Anonyme [1649], LE CENSEVR POLITIQVE. AV TRES-AVGVSTE Parlement de Paris. , françaisRéférence RIM : M0_668. Cote locale : E_1_120.
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Cependant par defauts surpris en trahison,
On voit l’homme d’honneur estre mis en prison.
Et son bon Procureur, bien qu’il ait fait la faute,
Parlera d’vne voix encore la plus haute :
Disant au prisonnier qu’il est vn negligent,
Qu’il attendoit de luy tous les iours de l’argent,
Afin que ce defaut on peust faire rabattre :
Puis faisant le subtil, & plus zelé que quatre :
Vous aurez, dira-t’il, de tres-grands interests,
Mais tout au mesme temps suruiennent les arrests,
Si bien qu’en cét estat on luy fait vn dommage
Qui met tout son credit & son bien au pillage.
Car auant que fournir deffences ny debat,
L’vn gaigne par defaut, puis l’autre le rabat.
Ainsi cinq ou six fois le de faut se renuoye,
Pour plumer le client, & tirer sa monnoye,
Et bien qu’estant à tort aux prisons detenu,
Il ait vn Iugement par defauts obtenu ;
Il ne doit pourtant pas esperer qu’on le sorte :
Car si pour les defauts on fait ouurir la porte,
C’est pour executer les contraintes par corps,
Et non pas pour tirer vn opprimé dehors.
Tant il est vray, Messieurs, que le siecle où nous sommes
A peruerti tout ordre à la perte des hommes.

 

 


Vn grand abus encor y demeure impuni,
Quand pour vn cas douteux, ou bien indefini,
Ou quand pour vne somme excessiue en demande,
On fait vn prisonnier, ou qu’on le recommande ;
C’est pource qu’on ne fait plus de distinction
D’vser de la contrainte au lieu de l’action.
Et qu’on ne punit pas l’attentat des faussaires
Qui suppriment tousiours les raisons necessaires ;
Et taisent faussement la iuste exception
Qui suspendroit le cours de l’execution,
Dont la rigueur souuent peut dans la consequence,
Du credit & des biens causer la decadance.

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