Favre (R. P.) [1649], HARANGVE FVNEBRE, PRONONCEE AVX OBSEQVES DE MONSIEVR LE DVC DE COLIGNY, FAITES A ST DENYS LE SAMEDY XX. FEVRIER M. DC. XLIX. en presence de Monseigneur LE PRINCE. Par le R. P. FAVRE Cordelier, Docteur en Theologie de la Faculté de Paris, & Predicateur de la Reyne Regente. , françaisRéférence RIM : M0_1606. Cote locale : C_5_44.
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tout, disons de nostre Duc, ce que saint Ambroise disoit
de l’Empereur Theodoze, perfecta est ætas vbi est perfecta
virtus, l’aage est parfaite quand la vertu est consommée.
I’atteste vostre conscience, Messieurs, vous
qui viuez presque tousiours entre les bras de la mort,
pensez-vous, qu’vne pareille à celle du Duc de Coligny,
doiue estre jugée malheureuse ? ou plustost ne la
iugez-vous pas digne d’enuie, selon toutes vos maximes
politiques & militaires ? mourir les armes à la main
pour deffendre l’authorité de son Prince, n’est-ce pas la
plus forte passion des ames les plus nobles ? le DVC DE
COLIGNY est mort de la sorte. Mourir apres auoir
triomphé, tout chargé de Palmes, & tout couronné de
Lauriers, & marquer le dernier iour de sa vie par vne
glorieuse victoire, n’est-ce pas l’ambition de tous les
gravds Capitaines ?

 

Le Duc DE COLIGNY est mort de cette façon,
mourir durant vn concert de loüanges ; dans l’acclamations
publique, faisant couler les larmes des yeux du
Roy, de la Reyne, des Princes, des Princesses, de tous
les grands de l’Armée & du Royaume, regreté de tous
les soldats, pleuré de tous les peuples de l’vn & de l’autre
party, n’est-ce pas le desir de toutes les grandes ames ?
le DVC DE COLIGNY est mort de cette maniere. Helas
Messieurs, combien y en a-t’il, à qui la vie est donnée
comme en punition de leurs crimes, qui se sauuent
des tremblemens de terre, des ruïnes de quelques
grands edifices, qui ont escrazé des millions de personnes,
pour lesquels il semble que toutes les armes
du Ciel ont eu de la connoissance & de l’adresse pour se



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