Davenne, François [?] [1650], LETTRE PARTICVLIERE DE CACHET envoyée par la REYNE REGENTE A MESSIEVRS DV PARLEMENT. Ensemble vne response à plusieurs choses, couchées en la Lettre envoyée au Mareschal de Turennes, & aux avis donnez aux Flamans. , françaisRéférence RIM : M0_2250. Cote locale : C_3_9.
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AVTRE REFVTATION.

O Le dangereux esprit, disent les Satellites des tirans, à
cause que ie les arguë, mais (apres auoir supplié le Sage
Lecteur de mettre de la difference entre la passionnée inuectiue
de quelques-vns, & ma iuste reprimande) ie leur de mande
quel est le plus dangereux, le leur ou le mien ? ou le leur
de boire le sang d’vne infinité d’hommes, ausquels par les barbares
extorsions qu’ils exerçent en leur endroit, ils arrachent
les entrailles, afin de manger encore leur chair, ou le mien
de combattre ces inhumains qui de solent leurs freres auec des
cruautez qui font horreur aux demons, & d’exciter les creatures
de ne l’endurer plus ? est-ce eux qui sont es moins dangereux,
d’imposer aux peuples les peines des damnez, où est ce
moy en leur donnant le moyen de se procurer les joyes du Paradis ?
Est-ce l’esprit des tigres qui ne cause pas le danger en
faisant mal ; Où est-ce le mien qui sera appelle le perturbateur
parce que ie conseille aux hommes de se défier d’vne fausse
paix s’ils veulent estre vrayement paisibles, & de chercher le
repos à la pointe d’vne genereuse guerre ? Ie fais iuge de cela
tout le monde. Que chacun voye s’il ne vaut pas mieux que
trois ou quatre méchãs perissent, plustost que de les voir joüer ;
comme auec des verres qu’on casse, de cent milliers de creatures
qui sont aux derniers abbois ? Ie ne suis pas dangereux,
quoy que ie tranche ces Pantheres, mais ce sont les monstres
de Mazarin qui sont à craindre, quoy qu’on les flatte encor.
Pour moy ie ne sçaurois, la verité ne peut flatter. Elle n’est pas
venuë apporter le calme à ces malices, qui sont publier, Comme
vn axiome veritable, que la paix la plus pauvre & la plus déchirée,
est preferable à la guerre la plus glorieuse, & la plus magnifique ; Mais
le glaiue de diuision afin de les punir de ces execrations. On
voit à present ce qu’opere vne pauure paix déchirée, aussi bien
qu’on ressentiroit à cette heure les fruits qu’vne guerre genereuse
nous auroient amenez, si on auoit suiuy la pointe des
armes. Ie m’estonne que la foudre ne tombe du Ciel, sur ces
maudits Escriuains, lesquels font endormir les peuples, en leur

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promettant par la voye du vice vn repos qu’on ne peut obtenir
que par le chemin de la vertu : quoy qu’ils sçachent qu’vne
mauuaise cause ne peut produire vn bon effect. Lisez à present
les Souspirs François sur la Paix Italienne, & vous verrez vn
Prophete qui a predit les malheurs de ce temps. Iettez en suite
la veuë sur la response qu’on y fit, & vous contemplerez vne
vaine qui merite la malediction de la terre & du Ciel. C’est à
present que ces deux pieces doiuent estre examinées mot à
mot, & non pas au moment qu’elles se firent en chaleur. Elles
ont pris vn autre visage : la verité de l’vne, & le mensonge de
l’autre, y sont par experience appointées contraires tout à fait.

 

 


Arracher la Paix des Prouinces,
Aigrir les Peuples & les Princes,
Taxer vn Auguste Senat,
Et comme vne horrible furie,
Bouleuerser tout vn Estat,
Est ce là seruir sa Patrie ?

 

Cette horrible
periode est
couchée à la
fin de la refutation,
qui
fut faite aux
Soupirs François,
sur la
Paix Italienne,

Voila ce qu’on dit contre les Souspirs François : mais ie responds
par son mesme discours à l’Autheur de ce Sixain.

 


La fausse Paix dans les Prouinces,
Rend-elle bien heureux les Princes,
Non plus que l’Auguste Senat,
Et d’auoir par la flatterie
Acheué de perdre l’Estat,
Auez vous seruy la Patrie ?

 

La bonne guerre auroit-elle arraché la Paix des Prouinces,
& la fausse paix y a-t’elle mis la tranquillité ? La bonne guerre
auroit-elle aigry les Peuples ny les Princes, puis qu’elle les auroit
menez à vn sainct repos ? Et la fausse paix de Mazarin à-elle
pacifié les peuples ny leurs Altesses, puis qu’il bouleuerse les
vns dans les Prouinces, & qu’il tient les autres dans vne prison ?
Est-ce mal fait de taxer vn AVGVSTE SENAT quand il s’oublie,
puis que c’est pour son bien ? Et est-ce bien fait de le flatter
quand il prend le change, puis que c’est pour son mal ? appellez
vous renuerser l’Estat, estre vne horrible furie, & ne seruir
pas son pays, quand on luy conseille la generosité qui le
peut sauuer ? Et est ce en estre le protecteur, le defendre, & luy
faire vn bon office de l’auoir confirmé dans vne lasche Paix

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qui le perd ? ô la sche Escriuain que vous l’entẽdez mal, de mentie !
ô interessé Iuge que vous auriez bien fait, de ne Iuger
pas la verité ! ô aueugle cenceur que vous eussiez bien reussi
de ne fulminer point contre celuy qui attaque tous les partis,
sans auoir d’autre visée que la gloire de Dieu, & non pas le dessein
de se mettre vitieusement en faueur, en soustenant mal
quelque costé, comme vous auez voulu faire par caprice
contre la raison. Certes le Parlement, les peuples & les Princes
vous sont beaucoup obligez, puis que vostre meschant
repos rend les vns si contens, & met les autres à la veille
d’vn si grand bon-heur ! comme au contraire, le Senat, leurs
Altesses, & le peuplic n’auront pas bien de l’obligation à vn
iuste qui les arguë à tous pour leur profit ! vous vouliez par le
mensonge acquerir la bonne grace, de tous les partis, en les
flattant, & pour cela chacun vous doit abhorrer, parce que
vous les perdez : au contraire ie veux en disant la verité, m’attirer
la malediction de chacun, au moment que ie les pique,
mais tous me beniront, s’ils suiuent mon conseil, parce que ie
les àuray sauuez. Et plust à Dieu, que la Regente, le Duc
d’Orleans, Beaufort, le Coadiuteur & autres, connussent sans
passion l’importance de ce que ie leur dis, afin de se donner
garde du Mazarin ! au lieu de m’exposer au supplice, par ce
que ie les tance, ils me cacheroient dans leur sein, afin de m’en
remercier ; car quoy que ie leur sois rude, qu’ils sachent que ie
n’ay aucune particuliere animosité contr’eux, au contraire, ie
leur ay de l’obligation, sur tout à sa Majesté Regente, & à Monsieur
le Coadjuteur : Ie pretends les reconnoistre en leur disant
la verité. Il fait bon estre contristé, pour estre bien réjouy.
La bonne tristesse opere penitence, c’est pour quoi elle ne confond pas ;
& la mauuaise ioye presomption, à raison dequoy ie fais bien de vous
mortifier, voyant que vous vous oubliez. Hors de ce rencontre, auquel
Dieu m’oblige de luy obeïr, sans rien craindre, i’aurois
esté marry de toucher à leur moralle reputation ; mais voyant
que Dieu les endurcit comme à Pharaon, en ne permettant
pas qu’ils se reconnoissent, pour les laisser inueterer, ie leur represente
que le dernier terme de la diuine patience s’épuisera
au moment de leur derniere malice, apres laquelle le Tout-puissant
mesurera iustement les coulpables, de la façon qu’ils

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ont iniustement mesuré les gens de bien. * La Colombe de la
Paix les obombre de toutes parts, & ils la combatent en tous
lieux : ils la demandent apparemment des leures afin d’amuser
les peuples, en leur faisant voir qu’ils s’empressent pour
leur obtenir le repos ; & ils l’abhorrent de cœur, en faisant
rompre tous les traittez qui les pouuoient conduire à quelque
tranquillité. Ils veulent ce qu’ils ne veulent pas, quand ils feignent
de vous procurer vne tranquillité, qu’ils ne meritent
point : Ils desirent auoir seuls la bonnace, en peschant dans
l’eau trouble de tous, & chacun se doit procurer le calme en
les plongeans dans les enfers. La Iustice & la raison consentent
que chacun aye à son tour de la misere & du bon-heur. Ie tranche
court, quand cela me deuroit faire hacher. A des maladies
inueterées, il faut des remedes violents : il ne conuient pas
s’amuser à découdre des maudites maximes, il les faut rompre
tout à fait : pour cela, auec l’esprit du Verbe, ie prends
le foüet de sa parolle, pour chasser du temple du monde,
les payens & peagers qui l’ont peruerty : peut-estre quelque
méchant imitera Sainct Matthieu, & qu’à ma iuste reprimande,
il tachera de venir homme de bien.

 

 


Les flatte qui voudra, pour moy ie ne scaurois
I’applaudis les aigneaux, ie foüette les pantheres,
Et quand on me metroit comme christ à la Croix,
Ie battray les tyrans & soustiendray mes freres.

 

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