Anonyme [1649], LE FORT ET PVISSANT BOVCLIER DV PARLEMENT, EN FORME D’APOLOGIE. DEDIÉ AV ROY. , français, latinRéférence RIM : M0_1402. Cote locale : A_3_64.
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Que fait le Parlement, SIRE, il essaye par les mesmes voyes de
clemence & de douceur à s’opposer à la rapidité de ce torrent, car
estans conuaincus que le mal seroit sans remede, s’il le laissoit si longtemps
temps sans secours, & qu’il alloit tous les iours iettant de si profondes
racines, qu’à la fin il seroit impossible de le destruire, il prend resolution
de s’vnir. Mazarin estimant que cette vnion de toutes les
Compagnies, qui ne tendoit qu’à remedier aux abus par les moyens
les plus sages & les plus moderez, estoit absolument sa ruïne ; s’y
estant opposé par des menaces & des violences inutiles ; il fait mine
de plier, il reçoit les remonstrances, il aggrée les assemblées ; &
voyant que l’on commençoit par la reuocation des Intendans des
Prouinces, il prie que l’on retarde l’execution de cét Arrest, Monsieur
le Duc d’Orleans en demande la surseance ; & ayant contre les
coustumes fait venir en son Palais des Deputez pour conferer, il
amuse nos Magistrats par de belles promesses : Le Chancelier s’engage
de faire vne Declaration conforme a cét Arrest, le Parlement
se soumet ; & le lendemain Monsieur le Duc d’Orleans, Oncle de
vostre Maiesté, en apporta vne, mais bien differente de son original,
ne faisant aucune mention de la dissipation des finances, & ne parlant
au lieu de la quatriéme partie des Tailles, que de la huictiéme, &
cela encore auec des conditions si onereuses, que cette decharge
estoit moins aduantageuse qu’inutile & importune. On ne manque
point, SIRE, d’en refuser la verification : ce refus n’aggreant pas,
donna l’inuention de suppléer à son defaut par l’establissement d’vne
Chambre de Iustice : On le propose dans vne seconde Declaration
dont l’on chargea encore son Altesse, pour la porter à la Cour.
Ces Argus clairvoyans, ces Lynx tous pleins d’yeux & de lumieres
en eurent assez pour reconnoistre que c’estoit vne fourbe & vne inuention
pour sauuer ceux qui auoient tout perdu ; neantmoins dissimulant
encore cette fois, ils fléchissent pour ne pas rompre, & pour
auoir plus de liberté de soulager la misere des peuples, par leurs déliberations
& leurs conseils. Leur douceur, SIRE, ne fut pas imitée,
ils ne receurent pas tant qu’ils donnerent ; ils accordent tout ne
pouuant rien refuser ; & les Ministres ne manquent pas de s’opposer
à tous leurs Arrests de Police, & de la reformation necessaire à vostre
Estat.

Pour cela, SIRE, Mazarin vous faisant le Ministre de ses méchancetez,
& de ses fourbes, vous fait prendre seance en vostre lict
de Iustice, auec vne Declaration en main qui n’estoit qu’vne illusion



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