Anonyme [1651], LE MANIFESTE VERITABLE DES INTENTIONS DE MR LE PRINCE, QVI NE TENDENT qu’au restablissement de l’authorité Souueraine, & du repos des peuples. Presenté à Nosseigneurs de Parlement. , françaisRéférence RIM : M0_2404. Cote locale : B_14_23.
page précédent(e)

page suivant(e)

-- 8 --

Monsieur le Prince ne sçauroit demander l’establissement d’vn Conseil
des-interessé, & pour cette fin estably par la participation de S. A. R. & des
Princes du Sang ; sans auoit vn parfait dessein, de faire refleurir l’authorité
du Roy dans sa premiere vigueur : puisqu’il est constant que les Fauoris n’ont
rien de plus ordinaire, que de plus pretexter l’authorité du Roy à leurs plus
pernicieux desseins ; & de se seruir tousiours de ce voile, pour couurir toutes
leurs plus mauuaises intrigues. Quel fut le pretexte du Mazarin, lors qu’il
emprisonna les Princes ? l’authorité du Roy : lors qu’il marcha contre les
Bordelois ? l’authorité du Roy : lors qu’il fit emprisonner Messieurs de Beaufort
& de la Motte ? l’authorité du Roy : Mais de grace, Mon Lecteur, quelle
en estoit la veritable raison ? n’est-ce pas d’oster le plus puissant obstacle de
son ambition, en s’asseurant de M. le Prince ? de restablir le Duc d’espernon,
dont il auoit destiné le fils pour vne de ses niepces ? & de perdre deux
Heros qui luy estoient importuns, parce qu’ils n’auoient assez de lascheté
pour luy estre complaisants ? qu’en est-il arriué ? il a exposé l’authorité du
Roy, qu’il pretextoit dans l’emprisonnement de M. le Prince, puis qu’il a
esté contraint d’en lascher la prise, & de receuoir le dementy de ses calomnies
par vne solemnelle iustification : il a exposé la mesme authorité du Roy
deuant Bordeaux, en ce qu’il la reduit à traitter auec ses sujets ; & leur accorder
par traitté, ce qu’il leur auroit refusé par amour : il l’a encor exposée,
lors que le succez a fait voir qu’il ne s’en estoit seruy que pour oppresser deux
Illustres Innocents.

Voilà les necessitez funestes, ausquelles les Fauoris sont bien souuent reduits ;
par la necessité de couurir tous leurs mauuais desseins, qu’ils sont encor
obligez de brasser par la necessité de se maintenir : Mais ces malheurs ne
seroient pas à craindre si le tymon d’vn Estat estoit gouuerné par plusieurs
mains desinteressées : parce que ne pouuant point pretexter l’authorité du
Roy leurs desseins particuliers, par la necessité que l’honneur leur impose
de n’embrasser que des generaux ; & par l’impuissance qu’ils ont d’en entreprendre
de particuliers ; il faut absolument qu’ils ne conspirent ensemble
que pour obuier à toutes les bresches, que les diuerses conjonctures d’Estat
pourroit faire à l’authorité Souueraine.

Monsieur le Prince est-il donc coupable, Mon cher Lecteur, puis qu’il ne
demande que sa seureté ? est il desraisonnable de la demander, puisque tous
ses ennemis & les nostres sont comme les maistres de la faueur ? a-t’il aucun
mauuais dessein contre nous, puis qu’il n’est en peine que de rencontrer les
moyens pour l’establissement de nostre repos ? En veut il à l’authorité du
Roy, puisqu’il ne poursuit que l’establissement d’vn Conseil, qui seul la peut
faire fleurir. Ne le, dissimulons point ; il faut que ce caractere luy soit empreint
sur le visage, pour entrer dans le nombre des Heros ; & qu’vne iniuste
persecution soit le dernier sceau d’vne vertu, qui ne seroit point la plus illustre
du siecle, si elle n’estoit pas le plus ordinaire sujet de l’enuie de tout ce
qu’il y a de lâche dans le monde.

FIN.



page précédent(e)

page suivant(e)