Saint-Joseph (révérend père dom Pierre de = R. P. D. P. D. S. J.) [1649], CATECHISME DES PARTISANS, OV RESOLVTIONS THEOLOGIQVES touchant l’Imposition, Leuées & Employ des Finances, Dressée par Demandes & Responces, pour plus grande facilité. , françaisRéférence RIM : M0_652. Cote locale : D_1_9.
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pour ne dire peut-estre au change, & à la banque, qui ne ressentent rien de la
pauureté, ny de l’humilité religieuse. Nous ne lisons pas ces conduites dans le vieil
Testament, ny aucunes impositions excepté les decimes, pour les Leuites, les Recabites,
les Scribes ny les Pharisiens : l’Eglise durant quinze siecles n’a eu connoissance,
ny pratique, de ces maximes, & elles n’ont commencé à paroistre & auoir cours
que dans nos temps, & dés qu’on a quitté la Theologie de l’Euangile & la Morale
veritablement Chrestienne.

 

D. Quelles impositions se peuuent & doiuent faire ?

R. On ne sçauroit bien constamment, ny auec vne détermination arrestée respondre
à ceste demande. Il y en a de plusieurs sortes. Les vnes se font par imposition
pecuniaire sur les fonds, ou sur les personnes, ou sur tous les deux, qu’on nomme tailles,
reelles, personnelles, ou mixtes. Les autres sur les denrées necessaires à la vie &
qui croissent dans le Royaume, comme sur le vin & le sel. Les autres sur les choses
qui entrent des Royaumes estrangers dans le nostre, ou sortent du nostre pour passer
dans les estrangers, qu’on appelle doüanes ou traittes foraines pour celles qui regardent
les tailles mixtes, il semble qu’elles soient les plus iustes & les plus equitables :
car comme l’Estat contient & le sel, & les hommes, il est bien raisonnable que
l’vn & l’autre contribuë à sa conseruation, dans vn ordre & proportion conuenable.
Pour celles qui concernent les choses necessaires à la vie & qui croissent dans le
Royaume, ce sont les plus dures & les moins Chrestiennes : car quelle apparence de
mettre de l’enchere, sur ce dont les pauures ne se peuuent passer, & que la nature nous
donne pour nostre entretien, ou sans trauail, ou auec peu de trauail ? n’est-ce pas assez
que ie paye ou pour ma terre, ou pour ma personne, selon ma condition & mon trauail,
sans payer pour le vin qui vient sur ma terre, qui n’est que le fruict de mou
fonds & de mon labeur ? Il n’en est pas de mesme des doüanes & traittes foraines,
lesquelles estant des marques de l’authorité du Prince, tiennent en quelque sorte de
la nature de son domaine : d’autant que le Roy estant le maistre de son Estat, il a droit
par cette seule consideration, sans autre necessité, d’empescher ou de permettre le
commerce auec les estrangers, principalement pour les choses dont on se peut passer
facilement & qui pour l’ordinaire ne seruent qu’au luxe & à la vanité : de façon
qu’il peut tirer reconnoissance de la permission qu’il donne du transport reciproque
de ces marchandises, dedans ou dehors son Royaume ; Mais aussi cette taxe doit
estre moderée, ne doit estre que dans les villes frontieres, pour les entrées ou sorties
du Royaume, & non pas dans le Royaume, pour ce qui passe d’vne prouince à l’autre,
ce qui seroit rendre l’Estat estranger à soy-mesme ; ny pour toutes ces entrées de
villes, lesquelles quelque tiltre specieux qu’on leur donne, sont tousiours des marques
de diuision, entre les freres, dans vne mesme maison & sous vn mesme pere.

D. Que dites-vous des subsistances ?

R. Le mesme que i’ay dit des tailles, puis qu’il n’y point de difference. Ce n’est
qu’vn nouueau nom inuenté depuis peu d’annees, pour donner nouuelle couuerture
à l’oppression : qui a plus causé de ruynes à Estat en six ou sept ans, que les tailles
n’en auoient fait en cinquante, que la barbarie des partisans & de leurs commis.
Et que Dieu veüille que celuy qui en a esté l’inuenteur, n’en ressente point à present
la punition, dans la violence de ces flames qui ne s’esteigne iamais.
D. Vous venez d’auancer vne parole qui m’estonne & qui en fera bien estonner
d’autres, hé quoy le Roy est il de moindre condition qu’vn particulier ? que peut-il
pas le mettre en party ? & ceux qui en traittent de cette sorte, sont-ils pires que
ceux qui font vn autre trafic pour l’auancement de leur famille & l’éleuation de leurs
enfans ? y a t’il rien en cela qui ne soit licite ?



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