Anonyme [1649 [?]], DIVERSES PIECES DE CE QVI S’EST PASSÉ A S. GERMAIN EN LAYE, Le vingt-troisiéme Ianvier 1649. & suiuans. , françaisRéférence RIM : M0_1160. Cote locale : A_1_5.
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DECLARATION DV ROY, Par laquelle les Princes, Ducs, Seigneurs, et
leurs Adherans, qui ont pris les Armes contre
son Seruice ; Sont declarez, Criminels de
leze Majesté, S’ils ne se rendent présa de sa
Personne , dans trois Iours, apres la Publication
d’Icelle.

LOVIS par la grace de Dieu ROY
DE FRANCE ET DE NAVARRE :
A Tous ceux qui ces presentes lettres verront.
Nous ne sçaurions penser qu’auec vne extreme indignation
au procedé iniurieux à nostre Authorité, que les
Officiers, se disans tenir nostre Cour de Parlement à Paris,
ont exercé contre nous. Nous croyons qu’ils deussent rendre
le respect & l’obeïssance, qu’ils sont obligez à nos volontez ;
mais au contraire, ils ont traitté auec tant de mespris
la Declaration, que nous leur auons enuoyée, par les
gens de nostre Parquet, que iusqu’icy, ils n’en n’ont pas fait
seulemnnt l’ouuerture à nostre Procureur General, & nos
Aduocats Generaux, ne nous ont donné aucun auis de l’execution
du commandement qu’ils auoient receu de nous :
nous ne laissons pas neantmoins d’estre bien informez de
leur desobeïssance, qui est assez publique, & qui nous fait
iuger de leur mauuaises intentiõs puis qu’au lieu d’executer
les commandements que nous leur auons donné, ils continuent
de faire de iour en iour de nouuelles entreprises, &
attentats contre nostre personne. Ils ne se contentẽt pas de
faire des leuées, & des Impositions de deniers sur les Habitans
de nostre bonneville de Paris, qu’ils cõtraignent depuis
par force & violence, mais ils font des deffences à nos Sujets

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de payer la Taille, & les droits de nos Fermes à nosdits
Receueurs, de les porter en nostre épargne, leur ordonnant
de les faire incessamment voicturer en l’Hostel de nostre
bonne ville de Paris, & ainsi ils essayent, de nous priuer du
secours que nous pouuõs esperer de nostre reuenu. C’est vne
chose estrange, que de voir qu’au lieu d’où il ne deuoit sortir
que des exemples d’amour, de respect, & de sousmission enuers
nous, l’on voit se former vne monstrueuse faction, qui
n’a point d’exemple dans les siecles passez, que ceux qui
sont establis de la main du Roy, comme des lumieres pour
conduire leur Peuple dans l’obeïssance, par vn estat tout cõtraire
à leur institution, ils les mettẽt dãs la rebellion, ils trauaillent
par tous moyens à corrompre la fidelité de nos bons
Subjets, & alterer leur amour enuers nous, qui est le bien &
le fondement le plus asseure de leur obeïssance : & au lieu
d’obseruer les reglemens depuis peu par nous faits sur les
desordres qu’on disoit estre dans l’Estat, ils en remplissent
toutes les parties d’vne horrible confusion : enfin mesprisant
nostre authorité, ils font tous actes de Souuerain. Ils
foullent aux pieds la Majesté Royalle, & mettent dans le
mespris pour en effacer la veneration du cœur de nos Peuples.
Nous ne pouuons comprendre que ceux qui ont exercé
les peines des loix de l’Estat que merite la rebellion, ne
se souuiennent pas qu’ils tombent dans le mesme crime,
Qu’ils puissent entrer dans cette grande Chambre pour y
prononcer des Arrests contre nostre authorité, où autrefois
elle estoit receüe auec tant de veneration. Qu’ils se representent
vne fois, que ceux qui ont tenu leurs places si dignement,
ont choisi plustost l’exil & la prison, que de manquer
à leur deuoir & à l’obligation de seruir leur Roy ; mais ils
ne se sont pas contentez de se soustraire de nostre obeïssance,
ils ont trauaillé par leur caballes d’en tirer ceux qui
estoient les plus obligez par leur naissance & par le rang
qu’ils tiennent dans le Royaume, à nous honnorer & à nous
seruir, nous voulons dire le Prince de Conty, qui auoit
grand sujet de demeurer reüny à la Maison Royalle par l’exemple
de nostre tres cher & tres-amé Cousin le Prince de

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Condé son Frere, qui continuë de jour en jour de faire paroistre
par ses signalés seruices, le zele qu’il a pour la grandeur
de nostre Couronne, & qu’il employe auec tant de generosité,
pour la deffendre contre les attentats de nos Subjets
rebelles. Le Duc de Longueuille se deuroit souuenir
que les grands honneurs, & le rang qu’il possede dans nostre
Royaume, ont esté la recompense des seruices de ces
Ancestres, qui auoient soustenu si valeureusement & auec
tant de courage l’honneur & la dignité de cette Couronne :
enfin c’est vne chose bien extraordinaire de voir, que ceux
qui porte des tiltres si honorables, & des dignitez qui leur
ont esté concedées par les Roys nos predecesseurs & Nous,
comme vne marque de leurs merites, par vne sumission qui
ne peut auoir de nom pour son excez, reçoiuent de la main
de nos Officiers factieux le commandement des Armes que
lon leve contre Nous ; Qu’ils considerent & se representent
la conduitte de nostre tres-cher & tres amé Oncle le Duc
d’Orleans, Lieutenant General de nos Armées en nostre
Royaume, qui trauaille auec tant de gloire à abattre la rebellion
qui s’esleue contre Nous, & à conseruer les grandes
Conquestes, que sa valeur a faite sur nos Ennemis, & auec
tãt d’heureux succez, qu’il a porté nos Armes jusques dãs le
cœur de leurs Estats, & les a reduittes à la necessité de deffendre
leurs places, faisant seruir leurs Prouinces de theatre
de la Guerre, pendãt que nostre Royaume n’en attẽdoit que
le bruit. Il a fait assez connoistre le sensible déplaisir qu’il a
de voir toutes les marques & les mouuemens de la gloire
de nostre tres-honoré Seigneur & Pere, sur le point d’estre
renuersez, & que tous ces grands aduantages qu’il auoit
acquis par ses trauaux à la France, tombent auec honte entre
les mains de nos Ennemis. Il ne peut souffrir que l’ouurage
si precieux d’vn si grand Roy, qui la enrichy de tant
de nouuelles Conquestes, soit destruit par la rebellion, &
que l’on arrache à la France ses Couronnes de gloire, qui
ont esté si heureusement formées par la valeur, que toutes
les Villes qu’il a conquises, retombent auec injustice sous

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la domination des vsurpateurs : Ce sont les generenses pensées
de ce grand Prince, Fils de Henry le Grand, nostre
Ayeul, & digne heritier de ses vertus : Ses sentimens ne sont
pas moindres en la personne de nostre tres-cher & tres-amé
Cousin le Prince de Condé, qui a rendu l’entrée de nostre
Regne si glorieuse par cette memorable victoire de Rocroy,
que nous l’auons commencé par vn triomphe sur nos Ennemis,
qui pensoient tirer avantage de la foiblesse de nostre
aage ; Il leur a fait sentir que la puissance des Roys ne se
mesure point par les années. Depuis ces heureux commencemens,
ont esté suiuis de tant de Batailles gagnées,
de Villes conquises, que nous pouuons dire que leur vertu
vnie ensemblement à esté l’affermissement de nostre Couronne,
& la force redoutable à nos Ennemis. Il ne faut
donc pas s’étonner s’ils sont touchez de cette noble passion
de deffendre dans nostre bas aage nostre Personne & nostre
Couronne, contre la rebellion de nos Subjets, & s’ils
s’opposent aux injures entreprises d’vne faction qui est sans
exemple, que l’on void naistre au milieu du plus glorieux
Regne qui ait jamais esté, & au moment que nous esperions
donner la Paix à nos Peuples, qui eust reparé toutes
leurs pertes, & recompensé avantageusement tous leurs
trauaux & leurs souffrances, ils se voyent à la veille d’estre
plongez dans ces grandes miseres & calamitez qui suiuent
ordinairement les guerres Ciuiles. C’est l’ouurage de ceux
qui publient par tout, qu’ils ne peuuent souffrir la mauuaise
administration de nostre Estat, lors qu’elle est admirée
mesme par nos Ennemis, qui ont esté contraints de ceder à
la puissance de la France, si heureusement gouuernée : Mais
apres auoir esté vaincus par la force de nos armes, & apres
auoir esprouué que la France reünie en toutes ses parties
estoit inuincible : ils ont souuent eu recours à leurs artifices
ordinaires, de nous affoiblir par nos diuisions ; Iusques icy,
leurs desseins auoient tourné à leur confusion ; mais enfin
l’infidelité de quelques vns de nos Subjets leur ont ouuert
la porte, & nous sõmes sur le point de les voir entrer en nostre

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Estat, pour y exercer toutes les violẽces que la passatiõ
d’vn ennemy irrité peut conceuoir, pendãt que nos armées
sõt occupées pour Nous opposer à la faction qui s’est soûleuée
contre nous : Nous esperons que ceux qui sont autheurs
de tous ces malheurs, seront enfin touchez d’vn sensible regret
de se voir, separez de Nous, & qu’il retourneront dans
l’obeissance de leur legitime Prince, pour combattre nos
Ennemis plustost que de fortifier leur Armée : Cependant
nous croyons estre obligez de les inuiter à se rendre à leur
deuoir & de leur commander de venir au plustost prés de
Nous pour y receuoir les effets de nostre generosité, & de
nostre amour, qui veut plûtost ses subjets, que de les perdre :
Que s’ils méprisent nostre commandement, nous sommes
resolus de leur faire porter les peines, que meritent leur
desobeïssance, & de nous seruir de l’authorité que Dieu
nous a donnée, pour les declarer Criminels de leze Majesté.
A CES CAVSES, de l’auis de la Reyne Regente nostre tres-honorée
Dame & Mere, de nostre tres-cher & tres-amé
Oncle le Duc d’Orleans, & nostre tres-cher & tres-amé
Cousin le Prince de Condé, & des autres Princes, Ducs,
Pairs, & Officiers de la Couronne, & autres grands Seigneurs
estans prés de Nous, & de nostre certaine science,
plaine puissance & authorité Royale ; NOVS auons par ces
presentes, signées de nostre main, declaré & declarons le
Prince de Conty, le Duc de Longueuille, le Duc d’Elbœuf,
le Prince de Harcourt, de Rieux, de Lislebonne, le Duc de
Beaufort, le Duc de Boüillon, le Duc de Brissac, le Mareschal
de la Mothe, le Prince de Marcillac, le Marquis de
Narmoutier, de Vitry, & autres leurs Adherans & Complices,
attaints & cõuaincus du crime de leze Majesté pour
leur rebellion, & desobeïssance notoire. Et comme tels, les
auons priuez dés à present, de tous honneurs, charges, dignitez
& benefices qu’ils possedent en nostre Royaume.
ORDONNONS, que leurs biens demeurent à nous aquis
& cõfisquez, & reünis à nostre Couronne, si dans trois iours,
du iour & datte des presentes, ils ne se rendent prés de

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Nous, pour y rẽdre seruice & la fidelité qu’ils nous doiuent.
Faisant cependant tres-expresses inhibitions & deffences à
tous nos Officiers, Maires, & Escheuins de nos Villes & nos
autres Subjets de les recõnoistre, ny d’obeïr à leurs Ordres,
à peine de desobeïssance, & d’estre declarez, cõme Nous les
declarons en ce cas, Criminels de leze Majesté. Si donnons
en mandement à tous nos Officiers, & Subjets d’obeïr à la
presente Declaratiõ, & de tenir la main à ce qu’elle soit executée
de point en point selon sa forme & teneur. CAR TEL
est nostre plaisir, EN TEMOIN dequoy nous auons fait
mettre nostre sel à ces presentes, que nous auons fait lire
& publier en nostre Conseil, la Reyne Regente nostre tres-honnorée
Dame & Mere presente, où estoient aussi nostre
tres amé Oncle le Duc d’Orleans, nostre tres cher & tres-amé
Cousin le Prince de Condé, & autres Princes, Ducs,
& Pairs, Officiers de nostre Couronne, & plusieurs grands
Seigneurs estant prés de Nous. Donné à Saint Germain en
Laye, le vingt-troisiesme jour de Ianuier, l’an de grace mil
six cens quarente neuf, & de nostre Regne le sixiesme. Signé
LOVIS, Et plus bas, par le Roy, la Reyne Regente
sa mere presente, DE GVENEGAVD. Et scellé sur double
queüe de cire jaune.

 

Collationné à l’Original par moy Conseiller
Secretaire du Roy & de ses Finances.

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