Saint-Joseph (révérend père dom Pierre de = R. P. D. P. D. S. J.) [1649], CATECHISME DES PARTISANS, OV RESOLVTIONS THEOLOGIQVES touchant l’Imposition, Leuées & Employ des Finances, Dressée par Demandes & Responces, pour plus grande facilité. , françaisRéférence RIM : M0_652. Cote locale : D_1_9.
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des Estats & sangsuës des Republiques ?

 

D. Si cela est ainsi, ie trouue la condition des Magistrats bien rude & bien perilleuse
pour la conscience.

R. Il vous est libre d’auoir telle pensée qu’il vous plaira, fur la difficulté qui se
rencontre dans l’exercice de la Magistrature, mais cela n’empesche point, que la verité
ne demeure constante en la sorte que ie viens de la proposer, si l’on s’en veut seuir
Chrestiennement, & selon les regles de l’Euangile. Aussi l’Escriture saincte defend
aux personnes de s’engager dans ces charges, si elles n’ont vn cœur masle & genereux,
pour resister auec courage à la licence des meschans, & pour la punir auec
le mesme esprit lors qu’elle viendra à leur connoissance, sans se rendre esclaues de sa
fortune, ny de la faueur ; noli quærere fieri iudex, nisi valeas trrumpere iniquitates. Et
si l’on sçauoit les conditions & les qualitez, que l’on requeroit en la personne des
Iuges dans l’ancienne Loy, il n’y a aucun qui ne restast estonné, en les comparant
auec celles dont on se contente auiourd’huy, pour leur donner l’authorité sur la
vie & sur les biens des hommes. N’estimez donc pas que la difficulté en la matiere
que nous traittons ; puisse deuant Dieu seruir d’excuse aux Magistrats, Ie le repete
encore, que dans ce deplorable estat, ou ces harpies humaines ont reduit la France,
& dans le peril de laquelle, celuy de l’Eglise se rencontre, ils sont obligez sous peine
de crime, non seulement de leur faire rendre gorge, mais de les punir. Et s’il se rencontroit
quelqu’vn qui osast tenir le contraire, il meriteroit d’estre l’anatheme des
hommes, comme il le seroit en effect, & de Dieu & des Anges.

D. Et si le Roy d’authorité absoluë les veut laisser dans la possession de ces biens
si iniustement amassez, qu’il fasse vn Edict d’abolition, & l’enuoye aux Cours
Souueraines pour le verifier.

R. I’ay desia dit que par les regles de la conscience, le Roy ne le peut pas, parce
que ce n’est pas son bien ; Et pour ce qui regarde les Magistrats des Cours Souueraines,
ils ne seront point absous deuant Dieu, pour dire le Roy nous l’a commandé ;
car comme ils sont establis & preposez pour seruir de lien entre le Roy & les
peuples & pour l’administration de la Iustice auec equité, ils doiuent dire, SIRE,
cela n’est pas iuste ; ils doiuent faire leurs remonstrances, & si au preiudice d’icelles
on veut passer outre, ils doiuent laisser agir la puissance Souueraine par elle
mesme, sans y prester leur nom & leur consentement, & sans se souiller du sang de
leurs freres, ny s’engager dans le peril de la restitution, par vne iniuste & illegitime
approbation.

D. Mais comment faire cette restitution au peuple, puis que vous dites que c’est
à luy à qui le tort est fait : Faut-il aller dans les Prouinces & informer de ce dont
chaque particulier peut auoir esté vexé, afin de le luy rendre ?

R. Non, il n’est pas necessaire de prendre cette peine, ny de proceder en la maniere
que vous vous figurez, & qui seroit aussi ridicule comme impossible. Il y a
vne autre façon de restituer & qui est fort aisée, qui est, de soulager le peuple d’autant
de ce qu’il doit contribuer pour la necessité de l’Estat, en luy imposant rien
du tout iusques à ce que le pressis de ces sangsuës soit employé. Par exemple, en
cette année il faut trente millions de liures pour faire la guerre, il faut les prendre
dans la bource des Partisans, & des Traittans, & non pas les imposer sur le
peuple, qui par ce moyeu se trouuant dispensé de la contribution qu’il deuoit faire
cette année, se trouue par mesme voye restitué de ce que l’on luy a exigé de trop
les années precedentes. Et cette restitution ainsi faite n’est-elle pas bien iuste ? n’est
elle pas bien aisée ?

D. Vous me fermez la bouche, & i’aduoue que ie ne me fusse point aduisé de



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