prestes, ne manqueroit pas d’intimider tout l’Estat par
vn surcroy d’espouuante, & d’obliger les plus determinez
à tourner casaque au party de ce mesme Prince,
par l’aprehension raisonable qu’ils auroient, de n’estre
pas puis apres reçeus à composition, lors que ce mesme
party viendroit à manquer de forces pour se soustenir
par vne plus longue resistance ; que d’attendre
plus long temps, c’estoit donner trop de loisir à M. le
Prince de se renforcer, & de reparer peut-estre les bréches,
qu’on auoit desia faites à sa reputation ; & qu’en fin
il ne pouuoit estre de temps plus auantageux pour restablir
le C. M. auec authorité, qu’apres les premiers
triomphes, que sa M. venoit de remporter sur ceux, qui
se portoient pour les principaux ennemys de ce restablissement.

Ces raisons auoient quelque apparence de bonté :
mais en effet à les considerer sans passion, elles n’auoient
de force que dans leur éclat, ny de fermeté que
dans leur exterieur : par ce que ces beaux aduantages
pretendus, dont ces politiques se flatoient auec tant de
faste, ne meritoient pas d’estre cousiderez iusqu’à ce
point là que d’en vouloir faire les prejugez infaillibles
d’vne suitte triomphante, & les fondemens d’vn retour
qui deuoient esbranler tout leur party. Outre
qu’ils deuoient aprehender que l’estat qui les regardoit
auec quelque sorte d’aprobation ou du moins auec indifference
pendant que sa Majesté protestoit solemnellement
contre le retour du Mazarin ; changeroit infailliblement
de sufrage en les considerant comme des iniustices
de la fortune, lors que le mesme Mazarin s’en
preuaudroit pour faciliter son retour. Mais neanmoins
sa M. ne laissa pas d’y donner les mains, & d’enuoyer
ses ordres au C. Mazarin, qui rodoit pour lors auec cinq
mil hommes sur les frontieres de l’Estat, attendant
auec impatience, ce qu’il eust deub luy mesme retarder
par son conseil, si la passion de se voir restably, ne l’eut
aueuglé, pour le faire conclure au plus illustre sujet
de ses repentirs.