Anonyme [1649], LE TRIOMPHE DE MONSEIGNEVR LE DVC DE BEAVFORT. , françaisRéférence RIM : M0_3879. Cote locale : A_7_55.
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LE
TRIOMPHE
DE MONSEIGNEVR
LE DVC DE
BEAVFORT.

MONSEIGNEVR,

Il faut aduoüer que vostre nom est si
glorieux, & que vos armes sont si puissantes,
qu’elles ont ietté la terreur & l’espouuante

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dans les cœurs de nos ennemis, qui
ont esté contraints de se retirer, & d’abandonner
leur pernicieuse entreprise. Nos
Lys espanoüis par vos victoires ont embaumé
toute la France de l’agreable odeur de
vostre courage. Vos lauriers sont si verds,
qu’ils doiuent seruir d’ombrages & de seureté
à toute ce Royaume, & semblent vouloir
esleuer vostre gloire sur la ruine de
ces mutins, & de ces seditieux, qui sont forcez
de dresser des Autels à vostre vertu, connoissans
que tous vos efforts n’ont point
d’autre fin que de proteger les oppressez,
desengager les Innocens, & faire ployer
l’insolence d’vn estranger, qui par ses abominables
desseins taschoit à troubler & ruiner
entierement ce Royaume. L’estat dans
lequel nous nous voyons maintenant est
vne preuue manifeste, & vne marque euidente
de toutes ces vertiez : car s’il est vray
que la necessité des affaires n’ait iamais fait
gouster quelques amertumes, quels plaisirs
& quelles douceurs n’auons-nous pas receus
par le bruit des combats, dans lesquels vous

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estes tousiours demeuré victorieux ; combien
d’exploits signalez nous ont resioüis,
lesquels dans cent ans à peine passeroient
pour veritables, & trouueroient plus d’entrée
aux yeux que dans la pensée. Les Histoires
nous apprennent que les Romains
s’asseurant entierement dans leurs folastres
augures conceurent vne grande esperance
de l’Empire d’Anthonin, & de
Marc Aurele. Tous les François, Monseigneur,
en la confiance de vos vertus
establissent tout leur bon heur, & tout le
repos que vous allez rendre a ce Royaume.
L’antiquité, bien qu’orgueilleuse de
ces Heros, confesse n’auoir iamais veu des
faicts plus glorieux, ny oüy des merueilles
plus veritables, & ces grandes conquestes,
qui par leur recit causent de l’estonnement
à toutes les Nations ne peuuent
estre comparables aux vostres, qu’auec vne
grande disproportion. C’est vous,
Monseigneur, qui par des ressorts inoüis
de vostre prudence, auez en vn moment
esbranlé l’establissement, & le fondement

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de l’entreprise de ce mauuais Ministre, &
ceux qui estoient de son iniuste cabable, aduoüent
que c’est vostre grandeur de courage
qui a abbattu ses mouuemens sourcilleux,
& qui a reduit toutes ses vaines pretentions
en fumée & poussiere.

 

Personne ne doute que vos predecesseurs
ne se soient rendus recommandables
par de rares perfections, les vns par l’excellence
de leur esprit, & par leur admirable
prudence, les autres par la Iustice, &
grandeur de leurs actions : mais nous pouuons
voir en vous seul toutes ces belles
qualitez qui leur auoient esté departies
en détail, & dire qu’en vous possedant
nous ioüissons des appanages de toutes les
vertus qui se font logées dans vostre personne :
comme dans vn rare suiet. Iamais
Prince n’a paru plus miraculeux en ses effects,
& en ses executions, puis que l’on
vous voit tousiours en haleine, tousiours
couuert de poussiere & de sueur comme de
lauriers, tousiours prest à vestir le harnois,
& le pied à l’estrier, pour courir la carriere

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de l’immortalité, & qui n’auez point d’autres
esbats qu’vn rude cliquetis d’armes, &
l’effroy de quelque bataille. Enfin, Monseigneur,
le Soleil, va, esclaire vos faits par
tout, où sa lumiere esclattera, & ne nous
donnera plus le iour qu’en nous ramenant
l’admiration de vos vertus.

 

Viuez donques, Monseigneur, mais viuez
pour la vie des François, qui ne vous
admirent que comme l’Ange Tutelaire
de la France, & qui ne vous considerent
que comme l’arc-boutant de son repos, &
de sa felicité ! Bel Astre, qui pouuez dissiper
les orages de la guerre, r’amenez-nous
nostre Monarque triomphant que ce
Lyon nous a rauy, rendez-nous cette
Couronne d’oliues qu’il nous a tant de
fois ostée. Faites, faites, que le bon-heur
de la France ne soit pas dauantage alteré,
que nos Lys ne soient point fanez, que
ce Royaume soit le Paradis des hommes,
& en reconnoissance de tant de graces &
de faueurs, nous prierõs le Tout-puissant
qu’il ne permette pas que vos lauriers se

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dessechent, qu’il rende vos victoires solemnelles,
que les armées de nostre Roy
sous vostre sage conduite soient tousiours
triomphantes, & que sa faueur seconde
tousiours vos desseins, & ne se lasse iamais
de verser sur vous ses benedictions. Ce seront
les vœux & le souhaits continuel, de
tous les bons François.

 

FIN.

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