Anonyme [1652], EXTRAICT DES REGISTRES DV PARLEMENT, CONTENANT Ce qui s’est passé pour l’esloignement du Cardinal Mazarin. , françaisRéférence RIM : M0_1351. Cote locale : B_11_29.
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Du sixiesme iour de Septembre mil six cens
cinquante-vn.

LOVIS par la grace de Dieu, Roy de France & de Nauarre ;
A tous presens & à venir, Salut. Depuis qu’il a
plû à Dieu nous appeller au Gouuernement de cét Estat,
Nous n’auons eu plus grand desir que de signaler nostre Regne
par l’amour qu’vn bon Roy doit auoir pour les Peuples
que Dieu luy a soubmis, & imiter les exemples des Roys nos

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Predecesseurs, lesquels ont merité le nom de Peres du Peuple.
Et neantmoins pendant nostre Minorité, le Cardinal
Mazarin contreuenant à nos bonnes & loüables intentions,
ayant par sa mauuaise conduite excité la haine de nos Peuples
contre luy ; les auroit contraints d’auoir recours à nostre
bonté & justice, pour y apporter les remedes conuenables :
Et ayant porté leurs plaintes en nostre Cour de Parlement
de Paris, qui veille continuellement au bien de nostre seruice ;
elle nous auroit fait tres-humbles Remonstrances contre
les entreprises dudit Cardinal, par l’emprisonnement d’aucuns
Officiers de nostredite Cour & autres, contre la disposition
de nos Ordonnances ; éloignement de nos bons & fideles
Sujets, d’aupres de nostre personne ; dissipation & transport
de nos Finances hors de nostre Royaume, pour les conuertir
a ses interests particuliers : Et desirant entretenir le
trouble entre les Princes Chrestiens, afin de se rendre necessaire,
& continuer la dissipation & transport de nosdites Finances,
auroit par ses artifices fauorisé les mauuaises dispositions
de nos Ennemis, & rendu nos bonnes intentions pour
la Paix generale, sans aucun effet. A tous lesquels desordres
ayans apporté remede par nos Declarations des dix-huit Iuillet
& vingt-deux Octobre 1648. & ayant aussi restably le repos,
& donné le soulagement à nos Peuples par celle du dernier
Mars 1649. Neantmoins ledit Cardinal continuant sa
mauuaise conduite, nous aurions receu nouuelles plaintes
tant de nos Sujets que de nos Alliez & Voisins, de la depredation
de plusieurs Vaisseaux conduits en nos Havres par les
ordres dudit Cardinal qui y prenoit part. Ce qui auroit donné
occasion aux Interessez, d’vser de represailles contre aucuns
de nos Sujets qui en ont esté ruinez ; Et le commerce,
l’vn des principaux nerfs de nostre Royaume, scitué entre les
deux Mers, & garnis des plus beaux Ports de l’Europe, & de
tout ce qui est necessaire à la nauigation, du tout aneanty.
Et outre, pour contenter ses passions particulieres, auroit
conseillé l’interdiction de nostre Cour de Parlement de Bordeaux,
contre l’Aduis de nostre tres-cher & tres-amé Oncle
le Duc d’Orleans. Et pour mieux executer ses desseins, & se

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preualoir de la detention de nos tres-chers & tres-amez Cousins
les Princes de Condé & de Conty, & Duc de Longueuille ;
& afin de se rendre Maistre plus absolu de leurs personnes ;
les auroit fait transferer au Havre de Grace, dont il auoit
osté le Gouuerneur, pour y mettre vn de ses affidez, contre
l’Aduis de nostredit Oncle le Duc d’Orleans. Surquoy nostredite
Cour de Parlement de Paris, nous ayant fait ses Remonstrances,
ledit Cardinal Mazarin auroit tâché de les éluder
par diuers artifices. Ce que voyant nostredit Oncle & nostredite
Cour de Parlement ; & craignant les mauuais éuenemens
de si pernicieux desseins, ils en auroient donné aduis à nos
autres Parlemens : Lesquels secondans leurs bonnes intentions,
auroient ordonné pareilles Remonstrances. Surquoy
voyant le consentement general de tous nos Sujets, & en
ayant deliberé en nostre Conseil, & reconnu le peu de suffisance
dudit Cardinal Mazarin Estranger, dans les affaires de
nostre Estat ; & que sa mauuaise conduite luy auoit attiré l’auersion
& le mespris de tous les Ordres de nostre Royaume ;
Il auroit par vn dernier effort essayé par comparaison de detestables
& funestes exemples, nous donner de mauuaises
impressions de leur fidelité & loyauté ; & par ce moyen les
mettre en nostre indignation, qui eût esté vne playe mortelle
à nostre Estat ; Nous aurions par l’Aduis de la Reyne
Regente nostre tres-honorée Dame & Mere, & de nostredit
Oncle le Duc d’Orleans, éloigné de nostre personne & de
nos Conseils ledit Cardinal Mazarin, & fait retirer de nostre
Royaume. Et n’ayant cessé de continuer ses practiques ordinaires,
commerce & intrigues auec aucuns de nos Sujets
ses amis & affidez ; & transport de nos Finances hors de nostre
Royaume, tant en especes que par lettres de change : Et
desirant y remedier, & donner le calme à tous nos bons &
fideles Sujets, de l’affection & obeyssance desquels nous
auons receu tant de signalez témoignages ; Et empécher les
mauuaises suittes qui en pourroient arriuer par le retour dudit
Cardinal Mazarin : NOVS A CES CAVSES, de l’Aduis
de la Reyne Regente nostre tres-honorée Dame & Mere, de
nostre tres-cher & tres-amé Oncle le Duc d’Orleans, de nostre

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tres-cher & tres-amé Cousin le Prince de Condé, & autres
Ducs, Pairs & Officiers de nostre Couronne, & de nostre
certaine science, plaine puissance & authorité Royale ; Auons
fait & faisons tres-expresses inhibitions & defenses audit
Cardinal Mazarin, ses Parens, Alliez & Domestiques estrangers,
sous quelque pretexte, cause, employ, alliance ou occasion
que ce soit, de rentrer dans nostre Royaume, Pays
& Terres de nostre obeyssance, ou estans sous nostre protection,
à peine d’estre declarez criminels de leze-Majesté, &
perturbateurs du repos public ; Et à tous Gouuerneurs de
nos Prouinces & Places, nos Lieutenans, Baillifs, Seneschaux,
Capitaines, Chefs & conducteurs de Gens de guerre, Preuosts
des Mareschaux, Maires & Escheuins de Villes, & autres
nos Officiers & Sujets, de luy donner retraite, ny entretenir
aucun commerce auec luy, par lettres, enuoy de Couriers
ou autrement : Et aux Generaux de nos Armées, de le
receuoir dans leurs Troupes, & à toutes personnes de luy enuoyer,
ou à aucuns de ses Parens, Alliez Domestiques, ou
autres qui l’auront suiuy directement ou indirectement aucuns
deniers en especes, par lettres de change, remise ou autrement,
sous quelque pretexte que ce soit, aux peines portées
par nos Ordonnances, à la reserue de deux personnes
qu’il nommera à nostredite Cour, pour l’administration de
ses affaires. Voulons en outre lesdits Arrests de nostredite
Cour de Parlement de Paris, des 7. & 9. Fevrier, 11. Mars,
2. & 8. d’Aoust derniers, ensemble ceux de nos autres Parlemens
des 15. 20. & 23. dudit mois de Fevrier, huictiéme,
dixiéme, vingtiéme, vingt-deuxiéme & dernier dudit mois
de Mars ; estre executés selon leur forme & teneur, & le procez
fait & parfait à tous ceux qui y auront contreuenu.

 

Declaration du
Roy, portant deffenses
au Cardinal
Mazarin, ses
parens, alliez, domestiques
& estrangers,
de rentrer
dans ce Royaume :
Et à tous
Officiers & autres,
de les y
souffrir.

SI donnons en mandement à nos amez & feaux Conseillers,
les Gens tenans nosdites Cours de Parlemens, Que ces
presentes ils fassent lire, publier & enregistrer ; & à tous les
Gouuerneurs de nos Prouinces & Places, Generaux de nos
armées, Lieutenans Generaux, Baillifs, Seneschaux, Capitaines,
Chefs & Conducteurs des Gens de guerre, Officiers
de nos Armées, Preuosts des Mareschaux, Maires & Escheuins,

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chacun en droict soy, de tenir la main à l’execution des
presentes, selon leur forme & teneur : CAR tel est nostre
plaisir. Et afin que ce soit chose ferme & stable à tousiours,
nous auons signé ces presentes de nostre main, & y auons
fait mettre & apposer nostre seel. DONNÉ à Paris au
mois de Septembre l’an de grace mil six cens cinquante-vn ;
Et de nostre Regne le neufiesme, Signé LOVIS ; Et plus
bas, Par le Roy, la Reyne Regente sa Mere presente, DE
GVENEGAVD.

 

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