Anonyme [1649], LE CHEVALIER CHRESTIEN PARLANT DES MISERES DV TEMPS, A LA REYNE REGENTE. , françaisRéférence RIM : M0_696. Cote locale : C_1_14.
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d’independant sous les chaisnes les plus insupportables :
Le Dieu mesme qui nous a formez ne nous violente
pas, quoy que son Authorité souueraine luy
donne vn droict absolu dessus nos esprits ; & si sa grace
demeure souuẽt victorieuse de nostre cœur, c’est auec
des charmes qui nous surprennent amoureusement,
& non pas auec vn Empire, qui nous assujettisse necessairement.
Quelle apparence donc que les Roys qui
ne sont que les Lieutenans de cette Maiesté infinie,
captiuent nostre esprit sous leurs volontez : C’est vn
secret toutesfois que vostre Maiesté tient entre ses
mains, Madame, nos cœurs se laissent aisément lier
à l’amour, & cet agreable principe de nostre liberté
rend souuent les armes aux agréemens d’vne amoureuse
conduite qu’il auoit refusée à la violence du
gouuernement : Comme l’amour est le pere de l’amour,
il est impossible que nous n’aimions vn Prince,
qui nous honore de sa bien-veillance ; & comme nous
perdons librement la vie pour vn objet aimé, nous
baisons amoureusement les chaisnes qui nous captiuent
sous l’authorité d’vn Monarque misericordieux.
Vostre Empire doit donc estre doux, Madame, si
vostre Maiesté desire regner esgalement dessus nos
cœurs, & dessus nos biens, vous nous mettez autrement
dans vn estat de violence, par ce que donnant
vn mouuement estranger à nostre esprit, vous empeschez
le libre exercice de nos facultez superieures ;
& comme la nature abhorre tout ce qui est violent,
tesmoins ces animaux qui meurent enragez plustost


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