Anonyme [1649], L'ANTI DESINTERESSÉ OV L’EQVITABLE CENSEVR DES LIBELLES SEMEZ DANS PARIS SOVS LE NOM DV DES-INTERESSÉ. COMMENCANT PAR CES MOTS, Pauure Peuple abusé; Desille les yeux, & tendant à des-vnir les Habitans de cette Ville d’auec les Princes & le Parlement. , françaisRéférence RIM : M0_87. Cote locale : A_3_31.
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nous faire en cette sorte seruir d’instrumens à la fureur du Cardinal
qui a recours à ce dernier moyen de se satisfaire, comme l’ayant
tousiours estimé infaillible.

 

De vray, s’il nous arriuoit ce malheur de nous des-vnir d’auec nos
Chefs, ce fier & cruel aduersaire auroit le contentement qu’il pretend.
Il auoit attendu cette diuision de la fortune, & croyoit auoir
ce triste plaisir de contempler nos propres mains employées à faire
de Paris vn Theatre ensanglanté des meurtres de tous ses Citoyens.
Mais Dieu qui a en horreur des projets si tyranniques en disposa autrement :
& ce iour consacré à la memoire des iustes honneurs que
les Mages tendirent à son Fils : & que nostre Ennemy par vne prophanation
execrable auoit choisi pour l’enleuement de nostre
Roy, & la destruction de ses plus fidelles Suiets, n’eut rien de plus
tragique que la douleur dõt chacun fut touché d’auoir perdu la presence
de cet aimable & bien-aimé Monarque qu’on luy auoit rauy.

Cependant, le Cardinal ayant esté trompé en cette esperance, a
recours auiourd’huy à l’artifice, & pour paruenir à son but fait blâmer
ceux entre les mains desquels nous auons remis nostre commune
querelle.

Mais, l’arcboutant de sa malice, cette sourde trompette de guerre,
cette allumette de diuision ; En vn mot ; ce Des-interessé remply de
son interest propre & de celuy de nostre Ennemy, pense en vain
auoir vn bõ succez de la mine qu’il a preparée à nostre ruïne, son dessein
est auorté des sa naissance, la verité qu’il déguise pousse ses lumieres
au trauers de ses mensonges, & nos propres experiences nous
enseignent beaucoup mieux, quel iugement nous deuons faire des
choses, que sa rethorique falacieuse.

Il est bien hardy de nous vouloir obliger à croire que depuis
l’administration de la Reyne, le peuple n’a point esté foulé de nouuelles
charges, mais que plustost il a receu de notables soulagemens :
Veu que iamais les Suiets de ce Royaume n’ont tant souffert d’impots,
que depuis cette Regence. Dequoy il ne faut point d’autres
preuues que l’extréme pauureré & misere d’vn nombre infiny de
familles desolées.

Mais, il n’est pas mieux aduisé de nous imposer des crimes dont
nous voudrions punir de mort en tout autre, la seule pensée de
les commettre, d’auoir pris les armes contre nostre Roy : Nous qui
ne respirons que pour ce ieune Monarque & pour sa gloire : Nous
qui n’auons rien entrepris que pour la deffense de son authorité &
de son innocence : Nous qui n’auons & n’aurons iamais rien tant à



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