], HARANGVE PRONONCÉE LE 9. Auril 1651. SVR LA PROMOTION DE MONSIEVR LE PREMIER PRESIDENT, A LA CHARGE DE GARDE DES SEAVX. , français, latinRéférence RIM : M0_1611. Cote locale : D_1_42.
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HARANGVE
PRONONCÉE LE 9. Auril 1651.
SVR LA PROMOTION DE
MONSIEVR LE PREMIER
PRESIDENT,
A LA CHARGE DE GARDE
DES SEAVX.

ENCORE que la vertu soit contente d’elle mesme,
& que son vray Theatre soit la conscience
du vertueux ; si est-ce que la gloire, & les honneurs,
en sont inseparables ; elle est de sa nature
esclatante & lumineuse, & les loüanges la suiuent
d’autant plus, qu’elle tasche de les esuiter.
Les Romains qui la connurent mieux que pas vn autre peuple
de la terre, creurent qu’en luy dressant vn Temple, ils estoient
obligez à mesme temps, d’en dresser vn à l’honneur, & de donner,
vne entrée commune à tous les deux ; pour faire voir à leurs
ieunes gens, la dependance que l’vn a de l’autre, & que pour en
acquerir l’vn, il les leur falloit acquerir tous deux, & se les proposer
tous deux pour but de toutes leurs actions. Ces payens
qui pour n’estre pas encore esclairez des lumieres de la Foy,
connoissoient les effets de la Prouidence Diuine, sans connoistre

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leur cause, auoient remarqué de quels succez estoient
ordinairement suiuies les bonnes actions, & quels fruits les
gens de bien auoient recueilly des seruices qu’ils auoient rendus
à leurs Princes & à leurs patries. Ils entendoient les loüanges
& lisoient les Panegyriques de ceux qui auoient exposé
leurs vies pour leurs citoyens : ils voyoient les Illustres emplois,
ausquels estoient occuppez ceux qui auoient employé toute
leur vie à se rendre dignes de seruir le public, plustost qu’à la
recherche des plaisirs ; & ils sçauoient quels honneurs on rendoit
aux morts & aux viuans, qui auoient mesprisé leur repos
particulier, pour trauailler à celuy des villes & des communautez.

 

Nullũ Theatrum
virtuti
conscientiã
majus est Cic.
Tuse. q. l. 2.

Si on peut dire que la vertu ne peut estre sans paroistre, il le
faut dire sur tout de celle qui se recontre dans les personnes publiques,
& dans ceux qui manient de grandes affaires, ou qui
possedent de grandes charges dans les Estats : leurs moindres
actions estant publiques, & leur vie estant exposée aux yeux
de tout le monde, on en connoist l’excellence & le prix, bien
plustost que de ceux qui menent vne vie priuée, qui dans toutes
leurs actions ne regardent qu’eux-mesmes, & desquels la
condition n’ayant aucun rapport au public, n’en est aucunement
considerée.

Il ne faut donc pas s’estonner si la haute reputation de Monsieur
le premier President, n’a pu auoir pour bornes depuis si
long-temps les limites de la France ; les Alpes & les Pyrenées,
n’ont pû porter ombrage à l’esclat de sa vertu, & ce ne seroit
pas assez que ses belles qualitez luy eussent acquis les charges
les plus honorables & les plus beaux emplois de ce Royaume,
si elles ne l’auoient encore rendu recommandable à toute l’Europe.

L’honneur qu’on rend à la vertu des grands, n’est pas la seule
merueille de la prouidence Diuine en leur endroit, Dieu
qui les propose à tout le monde pour des exemples de sagesse,
en fait aussi des exemples de prosperité. Ses Escritures sont
toutes remplies des promesses qu’il fait au iuste * de luy bien
establir sa maison, où de luy donner vne lignée heureuse, où

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de le faire puissant dans quelque Estat.

 

* Domus autem
iustorum
permanebit
prou, Sal. c. 12.

Ainsi donc les recompenses que Monsieur le premier President
a receu des puissances de la terre, estoient deuës par le
Ciel à sa vertu : comme il a toutes les qualitez esclatantes
pour lesquelles Dieu a promis à diuers grands hommes dans le
nouueau & dans l’ancien testament des recompenses temporelles,
il a fallu qu’il receust le fruict de toutes ces promesses
diuines.

Aussi voyons-nous que sa maison est l’vne des plus florissantes
maisons de la France, il est celuy de tous ceux qui se sont
meslez des affaires publiques depuis trois ans qui l’a fait auec
seureté, parce que la haute reputation, & les bonnes mœurs
d’vn homme sont de bonnes armes, pour chasser de luy la
crainte durant toute sa vie.

Laus & charitas
sunt vitæ
siue metu degendæ
præsidia
fit missima
Cic. l. 5. de
fin, bon. &
mal.

Monsieur le premier President, sera heureux en lignée selon
toutes les apparences humaines : Messieurs ses enfans sont ceux
du monde, qui approchent le plus prés de sa vertu, & quand il
n’auroit fait que les mettre au monde, sans en pouuoir esperer
d’autre lignée, sa posterité seroit tousiours estimée pour l’vne
des plus Illustres de ce Royaume. La vertu rend plus recommandables
les familles dans l’histoire, qu’vne longue suitte
d’enfans.

Enfin les hautes charges qu’il possede ou qu’il a possedé dans
ce Royaume, font assez voir que les promesses de l’Escriture,
ont esté faites pour luy : La prudence clairuoyante de Monsieur
le Cardinal de Richelieu, le plus grand & le plus fidele Ministre
qui ait iamais approché aucun Roy, iointe à la Iustice du
Roy deffunct, en fit choix pour presider au plus Auguste Parlement
de France. Maintenant la Reyne l’appelle à son Conseil,
& le fait garde des Seaux de France. C’est donc icy qu’il
faut dire ce que dit l’Escriture, Acceptus est Regi minister intelligens,
la Reyne a fait choix d’vn sage Ministre, mais d’vn
Ministre genereux, mais d’vn Ministre iuste, mais d’vn Ministre
qui ne fait aucun estat de ce qui luy peut arriuer de bien ou
de mal dans les seruices qu’il rend au public : car comme dit le
plus grand homme que iamais ait eu la Republique Romaine

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dans toute son estenduë, la sagesse renferme en soy la grandeur
de courage, la Iustice, & le mépris de tout ce qui peut arriuer
au sage : puis que les vertus excellentes sont des accomplissemens
& des acheuemens pour ainsi dire d’vn homme doüé
d’vn esprit sage & intelligent.

 

Sapientia
animi magnitudinem
complectitur,
& iustitiam,
& vt
omnia quæ
homini accidant
infrà se
esse iudicet,
Cic. l. 3. de
fin, bon. &
mal.

Rationis
perfectio virtus
est. Idem
ibidem.

Ceux, dit l’Escriture, * qui se conseillent de toutes leurs affaires,
se gouuernent sagement : Aristote dit que la chose la plus
diuine qui soit parmy les hommes, c’est le Conseil : Platon
tient que le Conseil est quelque chose de sainct & de sacré, &
les Politiques ont remarqué * que tous les Royaumes, les Republiques
& les Communautez n’auoient iamais subsiste dans la
prosperité, que quand les bons conseils y auoient esté en vigueur,
& quand les bons conseillers y auoient esté escoutez.
Ceux qui gouuernent les Estats ne doiuent rien auoir en si
grande recommandation, que de faire choix pour leur conseil
d’habiles gens, & d’hommes d’vne sagesse & d’vne vertu consommée,
ce choix ne se peut faire que par vn Prince sage & aduisé
plus que personne, parce * qu’il n’appartient qu’à vne sagesse
excellente de distinguer vn homme sage du commun.

* Qui agunt
omnia consilio
reguntur
sapientia.
Prou. Sal,
c. 3.

* Egoita cõperi,
omnia
Regna, ciuitates,
nationes
vsque eo
prosperũ imperiũ
habuisse,
dum apud
eos vera consilia
valuerunt.
Sallust.
ad cæs.

* Statuerequis
fit sapiens.
vel maximè
videtur esse
sapiẽtis. Cic.
acad. q. l, 4.

Il faut donc dire, & il est vray, que la Reyne est la plus sage
Princesse qui ait iamais esté au monde, puis qu’elle sçait remplir
son Conseil des plus excellens hommes. Iamais elle n’a
fait de choix qui ne donnast sujet de conçeuoir vne haute estime
de sa vertu, & de sa Iustice : Mais maintenant qu’elle a mis
Monsieur le premier President dans son Conseil, maintenant
qu’elle l’a esleué à vne charge où tout ce qu’il y a d’hommes
d’esprit, de gens de bien, & de bons François dans ce Royaume,
l’auoient souhaitté depuis si long-temps ; il n’y a personne
qui ne fasse hommage à ce choix iudicieux de la Reyne, personne
qui ne fasse profession de luy auoit de grandes obligations
de l’amour qu’elle a témoigné par là auoir pour ses Peuples,
personne enfin qui ne s’escrie auec ioye, Acceptus est Regi
minister intelligens.

La premiere condition, selon les sages Politiques, que doiuent
auoir ceux qui sont esleuez aux grandes Charges par le
Prince ; c’est qu’ils en soient dignes, tant par ce que le don

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qu’on faict à ceux qui en sont indignes est perdu, que par ce
qu’il est dangereux que les gens de merite mesprisez ne fassent
des partis sans en vouloir faire, & ne mettent vn Estat
en diuision, estans suiuis de la pluspart des peuples.

 

Tre auuertẽse
si ricercano
nel date,
la prima è
che non si dia
à glin degnie
perche (olire
chel dono
simpiega male,
dando lo à
chi n’olmerita)
si fa totio
alle persone
degne, anzi
alla virtu.
Botero, della
rag. di St. l. 2.
La cautelia si
ricerca nelle
deliberationie
lardite nel
l’essecutioni,
& nel fatto
Botero 1. 2.
dalla rag. distato.

Que Monsieur le premier President soit le plus digne qui soit
en France d’exercer les plus grandes charges du Royaume, chacun
le sçait : il à cette prudence dans les deliberations, &
& cette hardiesse genereuse dans le fait & dans l’execution,
que les hommes d’Estat demandent d’vn homme employé
aux grandes affaires, il n’y à personne qui ne sçache auec qu’elle
adresse il a moyenné la paix à la France, & auec quel courage
il s’est porté dans toutes les occasions, ou contre des populaces
mutinées, où contre des grands entreprenans quelque
chose, tant contre l’authorité Royale, que contre l’honneur
du corps duquel il est le Chef, & contre le repos des peuples.

Il ne faut pas que les Roys prennent pour Conseillers des ieunes
gens sans experience & sans solidité de iugement, pour
auoir esté peut-estre compagnons de leur ieunesse ou de
leur enfance : L’Escriture parlant des Conseillers qui ruinerent
Roboam, dit qu’ils estoient, iuuenes & nutriti cum eo. Il
faut des hommes experimentez & versez dans les affaires,
dont la ieunesse ayt seruy d’exemple à ceux de leur volée, &
dont l’âge d’homme n’ayt pas esté indigne des charges qu’on
leur donne dans leur vieillesse ; il faut des gens du merite de
Monsieur le premier President.

Les grandes charges estant pour le seruice du public, ceux
qui en sont les plus dignes, sont ceux qui rendent les plus
grands seruices au public. La vertu la plus esclatante, c’est
celle qui s’est signalée à obliger d auantage la patrie ; elle tient
d’auantage de ces biens vniuersels qui se respandent sur tout
le monde : C’est icy où ie veux montrer qu’il ne se peut trouuer
vne vertu plus excellente que celle qui est dans Monsieur le
premier President : il n’y à personne qui oblige d’auantage sa
patrie que celuy qui la met en paix, les guerres ciuiles sont
la ruine des peuples plus que toutes les pestes, toutes les famines,
tous les imposts & toutes les guerres estrangeres ; & tous

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les gens bien sensez auoüent que la paix la plus iniuste, est
preferable à la plus iuste de toutes les guerres entre les sujets
d’vn mesme Roy, & les Citoyens d’vne mesme ville : La
prudence auoit assez apris ces veritez à Monsieur le premier
President, ce grand homme sçauoit bien que le dernier des
mal-heurs qui peuuent arriuer à vn estat, c’est la victoire qui
se remporte dans les guerres ciuiles, il sçauoit bien que les
guerres qu’on fait auec des sujets naturels, les aigrissent & alienent
souuent leurs esprits iusques à les porter dans les dernieres
extremitez : il sçauoit bien aussi la compassion que ceux
qui sont dans les hautes charges doiuent auoir de l’aueuglement
des peuples, qui se jettent dans des partis seditieux fans
sçauoir où ils se precipitent. Il s’est tousiours porté dans toutes
les rencontres à la paix, depuis les troubles de ce Royaume,
il a rendu le calme à toutes nos Prouinces, & nous auons
l’obligation à son zele pour sa patrie, à sa prudence, à sa generosité
& à son esprit penetrant, du repos ou nous sommes
maintenant : on sçait comme il porta les interests des peuples
en soustenant l’authorité de son Roy, aux Conferences
de Ruël & de Sainct Germain ; les temperaments qu’il trouua
dans les demandes que faisoient les Seigneurs qui auoient
commandé dans Paris, les moyens qu’il inuenta de satisfaire
aux deputez de Prouence & de Normandie. Il n’a iamais rien
eu tant à cœur que d’affermir l’authorité du Roy, parce que le
repos estant le plus grand bien des Estats, & le repos des Monarchies
dépendant entierement de la puissance absoluë, &
de l’authorité d’vn seul qui puisse mettre l’ordre par tout, &
qui n’ayt point dans son estat d’autre puissance, laquelle pouuant
choquer la sienne, puisse faire par consequent des guerres
ciuiles ; celuy qui cherit veritablement les peuples doit
maintenir & espauler autant qu’il luy est possible cette authorité
& cette puissance absoluë.

 

Verum decus
in virture positum
est, quæ
maximè illustratur
maguis
in remp.
critis. Cic.
Epist. sam. 1.
10. Ep. 12.

Pax vel iniustu
vtilior est
quam iustissimum
bellum
cum ciuibus.
Cic. l
1. Ep. ad atticum.

Extremum
malorum omnium
ciuilis
belli victoria.
Idem. 1. 9. Ep.
6. & sam.

Molto meno
conuiene cõtinouar
la
guerra con
sudditi, massime
naturali
perche si esacubano,
& si
alienano sem.
pre più, &c.
Botero, della
rag, dist, l 2.

C’est donc ainsi que la vertu de Monsieur le premier President,
est vne vertu veritablement populaire : car les vertus
populaires ne sont pas celles qui accordent aux populaces
mutines tout ce que leurs humeurs seditieuses leur faict, vouloir :

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Il arriue souuent que les peuples demandent auec chaleur
ce qui leur est le plus nuisible ; il appartient à la sagesse
discrette de ceux qui gouuernent de discerner les veritables
interests des peuples, & à vne vertu veritablement populaire
de les entreprendre auec courage & auec affection. Or il n’y
à rien qui touche d’auantage les interests des peuples que le
repos d’vn Estat ; il n’y à de populaires que ceux qui empeschent
les troubles, & qui donnent moyen à chaque pere
de famile de viure en paix dans sa maison & dans sa condition.

 

Qui pacis
incunt consilia,
sequitur.
cos gaudiũ.
Prouerb.
Sal. c. 12.

Les veritables amis des Peuples ne sont pas ceux qui font
des cabales & des partis, ce ne sont pas ceux pour qui les Peuples
prennent les armes à la chaude, & qu’ils appellent leurs
protecteurs, leurs peres, & leurs liberateurs. La commune
estant de sa nature lasche & enuieuse, elle hait tousiours ce qui
est le plus au dessus d’elle, & comme il n’y a rien qui soit plus au
dessus d’elle que ceux qui luy commandent & qui manient les
affaires d’vn Estat, elle se ioint tousiours auec passion à tout ce
qu’il y a de factieux qui attaquent le gouuernement. Et ainsi il
se trouue souuent que ceux qui perdent les Peuples, sont ceux
mesmes qu’ils appellent leurs protecteurs ; ceux qui attaquent
& leur vies & leurs biens, sont ceux qu’ils appellent leurs peres ;
ceux enfin qu’ils appellent leurs liberateurs, sont ceux qui oppriment
leurs libertez & leurs priuileges.

Monsieur le premier President, est celuy de tous ceux qui
ont agi depuis les derniers troubles de ce Royaume, qui a rendu
des seruices plus signalez aux Peuples ; il est celuy qui a le
plus merité leur amour & leur bien-veillance, il est le seul qui a
tousiours méprisé son repos particulier, pour auoir soin de celuy
du public. Il a obligé les Peuples dans toutes les occasions
qu’il a rencontré de le faire ; mais il ne leur a pas voulu faire
croire qu’ils luy fussent plus obligez qu’à ceux qui les gouuernent,
& qui ont tousiours l’œil à les garantir de tous les dangers
qui leur peuuẽt arriuer de dedans & de dehors le Royaume ;
il n’a pas fait publier les seruices qu’il leur rendoit ; il les a aymé
plus que soy-mesme, & plus que sa famille ; mais il n’a pas
voulu en estre aymé iusqu’à l’excez, en sorte que l’amour qu’ils

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eussent eu pour luy, eust pû faire tort & partager celuy qu’ils
doiuent au Prince. Il les a deffendus & protegez, mais il n’a
pas voulu que ses deffences & que ses protections fissent des
partis : il a fait ce que luy seul a pû faire, il a voulu que tout les
sujets du Roy trouuassent leur bon-heur dans l’obeyssance &
dans les respects qu’il doiuent à sa Majesté : Il a menagé les aduantages
des Peuples, en deffendant l’Authorité du Roy. Il a
tousiours porté l’interest du peuple, l’interest de sa compagnie,
l’interest des Princes, l’interest du Roy, il a dis-je porté tous
ces interests si differents, & luy seulles a pû accorder. Et ainsi
il a deffendu l’interest de tout le monde, & n’a méprisé que
le sien propre. Toutes les guerres ne sont que des guerres d’interest,
ce n’est pas la vengeance, ny la colere, qui ameine la
dissention dans les estats, & encore moins l’amour que les
Chefs des reuoltes ont pour les Peuples ; il n’y a que le fruict
que ceux qui broüillent, esperent tirer des guerres où ils embarquent
les Peuples qui apportent les troubles & les confusions
d’Estat. Le sage, & le fidelle amy des Peuples sera donc
celuy qui accordant les interests des petits & des grands ; des
Chefs de partis, & du Prince ; de la robbe & de l’Espée ; remettra
l’vnion & la concorde dans l’Estat, & qui espargnera à
sa patrie, tout le sang qu’ont coustume de respandre les guerres
ciuiles : c’est ce qu’à fait Monsieur le premier President, comme
chacun sçait & comme ie viens de faire voir.

 

Il est donc veritablement le liberateur du Peuple, puis qu’il
est celuy qui l’a deliuré de toutes les miseres qui l’ont tourmenté,
& qui eussent acheué de le perdre ; il l’a tiré des mains de
ceux qui l’eussent opprimé des armes qu’ils eussent témoigné
prendre pour sa deffence ; il l’a deliuré d’vn blochus qui ostoit
le pain aux pauures, le gain aux Artisans, les rentes aux Bourgeois,
& la liberté à tout le monde ; Il l’a deliuré d’vne guerre
par laquelle les freres & les amis se fussent ruynez mutuellement,
d’vne guerre qui eust épuisé tout le monde de moyens,
sans en remplir personne, d’vne guerre de pillage, de vollerie,
& de brigandage.

Il est le vray protecteur du Peuple, puis qu’il est celuy qui l’a
maintenu dans le repos, dans la iouyssance de ses biens, & dans

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la bonne grace de son Prince. Il l’a deffendu contre les grands,
contre les Estrangers, & contre les ennemis domestiques ; il l’a
deffendu contre luy-mesme. Il l’a sauué sans qu’il voulust estre
sauué ; il l’a tiré des malheurs où il prenoit plaisir à se ietter, &
il luy a fallu le combattre pour le deffendre.

 

Monsieur le premier President, est aussi veritablement le
pere de tous le peuples de ce Royaume, puis qu’il est celuy
qui les a mis dans le repos & dans la tranquillité ; c’est luy seul
à qui le marchands ont l’obligation de ce qu’ils peuuent ouurir
leurs boutiques en seureté, les artisans & manœuures de ce
qu’ils trouuent à qui se loüer, les laboureurs de ce qu’il leur
reste des cheuaux & des bœufs pour mettre à leur charruë, &
de ce qu’ils peuuent labourer & ensemencer leur terres sans
crainte que quelques vns de leur amis deuenus leurs ennemis
par vne dissention ciuile, leur enleue en vne heure tous les
fruicts de leurs longs trauaux.

Il est l’homme de paix, les Conseils duquel l’Escriture asseure
estre suiuis de ioye & de contentement : il gouste les fruicts
de ses illustres trauaux ; les honneurs & les dons que le Roy &
la Reyne luy font, sont de vrays honneurs & de vrayes recompenses
d’vne vertu eminente, * puis qu’il n’y à d’honneur solide
& de vraye gloire que ce que les grands hommes en reçoiuent,
plustost à cause des belles & vertueuses actions qu’ils
ont desia faictes, que pour l’esperance qu’on à de retirer quelque
vtilité de leur conduite : Il reçoit des veritables loüanges,
** puis qu’il n’y à de veritables loüanges que celles qui sortent
de la bouche de ceux de la vie, desquels chaque action merite
vn Panegyrique, comme est celle de la Reyne, aux loüanges de
laquelle toutes les plumes & toutes les langues de la posterité
seront occupées : Enfin, Acceptus est Regi minister intelligens,
auec de grands tesmoignages de la part de leurs Majestez, de
reconnoissance des seruices qu’il a rendus à la France : acceptus
est regi minister intelligens, auec la ioye de tous les gens
de bien, acceptus est regi minister intelligens, auec l’aplaudissement
de tous les peuples de ce Royaume, qui doit entierement
son repos à sa sage conduitte.

Quid tam
populare,
quim otium
Cic. orat. de
lege. agr.

Is denique
honos mihi
videri solet,
qui non propter
spem suturi
benesicij,
sed propter
magna
merita claris
viris defertũt
& datur. Cic.
Ep. fam. l. 1.
Ep. 10.

En est profetto
iucunda
laus, quæ
ab ijs proficitur,
qui ipsi
in laude vixerunt.
Cic.
Ep. fam. l.
15. Ep. 6.

FIN.

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